Thatcher est enfin morte et enterrée. Sa victoire électorale en 1979 fut la conséquence de la politique de restrictions budgétaires et d’austérité salariale du gouvernement travailliste de Callaghan. Le pouvoir d’achat baissait. L’hiver de 1978-1979 avait été marqué par de nombreuses luttes syndicales pour les salaires. Entre octobre 1978 et mars 1979, on a enregistré plus de 10 millions de journées de grève. La confédération des syndicats (TUC) comptait 13,3 millions d’adhérents, soit 53 % des travailleurs du pays. Mais sur le plan électoral, le ressentiment populaire contre Callaghan et la direction du Parti Travailliste a préparé le terrain à la victoire de la droite.

Thatcher comprenait que pour mettre en œuvre son programme, elle devait briser le pouvoir des organisations syndicales. Elle visait particulièrement le syndicat des mineurs (NUM). Le gouvernement a provoqué une première confrontation avec les mineurs en 1981, avec l’annonce de la fermeture de 23 puits. La réaction des mineurs fut immédiate. Dans toutes les régions minières, ils se mirent en grève. Prise à l’improviste, Thatcher a reculé. Elle baissait dans les sondages. En décembre 1981, sa cote de popularité n’était que de 23 %. Mais lorsque le général argentin Galtieri a saisi les Malouines afin de créer une diversion et renforcer son régime dictatorial, il a fourni à Thatcher l’occasion de renforcer sa propre position en Grande-Bretagne.

Jusqu’alors, l’impérialisme britannique s’entendait bien avec la dictature argentine. Il lui fournissait du matériel militaire et des équipements de « maintien de l’ordre ». Il n’aurait pas été difficile de discréditer la propagande guerrière de Thatcher, qui subitement prétendait défendre la démocratie face au « fascisme » argentin. Mais la direction du mouvement travailliste a cautionné l’envoi de la flotte britannique. Faute d’opposition conséquente de la part des dirigeants travaillistes, la facile victoire militaire de la Grande-Bretagne a permis à Thatcher de remporter les élections suivantes, en juin 1983.

Thatcher se sentait alors en position de force pour lancer une autre guerre, contre la classe ouvrière britannique en général et contre les mineurs en particulier. Depuis 1981, le gouvernement avait pris soin d’accumuler des stocks de charbon massifs. La police nationale avait été réorganisée, avec notamment le renforcement des sections « antiémeutes ». Face à la grève provoquée en 1984 par l’annonce de la suppression de 20 000 emplois et la fermeture d’une vingtaine de puits, aucun moyen n’a été négligé pour assurer la défaite de celle-ci : la violence policière, des lois antisyndicales, les tribunaux, une campagne soutenue de mensonges dans la presse et à la télévision, etc.

Les mineurs se sont battus avec une énergie et une détermination exemplaires pendant plus de 12 mois. Le facteur déterminant dans leur défaite fut le refus, de la part du TUC, d’organiser une généralisation du mouvement de grève. Cette défaite eut de graves conséquences pour les mineurs et pour l’ensemble de la classe ouvrière britannique. Le « thatchérisme » était une offensive contre toutes les conquêtes sociales du mouvement ouvrier, avec la vente de logements sociaux, la destruction partielle du service de santé nationale (NHS), la législation antisyndicale, les privatisations et une agression permanente – matérielle et idéologique – contre les chômeurs, les pauvres et toutes les victimes du capitalisme. Thatcher incarnait à la perfection l’avarice et la rapacité du capitalisme. Elle haïssait profondément les travailleurs – et ne méritait, en retour, que notre haine.

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