Plusieurs sondages ont placé la candidate du Front National en très bonne position des intentions de vote au premier tour de la prochaine élection présidentielle. L’expérience nous apprend à ne pas accorder une trop grande fiabilité à ce type de sondages. Mais il est clair qu’ils indiquent une tendance, qui a été confirmée par le résultat des élections cantonales. Le Front National progresse dans l’opinion.

Cela n’a rien de surprenant. La vie chère, les bas salaires, la précarité de l’emploi, le chômage et toute une série d’autres facteurs génèrent une exaspération massive et explosive. Le Front National est un parti capitaliste par excellence. Cependant, de même que Sarkozy joue à dénoncer le « capitalisme sauvage », la propagande du FN est calculée pour donner l’impression que ce parti s’oppose au système capitaliste et à l’ordre établi. Marine Le Pen dénonce la concurrence étrangère de « nos produits », qui détruit « nos emplois ». Elle condamne Maastricht et « l’ouverture des frontières ». Elle prétend s’opposer à l’immigration au nom de la « lutte contre le chômage ». Elle parle de « valeurs », exploite à son profit l’affairisme et la corruption des hautes sphères de l’Etat. Dans les conditions actuelles, cette démagogie trouve un écho chez des millions de Français. La menace que représente le Front National doit être prise au sérieux par toutes les organisations de travailleurs.

La politique de Sarkozy est complètement discréditée. Au lieu de la croissance et de la prospérité promises, l’économie française n’a cessé de sombrer. Le chômage a massivement augmenté. Dans l’espoir de faire remonter sa côte de popularité, Sarkozy s’efforce d’exploiter les sentiments patriotiques et racistes. En 2009, déjà, il avait orchestré un « débat » médiatique sur le thème de l’identité nationale. En 2010, il a organisé – et fortement médiatisé – la chasse aux Roms. Le « débat » sur l’Islam qu’il lance actuellement poursuit les mêmes objectifs : désigner des boucs émissaires, dresser les travailleurs les uns contre les autres, et exonérer les vrais responsables – les capitalistes et leur gouvernement – de la débâcle sociale et économique. Tout ceci ne peut que profiter au Front National.

Depuis ses origines, le Front National s’est toujours nourri de l’incapacité des directions réformistes des partis de gauche à offrir une alternative au capitalisme. Son ascension remonte au début des années 80. Elle fut la conséquence de la désillusion profonde créée par la volte-face politique du gouvernement Mauroy, en 1982-83. Sous le choc de l’arrivée au pouvoir du gouvernement socialiste-communiste de 1981, une fraction significative du patronat s’est tournée vers Le Pen et le Front National, jusqu’alors marginal et pratiquement inconnu, dans le but d’intimider le mouvement ouvrier. Et lorsque le gouvernement, face à la résistance capitaliste – fuite des capitaux, grève d’investissement, etc. – a abandonné sa politique de réforme sociale, le Front National s’est construit sur la base de la déception d’une masse importante de travailleurs qui avaient placé leurs espoirs dans le « changement », et qui voyaient leur situation s’aggraver. La Meurthe et Moselle, le Nord-Pas-de-Calais, la Lorraine et d’autres régions qui dépendaient de la sidérurgie et des charbonnages ont été très durement touchés par le démantèlement de ces industries par le gouvernement. Le Front National a pu exploiter cette trahison – parmi bien d’autres, comme le blocage des salaires – pour se créer une base de soutien dans les couches les plus pauvres et désespérées de la population. De nos jours, ce n’est pas pour rien que Marine Le Pen relève sans cesse les privatisations réalisées par les dirigeants du PS et le PCF entre 1997 et 2002. Le Front National exploite de telles dérives pour cataloguer les partis de gauche comme faisant partie de l’ordre établi.

Des incantations « républicaines » dans le style de Martine Aubry ne sont d’aucune efficacité contre Le Front National. La république actuelle n’a rien de progressiste. Elle est indissociable des intérêts capitalistes. C’est la république du chômage, de la pauvreté et du désespoir. C’est l’incarnation de l’inégalité et de l’exploitation. C’est un masque pour la dictature de la Bourse et des intérêts capitalistes. Notre but n’est pas de défendre la république capitaliste, mais de la remplacer par une république socialiste fondée sur l’émancipation sociale et politique des travailleurs, c’est-à-dire sur la suppression de la propriété capitaliste des banques, de l’industrie, de la grande distribution et tous les autres piliers de l’économie nationale. L’économie, comme l’Etat, doivent être directement sous le contrôle et la direction des travailleurs. Ce n’est que de cette façon que les ressources économiques et l’administration des affaires publiques deviendront des instruments pour la satisfaction des besoins de la masse de la population. C’est en ouvrant cette perspective que l’on pourra efficacement couper l’herbe sous le pied du Front National.

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