Nous avons envoyé l’article suivant à la rédaction de L’Humanité, début décembre, en proposant qu’il soit publié dans la rubrique « Tribune libre ». Il n’a pas été publié.

L’actuelle crise économique et sociale, avec son cortège de suppressions d’emplois, de fermetures d’entreprises et de délocalisations, est l’expression de l’impasse dans laquelle le système capitaliste a conduit la société. Elle constitue une réponse cinglante à tous les « observateurs » préférés de l’industrie audiovisuelle et autres propagandistes du capitalisme. Ces vingt dernières années ont été marquées par une offensive idéologique majeure pour discréditer le socialisme – volontairement assimilé aux monstrueuses caricatures qui existaient en URSS et en Europe de l’Est – et présenter le capitalisme comme un système pouvant assurer la prospérité et le bien-être de tous.

Cette offensive ne fut pas sans conséquences pour les partis de gauche et le mouvement syndical, en France comme ailleurs. Ces organisations n’existent pas dans le vide. Elles subissent les pressions idéologiques et matérielles du système en place. La dérive droitière de la direction du Parti Socialiste a atteint un point où il n’y a plus de divergences sérieuses entre sa politique et celle des partis de droite. Plusieurs dirigeants socialistes de première ligne ont rallié le gouvernement Fillon sans changer quoi que ce soit à leurs « convictions ». Ségolène Royal et des dizaines d’autres représentants de ce « socialisme » bourgeois et réactionnaire auraient pu en faire autant.

Il faut reconnaître que le PCF n’a pas été à l’abri de ces pressions capitalistes. Au cours de la dernière période, et particulièrement depuis le milieu des années 90, son programme a été progressivement vidé de tout ce qui constituait une menace sérieuse contre la propriété capitaliste. L’adaptation de son programme à l’« économie de marché » et l’abandon de toute tentative sérieuse de présenter une alternative au système capitaliste a trouvé son expression la plus flagrante entre 1997 et 2002, avec la participation des ministres communistes au plus grand programme de privatisation jamais mis en œuvre dans l’histoire du pays. Cette dérive politique allait directement à l’encontre des aspirations et des convictions de l’immense majorité des communistes. Elle était contraire aux intérêts de la masse de la population. Et c’est en elle que réside la cause principale de l’affaiblissement du PCF.

Mais cet affaiblissement n’a rien d’irréversible. Le PCF peut et doit remonter la pente. Les répercussions sociales et économiques de la crise, conjuguées au virage droitier du Parti Socialiste, lui ouvrent des perspectives considérables. Le communisme n’est pas en crise, contrairement à ce qu’affirment de nombreux dirigeants du parti. C’est le capitalisme qui est en crise. La politique de la droite et du MEDEF, qui consiste à défendre les profits des capitalistes au moyen de la régression sociale, ne peut qu’attiser la lutte des classes. Elle finira par rompre l’équilibre social qui repose, en définitive, sur la relative passivité de la masse de la population. L’instabilité sociale et les crises révolutionnaires à répétition qui balayent l’Amérique latine gagneront progressivement la France et l’ensemble de l’Europe. Telles sont les prémisses économiques et sociales de la prochaine révolution française. Le PCF doit s’y préparer.

Notre premier devoir, en tant que communistes, est de défendre et d’expliquer – patiemment, certes, mais sans ambages – un programme authentiquement révolutionnaire. Ce programme doit relier les luttes nécessairement défensives – contre la casse industrielle, pour la sauvegarde de l’emploi, des services publics, des retraites, de la sécurité sociale, etc. – à des mesures offensives pour s’attaquer à la source du pouvoir des capitalistes. Et cette source, c’est la propriété capitaliste.

L’axe central du programme général du PCF doit être la nationalisation de l’ensemble du secteur financier (banques, assurances, crédit, etc.), de toutes les grandes entreprises industrielles et de la grande distribution. Il faut remplacer le capitalisme et la loi du profit par un système reposant sur la planification démocratique et la coordination rationnelle des différents secteurs de l’économie dans l’intérêt de l’ensemble de la société. Ce système s’appelle le socialisme. L’utilisation des gigantesques richesses générées par l’économie nationale permettra alors d’éradiquer la pauvreté et de satisfaire les besoins sociaux. Le socialisme constitue la seule alternative viable au capitalisme. En expliquant patiemment mais systématiquement cette alternative, le PCF contribuerait grandement à l’éducation politique des travailleurs. Il leur donnerait les armes pratiques et idéologiques dont ils ont besoin dans leurs luttes.

Bien sûr, le mouvement communiste doit également présenter un programme de revendications « immédiates » dans les domaines économique et social. Le PCF doit être en première ligne de tous les combats pour l’extension des droits, la défense des acquis et l’amélioration des conditions de vie de la masse de la population. Il ne s’agit pas de rester les bras croisés, en se limitant à l’affirmation de la nécessité du socialisme. Par contre, il est totalement illusoire de prétendre insuffler une « logique anti-capitaliste » dans le fonctionnement de ce même système au moyen de taxes punitives, de « bonus-malus », de « crédits sélectifs » et autres formes de subvention aux capitalistes.

L’incapacité du capitalisme à faire avancer la société signifie nécessairement l’impuissance des méthodes et de l’idéologie du réformisme. Par le passé, le réformisme trouvait sa justification dans le fait que, face aux luttes des travailleurs, les capitalistes accordaient certaines concessions, et parfois des concessions importantes. Mais aujourd’hui, la base économique du réformisme n’existe plus. Non seulement le capitalisme ne tolère pas de nouvelles avancées sociales, mais il est devenu incompatible avec les conquêtes sociales du passé. Ceci condamne à l’impuissance tous les programmes qui se basent sur le maintien de ce système. En conséquence, les dirigeants réformistes deviennent des « réformistes sans réformes ». Les différences entre la gauche réformiste et la droite tendent à s’effacer. Ce phénomène ne doit rien au hasard. Il est la conséquence directe du fait que le capitalisme ne peut plus exister qu’au détriment de la grande majorité de la population.

Malgré les difficultés qu’il a connues au cours de la dernière période, le PCF est toujours une organisation forte et viable. Il incarne une longue tradition de luttes. Il dispose de réserves sociales massives. Son nom est associé aux grandes conquêtes sociales du passé, à la résistance à l’oppression. C’est un héritage précieux, une tradition qu’il faut conserver et poursuivre. La période préparatoire du 34e Congrès a été marquée par la tentative, de la part de très nombreux militants communistes, de corriger et de radicaliser la politique du parti, notamment via les amendements présentés dans les sections. La volonté d’un retour aux « idées fondamentales » du communisme – le marxisme – s’est exprimée avec force. C’est une preuve de la vitalité et de la détermination du mouvement communiste. Le 34e Congrès ne résoudra pas les problèmes fondamentaux auxquels le PCF se trouve confronté. Il faudra du temps – et un effort collectif considérable – pour y rétablir les idées, les principes, la théorie et le programme du marxisme. Mais cet objectif est tout à fait à la portée des militants communistes. Continuons !

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