« C’est une renaissance ! » Ces mots d’Alan Woods, le principal théoricien de la TMI, résument bien l’ambiance de la récente réunion de notre Comité Exécutif International (CEI) qui s’est tenue début février en Italie. Une couche significative de travailleurs et de jeunes cherche à saisir à pleines mains le drapeau du communisme. Nous devons nous tourner résolument vers elle en construisant une Internationale Communiste Révolutionnaire.

Perspectives mondiales : crise et radicalisation

Notre tournant audacieux découle de la situation objective telle que l’a souligné Alan lors de la session introductive du CEI, consacrée aux perspectives mondiales. Les capitalistes titubent de crise en crise à tous les niveaux – politique, économique, social et militaire – tandis que l’inflation rogne les salaires et les conditions de vie des masses.

Dans ce contexte tumultueux, a souligné Alan, il ne faut pas surestimer la rationalité des capitalistes. Comme le disait Lénine, « un homme au bord du gouffre ne raisonne pas ». La classe dirigeante enchaîne les erreurs. En 2022, le président américain Joe Biden, cette créature héritée de la Guerre froide, a poussé l’Ukraine dans une guerre perdue d’avance contre la Russie. L’an dernier, il a apporté son soutien inconditionnel à la guerre génocidaire menée par Israël à Gaza. Et maintenant, les Etats-Unis lancent de nouvelles frappes aériennes au Moyen-Orient et menacent l’Iran. Une guerre généralisée au Moyen-Orient serait un désastre. C’est pourtant dans cette direction que s’orientent les impérialistes.

Comparant leur situation à celle du Titanic, Alan a souligné que, pour sa défense, le capitaine du paquebot naufragé n’avait pas vu l’iceberg approcher, tandis que « Biden et ses conseillers voient l’iceberg à l’horizon et crient : en avant toute ! »

Alors que le monde s’enflamme (au sens propre comme au sens figuré), les masses désespèrent de leurs dirigeants. Dans tous les pays, tous les sondages montrent une haine profonde pour l’ensemble des piliers de l’establishment : des politiciens aux grandes entreprises en passant par la presse. Dans le même temps, le mouvement ouvrier a commencé à sortir de sa torpeur en Grande-Bretagne, en France, aux Etats-Unis – et même dans des pays comme l’Allemagne où il était en sommeil depuis des décennies.

Ce changement majeur dans les consciences fait suite à une période où les courants réformistes de gauche (les mouvements autour de Corbyn et Sanders, SYRIZA, Podemos, etc.) ont été mis à l’épreuve, jusqu’à être détruits. Comme l’a dit Alan, « Ils ont chaque fois soulevé des attentes et des espérances gigantesques… pour mieux les décevoir ».

Le réformisme ­ et même le « socialisme » ­ sont donc vus avec méfiance par les couches les plus radicales des travailleurs et de la jeunesse. Comme le montrent les succès de notre campagne communiste, les nouveaux combattants de la classe ouvrière ne se satisferont de rien de moins que le communisme.

« Dans tous les pays, des milliers, des dizaines des milliers, des centaines de milliers, et probablement des millions de jeunes ont été gagné aux idées du communisme. […] Le véritable communisme est instinctif, c’est un besoin de combattre et de transformer les choses. Les membres de ces couches nouvelles se considèrent comme communistes – ils n’ont pas lu les livres, mais ils sont communistes quand même et n’ont pas besoin d’être convaincus. »

Toucher cette avant-garde de travailleurs et de jeunes a été le leitmotiv de cette réunion du CEI. Comme l’a dit Alan, en gagnant ces communistes instinctifs dans nos rangs, « nous construirons une puissante internationale communiste. Une force sérieuse, non seulement pour observer et commenter les événements, mais pour intervenir dans la lutte des classes qui se développe dans tous les pays. »

L’impérialisme et la Palestine

Les gaffes de Biden coïncident avec le déclin relatif de l’impérialisme américain à l’échelle mondiale. Ce processus ouvre un espace à des rivaux de Washington, comme la Russie et surtout la Chine, pour se tailler leurs propres sphères d’influence. Tout cela a été abordé et discuté en profondeur lors d’une session du CEI consacrée à l’impérialisme.

S’appuyant sur des faits et des données chiffrées, Jorge Martín, membre du Secrétariat International (SI) de la TMI, a montré que, depuis sa transition vers le capitalisme, la Chine s’est développée jusqu’à devenir la deuxième puissance impérialiste mondiale. Elle rivalise désormais avec les Etats-Unis dans des secteurs de haute technologie comme les superordinateurs et les véhicules électriques, gagne de nouveaux marchés, des alliés et des routes commerciales pour exporter ses capitaux, et se confronte à l’Occident sur des questions stratégiques comme la souveraineté de Taïwan. Dans le même temps, la Russie s’est servie de son puissant appareil industriel et de sa considérable force militaire pour déjouer les plans des Occidentaux, en Syrie et maintenant en Ukraine.

La division et la redivision du monde entre les puissances impérialistes sont des facteurs essentiels dans les perspectives, car elles préparent un avenir instable. Il est impératif que les communistes aient une perspective claire sur la question de l’impérialisme, en commençant par l’étude de la situation objective, et qu’ils adoptent l’analyse magistrale de Lénine comme grille de lecture théorique. Un document rédigé en 2016 qui explique notre position a été adopté à une large majorité lors de cette session importante.

Le CEI a aussi discuté de la guerre sanglante menée par Israël à Gaza, qui est devenue un point de cristallisation dans la lutte des classes à l’échelle mondiale. Elle a complètement mis à nu l’hypocrisie des impérialistes occidentaux, qui multiplient les sermons sur « la démocratie et le droit » tout en soutenant et en armant le massacre de milliers de Palestiniens. Cette situation a provoqué une colère de masse partout à travers le monde. Nos camarades ont aussi subi une série d’attaques de la part des Etats bourgeois pour avoir exprimé notre solidarité avec la Palestine et défendu une solution révolutionnaire.

Le CEI a adopté à l’unanimité une déclaration de la TMI, publiée peu après l’attaque du Hamas le 7 octobre, qui affirme clairement que les communistes se tiennent du côté des opprimés, et qui rejette l’hypocrisie répugnante de nos impérialistes. Intifada jusqu’à la victoire, révolution jusqu’à la victoire !

De grandes avancées

Deux sessions ont montré le potentiel pour la croissance des forces du communisme dans tous les pays. Elles traitaient de sections de la TMI dans deux pays où le communisme apparaissait autrefois comme une perspective très lointaine – les Etats-Unis et la Suisse – et où nos camarades ont pourtant fait de grands progrès au cours de la dernière période.

Tom Trottier, membre de la direction de notre section américaine, a exposé les contradictions profondes du capitalisme américain. Malgré les proclamations tapageuses de la classe dirigeante sur la reprise et la stabilité de l’économie, les masses n’en voient pas la couleur, que ce soient dans leurs salaires ou dans leurs conditions de vie.

Alors que la cote de popularité de Biden est la plus basse pour un président dans l’histoire récente, et que Donald Trump écrase tous ses concurrents des primaires républicaines, il semble inévitable que les Etats-Unis aient à repasser par « l’école du trumpisme » après les élections présidentielles de 2024. Contrairement à ce que prétendent les libéraux et les réformistes qui crient au loup, cela ne va pas déboucher sur le « fascisme ». Au contraire. Une victoire de Trump signifiera que la polarisation et la radicalisation de la société américaine seront poussées encore un peu plus loin. Le vide politique à gauche laisse donc le champ libre au communisme pour gagner les esprits des travailleurs et de la jeunesse.

Le camarade Antonio Balmer a donné un aperçu du véritable état d’esprit de millions d’Américains en lisant un message qu’un jeune travailleur a envoyé à notre site américain avant d’adhérer :

« Je hais le capitalisme de tout mon être, je refuse que ce système infâme m’entraîne dans sa chute, ou alors je mourrai en le combattant. […] Pas besoin de me convaincre, je veux seulement qu’on me donne les moyens d’agir et qu’on me forme. »

Voilà, comme le dit Antonio, « le nouveau type d’Américains que l’histoire a produit ! »  Nos camarades américains ont reçu des milliers de messages de ce type, de la part de jeunes communistes en devenir, pleins de colère et d’esprit de sacrifice.

Les camarades ont mis en branle toute leur organisation pour pouvoir rentrer en contact avec cette couche, en luttant contre toute forme de passivité ou de routine. Avec ces méthodes, les camarades américains sont certains d’atteindre les 1000 membres dans l’année.

Que le communisme devienne en vogue aux Etats-Unis semblait autrefois être une perspective très lointaine. Dans la « riche »  et « neutre » Suisse, cela pouvait paraître carrément impossible. Et pourtant, Dersu Eri, un dirigeant de notre section suisse, a décrit les progrès stupéfiants que nos camarades ont réalisés, en grandissant de 60 % en seulement six mois.

Dersu a expliqué que cette croissance reposait sur une couche de camarades recrutés au cours de la campagne communiste dont la « mentalité est celle de soldats attendant d’être mobilisés pour la guerre de classe ». Ces nouveaux combattants sont pénétrés de l’urgence de construire l’organisation, et ils sont immédiatement devenus nos meilleurs recruteurs : ils n’hésitent pas à scander des slogans communistes dans leurs universités, dans la rue – et même dans le tram !

Notre notoriété a également été renforcée par la presse bourgeoise, qui a lancé une féroce campagne de calomnies contre les slogans de nos camarades en faveur de l’intifada et de la révolution au Moyen-Orient. Loin de se laisser intimider, ils sont passés à l’offensive, en organisant des manifestations et des meetings dans tout le pays, notamment à Berne où un rassemblement a regroupé des centaines de personnes.

Cette attitude audacieuse et cet esprit combatif ont été les clés de la réussite de nos camarades, et leur ont permis d’attirer à eux les militants les plus décidés. Notre but est précisément de toucher cette couche, d’en faire des bolcheviks conscients et organisés, et de constituer une force historique décisive. Il nous faut donc les armer avec les bons outils théoriques et leur laisser la plus grande marge de manœuvre possible pour prendre des initiatives et construire l’organisation.

Dans le cadre de ce tournant, les camarades suisses vont fonder le Parti Communiste Révolutionnaire, qui sera le fer de lance de la nouvelle génération de communistes suisses dans la lutte contre le capitalisme.

La fin de notre préhistoire

La dernière partie de cette réunion historique du CEI a commencé par une stimulante discussion sur les finances, dont le clou a été la présentation de notre nouveau siège international à Londres. Ce local est un véritable monument à l’esprit de sacrifice bolchevik de nos camarades, qui nous a permis de nous libérer de la dépendance à l’égard des propriétaires capitalistes.

Hamid Alizadeh du SI a ensuite présenté un rapport organisationnel, qui était très différent de ceux que nous avions l’habitude d’entendre lors de ce genre de réunions. Il est clair que la préhistoire de notre organisation touche à sa fin. Nos anciennes méthodes – basées sur des cercles de discussion dans les universités – ont été rendues obsolètes par la situation objective. Partout dans le monde, nous opérons un tournant audacieux vers l’extérieur : nous cherchons à conquérir toutes les rues, tous les lieux de travail et toutes les salles de classe au communisme.

Notre taux de croissance (de près de 40 % l’an dernier) dépasse tout ce que nous avons connu auparavant. Après avoir atteint à l’échelle mondiale la barre des 5000 membres en octobre 2023, nous avons dépassé les 6000 adhérents, en janvier 2024. Les camarades britanniques ont été les premiers à franchir la barre des 1000, mais au vu de la croissance de plusieurs de nos sections l’an dernier, comme l’Italie (25 % de croissance, 515 camarades), le Canada (70 %, 668 camarades) et les Etats-Unis (85 %, 630 camarades), ils devraient bientôt être rejoints !

Plusieurs groupes plus petits ont connu une croissance explosive, et sont en bonne voie pour devenir de véritables sections. Par exemple, les camarades irlandais ont grandi de plus de 380 % depuis janvier 2023, passant de 7 à 34 militants.

Pendant ce temps, nos sites internet, nos podcasts et nos vidéos cumulent des millions de vues chaque année. Notre maison d’édition, Wellred Books, a connu la meilleure année de son histoire, et s’apprête à battre un nouveau record cette année encore. Les exemplaires d’In Defence of Lenin, une nouvelle biographie de Lénine écrite par Rob Sewell et Alan Woods, se vendent comme des petits pains, dans le cadre de la campagne que nous menons cette année pour commémorer le centenaire de la mort de ce grand révolutionnaire. On peut affirmer sans craindre d’exagérer que nous sommes la première source de théorie, d’actualité et d’analyse communistes au monde.

Vers l’Internationale Communiste Révolutionnaire !

Nous devons bien comprendre le caractère de la période dans laquelle nous sommes entrés. Les partis réformistes de masse sont dominés par leur aile droite. Les staliniens et les sectes sont en crise. Dans de nombreux pays, les réformistes de gauche ont été discrédités par leurs hésitations et leurs trahisons. Il existe une couche de jeunes et de travailleurs radicaux, qui sont prêts à adopter les idées du communisme. Il leur faut un nouveau point de référence.

C’est pourquoi plusieurs de nos sections – en Suisse, comme nous l’avons mentionné, mais aussi en Grande-Bretagne, en Suède, au Danemark, au Canada et en Allemagne – ont pris la décision historique de fonder de nouveaux Partis Communistes Révolutionnaires. Et nombre d’autres sections se préparent à faire de même.

La dialectique nous enseigne qu’à un certain stade, les développements historiques atteignent des tournants. Quand cela se produit, il ne faut pas s’accrocher au passé et aux anciennes méthodes de travail, mais accueillir l’avenir avec enthousiasme. Dans de nombreuses parties du monde, nous sommes en train de devenir un point de référence, et nous devons nous présenter comme tels. « Nous sommes au milieu d’un saut dialectique, d’un changement de qualité », a déclaré Hamid en conclusion du rapport organisationnel : « Nous nous apprêtons à devenir une véritable force, prête à conquérir les couches avancées de la jeunesse et de la classe ouvrière. »

La Tendance Marxiste Internationale doit donc se refonder pour pouvoir faire face à un monde transformé. Nous laissons derrière nous notre vieille bannière pour forger une nouvelle Internationale Communiste Révolutionnaire (ICR). Ce sera le flambeau sous lequel la nouvelle génération de communistes pourra se rassembler.

Sous un tonnerre d’applaudissements, la réunion a adopté à l'unanimité une résolution pour approuver cette étape audacieuse et nécessaire. Nous avons décidé de convoquer cet été une conférence mondiale extraordinaire, qui sera ouverte à tous les communistes prêts à nous rejoindre dans la lutte, et lors de laquelle nous fonderons officiellement cette nouvelle Internationale.

Nous appelons tous les camarades de l’Internationale à s’y préparer dès maintenant : discutez-en, répandez la nouvelle, et assimilez le sens de cette nouvelle identité. Nous ne nageons plus à contre-courant : le vent de l’histoire souffle dans notre dos.

« De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ! »

Dans sa conclusion, Alan a remarqué une humeur tout à fait nouvelle au CEI. Comme il l’a souligné, il s’agit pour partie du « reflet objectif du changement de la situation dans son ensemble. » On n’a jamais vu une haine si répandue contre le statu quo, ni une crise si profonde de l’ordre établi. « C’est quelque chose que nous avons prédit dans nos perspectives pendant des décennies [...] Mais désormais, ce n’est plus une perspective. C’est un fait. Un fait tangible que tout le monde peut voir et sentir. »

Mais cela pose par ailleurs la question subjective de l’étape que traverse notre Internationale. Comme l’a expliqué Alan, tous les partis politiques sont des organismes vivants, qui doivent passer à travers une phase embryonnaire. Pour un parti révolutionnaire, cette phase consiste en une période de « petits cercles, qui nourrissent une mentalité de petit cercle, caractérisée par des méthodes informelles. »

Mais de telles méthodes deviennent à un moment un obstacle. « Soit elles seront abandonnées, soit l’organisation sera détruite. Nous avons depuis longtemps dépassé le stade des petits cercles. Toutes nos sections grandissent vite, et cela requiert de nouvelles méthodes et un nouvel état d’esprit. »

Pour illustrer cette nouvelle attitude, Alan a souligné le travail d’un camarade isolé, dans une petite ville du Pays de Galles du nom de Port Talbot, où l’industrie sidérurgique a été presque totalement détruite et où des licenciements massifs sont prévus dans les dernières aciéries encore en activité.

Face aux méthodes routinières des syndicats officiels, ce jeune camarade salarié, aidé par les cellules des environs, a pris l’initiative d’appeler les travailleurs à faire grève et à occuper les aciéries, et a annoncé un rassemblement public. Les camarades se sont lancés dans une lutte acharnée pour défendre la ville tout entière. Indépendamment de l’issue future de cette lutte précise, voilà un exemple de l’état d’esprit dont doit faire preuve chaque camarade dans l’Internationale.

De telles méthodes feront connaître les camarades britanniques du (futur) Parti Communiste Révolutionnaire et seront un exemple du genre d’Internationale Communiste Révolutionnaire que nous devons bâtir.

En conclusion, Alan a exhorté les camarades à adopter l’immortel mot d’ordre de Danton : « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ! C’est ainsi que nous vaincrons. »

En avant vers l’Internationale Communiste Révolutionnaire !

Le 12 février 2024


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