Dans ses meetings, Marine Le Pen se proclame l’amie et la protectrice des travailleurs. Elle fustige en Sarkozy le « roi des riches » qui a gouverné au service exclusif « des plus forts » contre « les plus faibles ». Elle attaque les banques, les grandes multinationales et le « talon de fer du capitalisme mondialisé ». Elle se permet même de rendre hommage, si on peut dire, aux Communards de 1871.

Madame Le Pen aime les travailleurs, mais elle déteste leurs organisations. Par exemple, elle affirme que le Front National est désormais pour le droit au départ à la retraite à 60 ans ; mais le 22 octobre 2010, à l’apogée de la grande lutte contre la remise en cause de la retraite à 60 ans, elle déclarait : «  Ensemble, gouvernement et syndicats jettent la France dans le chaos. Voilà deux semaines que la France s’installe dans le chaos, entre grèves, manifestations et blocus [...] La tolérance zéro doit s’appliquer à tous les émeutiers ». Lorsqu’il manifeste ou fait grève pour défendre ses conditions de vie, le travailleur devient un « émeutier » qu’il faut châtier sans ménagement. Bruno Gollnish, membre du Bureau politique du FN, était à l’époque encore plus précis : « Le sabotage de l’économie française caractérise l’action de la CGT […] Ces blocages frappent avant tout les salariés qui se rendent à leur travail […]. La CGT doit être rendue pénalement responsable et ses dirigeants doivent en répondre ».

Sans leurs organisations, sans leurs syndicats, les salariés ne seraient qu’une matière brute livrée à l’exploitation. Voilà comment Marine Le Pen aime les travailleurs : désarmés, atomisés, complètement soumis à l’arbitraire patronal. C’est ce qu’elle appelle des « patriotes » ; nous appelons cela des esclaves. Les attaques du FN contre les banques et les multinationales ne s’accompagnent d’aucune mesure concrète visant leurs intérêts. C’est de la démagogie électoraliste pure et simple. Le FN est un parti pro-capitaliste de la tête aux pieds. Il est l’ennemi juré des travailleurs. La réalité de son programme, ce n’est pas l’hommage hypocrite et insultant aux héros de 1871. C’est la casse de tous les droits sociaux, la baisse des salaires, une réduction drastique des dépenses publiques dans l’éducation, la santé et la culture, la destruction des services publics, la discrimination raciale et une remise en cause générale des droits démocratiques les plus élémentaires, à commencer par les droits de manifester, de faire grève et de se syndiquer. Marine Le Pen n’en parle pas dans ses meetings. Cela ne figure pas sur les tracts de son parti. Mais c’est son vrai programme et il est entièrement conforme aux intérêts de la classe capitaliste.

Comment combattre le FN ?

De façon parfaitement cynique, la candidate du FN cherche des voix du côté des salariés, des pauvres et des chômeurs qui se sont sentis abandonnés par les différents gouvernements de droite et de gauche, ces 30 dernières années. Force est de constater qu’elle y parvient, dans certaines limites. A gauche, il arrive qu’on se réconforte en jetant l’anathème sur les travailleurs qui votent pour le FN. Cela ne règle pas le problème de fond. La responsabilité de combattre l’influence du Front National revient à la gauche et au mouvement ouvrier. Or, depuis 1981, la gauche a été au pouvoir pendant 15 ans. Mais faute de mesures décisives pour briser le pouvoir de la classe dirigeante, ces gouvernements n’ont pas endigué le chômage de masse, la misère et le délabrement des quartiers populaires. Pour beaucoup de monde, la situation s’est même aggravée. Voilà le terreau sur lequel prospère le Front National.

La propagande du FN à l’encontre des immigrés vise à détourner le regard des travailleurs des véritables responsables de la crise – et surtout des vraies solutions. Face à cet empoisonnement des consciences, il est parfaitement inutile d’aborder le problème d’un point de vue moral. Lénine expliquait qu’en dernière analyse la question nationale est une question de pain. Il en va de même avec le racisme, qui est un cas particulier de la question nationale. Lorsque des millions de travailleurs souffrent du chômage et de la misère, il est inévitable qu’un certain nombre d’entre eux acceptent l’idée selon laquelle « il n’y a pas assez de pain pour tout le monde » : pas assez d’emplois, pas assez de logements, etc. D’où la fameuse « priorité nationale » du FN  : pour que l’un mange, l’autre ne doit pas manger. Pour combattre cette idée, il ne sert à rien de réciter la Déclaration universelle des droits de l’homme, car les travailleurs qui votent pour le FN savent bien que les droits les plus fondamentaux – à commencer par le droit au travail – sont chaque jour bafoués. Le seul moyen efficace de combattre le FN, c’est la mobilisation de tous les travailleurs – français et étrangers – autour d’un programme de rupture avec le système capitaliste, c’est-à-dire un programme qui donnera « du pain » à tout le monde.

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