Dimanche 16 juillet, 1,5 million de personnes ont manifesté, à Mexico, pour protester contre la fraude électorale qui a entaché les élections présidentielles du 2 juillet. Cette manifestation fut le point culminant d’une marche nationale à l’appel du candidat du PRD, Lopez Obrador, qui exige un nouveau décompte « bulletin par bulletin, bureau de vote par bureau de vote ». Même la police fédérale - qui parle d’1,1 million de manifestants - reconnaît qu’il s’agissait d’une des plus grandes manifestations de l’histoire du Mexique.

Le cortège devait partir du Musée National d’Anthropologie pour rejoindre l’immense place Zocalo. Mais en fait, celle-ci était déjà pleine avant que la manifestation ne commence. L’ambiance était très radicale, avec des slogans comme : « Si on a Calderon [droite], il y aura une révolution ! ». Lopez Obrador a dit que ce n’était que le commencement d’une campagne de résistance civile massive, qui comprendrait l’installation de campements devant les bâtiments des 300 districts électoraux, la formation d’un comité national pour coordonner la mobilisation et l’organisation d’une nouvelle manifestation, le 30 juillet, avec pour objectif de doubler le nombre de participants.

La détermination de la masse des travailleurs et paysans est résumée par certains de leurs propos, que l’on trouve au fil des articles de presse. « Les gens sont vraiment en colère. On ne va pas simplement rentrer chez nous. On va continuer jusqu’à ce qu’Obrador soit proclamé président », dit Francisco Benavides, un paysan. Une vieille femme : « Nous sommes fatigués de ces riches qui font ce qu’ils veulent et dépouillent les pauvres. On ne leur permettra pas de nous voler ces élections. »

La manifestation d’hier marque une étape importante dans la lutte contre la fraude. Cette lutte ne peut pas être gagnée par des voies seulement légales, mais par la mobilisation massive dans la rue. Comme le réclament nos camarades d’El Militante, une grève générale de 24 heures devrait être organisée. Si, comme l’a dit Obrador, « un petit groupe de privilégiés » a volé les élections, ils ne peuvent être battus que par l’action de masse des travailleurs et de paysans qui ont voté pour le PRD.

Le problème de la classe dirigeante mexicaine, c’est qu’il ne pourrait pas y avoir de pires conditions pour mettre en pratique le programme dont elle a besoin. A chaque fois que le précédent gouvernement de Vincente Fox a tenté de faire passer les grandes contre-réformes réclamées par les capitalistes - privatisation du pétrole et de l’électricité, destruction du système de retraite et « réforme » du code du travail -, il a dû reculer face à une opposition massive. Or, ce que Fox n’a pas pu faire, le gouvernement de Calderon, largement considéré comme illégitime, en serait encore moins capable.

En même temps, les capitalistes mexicains ont très peur des implications d’un gouvernement de Lopez Obrador. Ce qu’ils craignent, c’est précisément ce qu’on a vu dimanche et depuis deux semaines : la masse des travailleurs et des paysans qui soutiennent Obrador parce qu’ils veulent un changement fondamental de leurs conditions de vie. Or, si Obrador prend le pouvoir sur la base d’une telle vague de colère et d’attentes, il sera sous l’énorme pression de ceux-là mêmes qui ont voté pour lui, et le mouvement pourrait aller plus loin qu’il ne le souhaite.

La crise du capitalisme mexicain a créé une situation où, désormais, tout ce que pourra faire la classe dirigeante sera une erreur. Certes, ils vont temporiser, retarder le verdict du tribunal, peut-être engager un décompte partiel des voix, renvoyer toute décision à la fin du mois d’août - bref, jouer le pourrissement du mouvement. Peut-être, d’ailleurs, qu’ils parviendront à leurs fins. Mais la période qui vient de s’ouvrir, au Mexique, verra une intensification de la lutte des classes, au cours de laquelle les travailleurs et les paysans mexicains apprendront de précieuses leçons et retrouveront leurs meilleures traditions révolutionnaires.

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