Emmanuel  Macron a récemment annoncé la construction de plusieurs nouvelles centrales nucléaires, ainsi que le maintien en activité d’une bonne partie des réacteurs actuellement en service.

Sur la question du nucléaire, les différentes positions, à gauche, sont trop souvent catégoriques – et abstraites : « pour » ou « contre » dans l’absolu. La France insoumise est « contre » et défend le projet d’une « sortie » planifiée du nucléaire. A l’inverse, le PCF affirme son soutien total à l’énergie nucléaire, « pour l’emploi » et « l’indépendance énergétique » du pays.

En réalité, le nucléaire n’est pas une question de principe. Le débat doit être posé de façon concrète.

L’état du parc nucléaire

Il faut partir de la situation réelle : aujourd’hui, l’industrie nucléaire est dominée par le capitalisme. La course aux profits et les mesures d’« économies » qui en découlent ont un impact sur les conditions de travail dans les centrales : 80 % des opérations de maintenance y sont effectuées par des sous-traitants dont les salariés ont des contrats précaires. La maintenance préventive a été abandonnée : on attend que les problèmes apparaissent pour les régler. Par ailleurs, le démantèlement des centrales coûtant très cher, EDF en prolonge le fonctionnement au-delà de la durée initialement prévue. Cela génère constamment des problèmes. Par exemple, on a assisté, cet hiver, à une « épidémie de corrosion » dans les circuits de refroidissement d’urgence de plusieurs centrales.

Ces problèmes touchent aussi les nouvelles centrales. Par exemple, le chantier de l’EPR de Flamanville est truffé de problèmes de sécurité. En 2011, L’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) révélait que, pour faire des économies, Bouygues avait utilisé des matériaux au rabais pour construire certaines parties sensibles de la centrale.

Dans un tel contexte, la nationalisation de toute la filière s’impose comme une mesure d’urgence, de façon à organiser rapidement le démantèlement des vieilles centrales que Macron veut faire encore tourner pendant des décennies. Bien sûr, cela devra s’accompagner d’un reclassement satisfaisant de tous les salariés du secteur, qui ne doivent pas perdre un centime de salaire.

Un problème international

Cependant, ceci n’épuise pas la question. La question du nucléaire a une dimension internationale incontournable. Cela commence dès l’approvisionnement en combustible. L’entreprise Orano (ex-Areva) est un pilier de l’impérialisme français, qui apporte un soutien sans faille aux dictatures du Sahel et du Kazakhstan pour garantir son approvisionnement en uranium.

Les déchets nucléaires traités à l’usine de la Hague (en Normandie) proviennent des quatre coins de l’Europe, et même du Japon. Par ailleurs, une partie de l’énergie nucléaire produite en France est exportée vers d’autres pays, notamment vers l’Allemagne, qui prétend être « sortie du nucléaire ». La liquidation de l’actuelle filière nucléaire en France aurait donc des conséquences bien au-delà des frontières de l’hexagone et ne pourrait être envisagée sans une coordination internationale – laquelle est impossible, précisément, sur la base du capitalisme.

Perspectives

Ceci étant dit, rien ne permet d’affirmer que la science n’a plus rien à offrir pour le développement ou l’amélioration de l’énergie nucléaire. Il ne faut pas oublier les bonds de géant réalisés, au cours de l’histoire, dans tous les domaines de la science. Pouvait-on prévoir que les petites machines à électricité qui amusaient les salons des Lumières, au XVIIIe siècle, étaient les ancêtres de centrales électriques fournissant de l’énergie à des villes entières ?

Il est tout à fait possible que les problèmes posés aujourd’hui par l’énergie nucléaire – en termes d’approvisionnement en combustible, de sécurité et de traitement des déchets – puissent être résolus, à l’avenir, par les progrès de la science. Par exemple, une industrie nucléaire utilisant des sources d’approvisionnement plus propres et capable de traiter correctement ses déchets aurait toute sa place dans une politique énergétique durable, aux côtés d’autres sources d’énergie, telles que la géothermie et les centrales marémotrices. Pour être efficace, une politique énergétique viable suppose de combiner différentes sources d’énergie, selon les besoins et les capacités existantes au niveau local.

Le problème, c’est qu’une telle perspective suppose des investissements colossaux, notamment dans la recherche scientifique. Or les classes dirigeantes ne sont absolument pas disposées à réaliser de tels investissements, car elles exigent avant tout des profits à court terme. Cela vaut pour le nucléaire comme pour les énergies renouvelables : les énormes investissements requis sont incompatibles avec le règne des profits immédiats et des taux juteux. Au lieu d’investir dans des méthodes d’exploitation de l’énergie nucléaire moins dangereuses, les capitalistes se contentent de « modernisations » à la marge, pour faire des économies.

Pour régler la crise énergétique, il faudra soustraire la science et la production d’énergie au contrôle de la bourgeoisie – et ce non seulement en France, mais aussi à l’échelle internationale, qui est la seule échelle pertinente dans ce domaine, comme nous l’avons souligné plus haut. Seul le socialisme permettra de développer une politique énergétique viable, basée sur l’exploitation rationnelle et coordonnée des ressources de la planète, dans laquelle le nucléaire pourrait, éventuellement, avoir une place. 

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