Le 5 mars dernier, le PDG de Bosch France annonçait la suppression de 750 emplois sur l’usine de Rodez, qui est le plus gros employeur privé du département. Cette usine ne compterait plus que 500 salariés en 2025, contre 1250 actuellement.

Parallèlement, la Société Aveyronnaise de Métallurgie (SAM), autre sous-traitant automobile, est placée en redressement judiciaire depuis 2017. Elle n’a trouvé qu’un seul repreneur, qui fait monter les enchères et prépare une grosse casse sociale. Les syndicats craignent une division par deux des effectifs (364 salariés à ce jour).

Licenciements chez Bosch…

Le groupe Bosch emploie 400 000 salariés répartis dans 440 filiales et 60 pays. Son activité s’étend de l’électroménager au développement de technologies dites « intelligentes ». Le secteur automobile emploie 237 000 personnes et représente 60 % de son chiffre d’affaires, ce qui en fait le premier équipementier mondial. En 2019, cette seule activité a généré 46 milliards d’euros de chiffre d’affaires – dont 3,2 milliards d’euros en France, soit + 2,3 % par rapport à 2018.

Dès lors, comment justifier les licenciements annoncés ? La direction met en avant le ralentissement mondial du secteur, particulièrement en Chine et en Inde, ainsi que la crise du diesel, qui est dans la ligne de mire des politiques environnementales. Il est vrai que les ventes de véhicules diesel sont en chute : ils représentent 34 % des véhicules vendus en France en 2019, contre 75 % en 2012. Mais cela ne justifie pas le désastre social annoncé. Bosch a largement eu le temps de voir venir la crise, très bien analysée dans ses rapports annuels. Se targuant d’investissements massifs en Recherche et Développement, le groupe aurait pu faire le choix d’une diversification ou d’une reconversion des sites spécialisés dans le diesel, dont il savait qu’ils seraient rapidement en difficulté.

En 1998, le directeur financier de Bosch expliquait que l’hyperspécialisation des sites de production « fait gagner 5 % de productivité par an ». Cette stratégie facilite l’adaptation du groupe aux variations du marché. Un produit subit une forte baisse de part de marchés ? Il n’y a qu’à fermer les sites concernés – et en développer d’autres. Dès les années 1980, le groupe a implanté des sites de production en Inde, au Brésil et en Asie du Sud-Est, qu’il continue de développer.

… et à la SAM

La SAM est victime, elle aussi, de cette hyperspécialisation voulue par les donneurs d’ordre. Travaillant quasi exclusivement pour Renault, elle est dépendante de la feuille de route fixée par ce dernier : la fabrication de carters pour les moteurs hybrides et électriques. Elle a été placée en redressement judiciaire en 2017. Le repreneur d’alors, la société chinoise Jinjiang, devait investir 18,5 millions d’euros sur le site aveyronnais, mais personne n’en a jamais vu la couleur. Sécurisant ses chaines de fabrication, Renault a « double-sourcé » la production de ces pièces, dont une partie est désormais réalisée à l’étranger. La SAM devenant moins compétitive et plus onéreuse que ses concurrents, Renault la délaisse.

Renault, comme Bosch, font leur credo d’un rapport rendu en 2018 par la « Plateforme automobile », sorte de think-tank de la filière automobile réunissant ses grands patrons et à la tête duquel pantoufle Luc Chatel. Pour que la filière reste compétitive, ce rapport préconisait de conserver 20 à 25 % du chiffre d’affaires en France – et de délocaliser le reste dans des pays à bas coûts. Selon ce rapport, 40 % des emplois de la fonderie automobile devraient disparaître d’ici dix ans. On voit bien qui mène la danse.

Nationalisation !

A chaque nouveau plan social qui aggrave la désindustrialisation de la France, les gouvernements y vont de leur couplet sur le « soutien aux salariés ». Ils font mine de gronder les multinationales en fronçant les sourcils. Le vendredi 19 mars, la ministre Agnès Pannier-Runacher est venue faire son numéro devant les salariés rassemblés sur le parking de Bosch. Mais elle a été chahutée et huée, les travailleurs n’étant pas dupes.

Depuis des décennies, on nous explique sur tous les tons que le marché « s’autorégule ». En fait, les forts dévorent les faibles – et ce sont toujours les salariés qui trinquent, à l’arrivée. C’est dans la nature même des grands groupes capitalistes de rechercher le maximum de profits, en exploitant toutes les pistes possibles : délocalisation dans des pays à main d’œuvre bon marché et où le droit du travail et les régimes fiscaux leur sont favorables ; attaques en règle des droits acquis ; entraves à la syndicalisation, etc.

On ne peut pas aménager ou atténuer les effets du capitalisme en crise. Il est encore plus vain de demander aux capitalistes d’être un peu plus vertueux. Pour en finir avec l’anarchie capitaliste, les travailleurs devront prendre eux-mêmes le contrôle des moyens de production. L’économie doit être planifiée de manière démocratique et rationnelle. C’est l’unique moyen de sauver nos emplois, dans la filière automobile comme dans le reste de notre industrie.

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