Depuis plusieurs semaines, les salariés de l’Action sociale et de la Santé se mobilisent pour des augmentations de salaire et pour une amélioration de leurs conditions de travail. La première journée de mobilisation, le 7 décembre, fut historique pour ce secteur, et le mouvement continue. Entretien avec David, délégué CGT en Haute-Garonne.


Quels métiers recouvre le secteur de la Santé Action Sociale ?

Il y a des éducateurs spécialisés et des moniteurs-éducateurs, mais aussi plein de métiers administratifs (comptables, secrétaires, etc.). On a aussi des surveillants de nuit et ce qu’on appelle les « maîtresses de maison », qui sont des femmes de ménage avec des compétences en psychologie pour pouvoir accompagner le quotidien des gamins.

Le secteur couvre l’accompagnement des personnes en situation de handicap, quel que soit leur âge, mais aussi la protection de l’enfance (les foyers d’accueil), la prévention spécialisée (les éducateurs de rue) et même potentiellement les EHPAD.

Quelle est la situation des salariés ?

Pour les Maisons de l’enfance, les ITEP (Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique), les IME (Institut médico-éducatif), voire pour la prévention spécialisée, on travaille et on vit au quotidien avec la violence sociale que subissent nos usagers, enfants ou adultes. Ce sont des métiers très exigeants humainement, avec des horaires atypiques – mais qui, par le passé, étaient attractifs et qu’on pouvait faire par vocation. Aujourd’hui, comme dans la Santé, c’est devenu un secteur que les gens fuient, à cause des mauvaises conditions de travail, mais aussi parce qu’on nous enlève toute réflexion sur le sens de ce qu’on fait.

En termes de salaires, on a perdu près de 30 % de pouvoir d’achat en 30 ans. En fin de carrière (hors encadrement), on ne touchera guère plus de 2300-2400 euros. De leur côté, les maîtresses de maison ne dépassent pas les 2000 euros. De même, les surveillants de nuit ne sont pas assez payés. En plus, avec le recul de l’âge du départ à la retraite, on peut se retrouver licenciés pour « inaptitude » avant d’avoir 65 ans.

Quelles sont les revendications du secteur ?

Historiquement, ce n’est pas un secteur qui a l’habitude de se mobiliser sur les salaires, parce que ces métiers ont souvent une part de vocation. Mais dans la dernière période, les choses ont changé. Les nouvelles générations de salariés du secteur se sentent concernées par ces questions.

Au début de la pandémie, on a été considérés par le gouvernement comme des soignants. On a donc dû aller travailler pendant les confinements, même si on n’avait pas de masques. Par contre, quand le « Ségur de la Santé » a été mis en place, on n’était plus considérés comme des soignants, et donc on n’a pas bénéficié des 183 euros d’augmentation de salaire, ce qui a beaucoup marqué les esprits. Puis, quand il s’est agi d’imposer l’obligation vaccinale, on est redevenu des soignants…

Une extension du Ségur a ensuite introduit des augmentations de salaire différenciées pour certaines catégories de nos établissements, mais ces catégories n’ont pas encore été définies. Il n’y a pas moyen de savoir qui va bénéficier de ces augmentations !

Aujourd’hui, la mobilisation réclame (entre autres) de bénéficier des 183 euros minimums pour tous. Nous, à la CGT, on revendique une augmentation de 300 euros, et on dit bien pour tous – personnels administratifs, de ménage, de cuisine, etc. – parce qu’ils font partie d’un collectif de travail et que c’est très important dans notre métier.

Et les conventions collectives ?

Dans mon association (qui compte entre 2000 et 3000 salariés), il y a quatre conventions collectives différentes. C’est une véritable usine à gaz. La convention la plus importante du secteur, c’est celle de 1966. Elle n’a pas d’avantages salariaux, mais elle a des avantages importants en termes de congés. Comme c’est la plus avantageuse, les patrons veulent l’attaquer.

Nous, on revendique la fusion de toutes ces conventions collectives, en gardant à chaque fois les meilleurs critères pour nos salaires et nos conditions de travail.

Pour assurer un service public digne pour les usagers et les salariés, que faudrait-il faire ?

Ce secteur s’est construit il y a 40 ou 50 ans, sur la base des associations et des parents, à une époque où le handicap n’était pas pris en compte par l’ensemble de la société. C’est de là que vient ce caractère associatif et morcelé. Mais les coupes budgétaires aggravent les problèmes. Par exemple, dans certains départements, il n’y a plus de conseillers de l’Aide Sociale à l’Enfance. La protection de l’Enfance n’est donc même pas organisée de la même façon sur l’ensemble du territoire !

On manque aussi cruellement de moyens. La plupart des structures dépendent totalement des subventions publiques, qui viennent des collectivités territoriales et de la Sécurité Sociale.

En fait, il faudrait construire un grand service public de l’Action Sociale et de la Santé, mais cela supposera une mobilisation de plus grande ampleur.

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