A  l’issue de leur Congrès national, fin septembre, les pompiers déploraient l’absence de mesures concrètes du gouvernement pour réformer un système de secours « à bout de souffle ». Aussi les soldats du feu ont-ils appelé à une manifestation nationale le mardi 15 octobre.

La mobilisation

Les pompiers exigent plus de personnels et de moyens pour mener à bien leurs missions, ainsi qu’une revalorisation de leurs salaires et une réorganisation du service public de secours. Pour le syndicaliste André Goretti (FA/SPP-PATS), « le service de secours est malade (…). On a une problématique de sous-effectifs, de sur-sollicitations professionnelles et de violences envers les sapeurs-pompiers, mais rien n’est fait ». Le syndicaliste Sébastien Delavoux (CGT) précise que la sécurité n’est pas le thème central : « On a perdu en effectifs et on a gagné en nombre d’interventions. On manque de bras. »

Le ministère de l’Intérieur dit « partager » ce constat, mais… pas question de lancer un plan de recrutement massif ni d’augmenter les salaires !

A l’appel de sept syndicats représentant 85 % des pompiers, les casernes de 90 % des Services Départementaux d’Incendie et de Secours (SDIS) sont en grève depuis le 26 juin. Face à l’inaction du gouvernement, la grève a été prolongée jusqu’à fin octobre, malgré la répression. Dans le Val-d’Oise, la grève ne plaît pas à la hiérarchie : certains grévistes font l’objet de procédures disciplinaires pour « refus d’obéissance ».

Précarisation du service public

Les politiques d’austérité ont impacté le budget des SDIS. Cela s’est traduit par une diminution du nombre de casernes, alors que la population augmente. Près de 600 casernes ont fermé depuis 2016. En conséquence, les délais d’intervention des pompiers augmentent, ce qui met en péril la population.

Les sapeurs-pompiers volontaires (SPV) représentent environ 80 % des effectifs de pompiers et assurent 67 % des interventions. En service, ils exercent le même métier que les sapeurs-pompiers professionnels (SPP). Depuis des années, le nombre de SPP stagne autour de 40 000 agents. En revanche, il y avait 199 000 SPV en 2007, contre 195 000 aujourd’hui. Cette baisse s’explique par le décalage entre la grande exigence professionnelle attendue de la part des SPV et la faible contrepartie qu’ils reçoivent.

Comme dans toute la Fonction publique, il y a un processus de contractualisation du personnel : au lieu de recruter des SPP (qui « coûtent cher »), les SDIS recrutent des SPV payés entre cinq et huit euros de l’heure, sans cotisations sociales. Et comme beaucoup de SPV jettent l’éponge, leurs effectifs reculent.

Sous-effectifs

Les effectifs de pompiers diminuent pendant que le nombre d’interventions explose. Les soldats du feu ont assuré 3,5 millions d’interventions en 2003. En 2018, ils en ont assuré près de 4,7 millions. La hausse moyenne est de 7 % par an.

De nombreux SDIS sont dans le rouge, comme celui de Seine-et-Marne, dont le nombre d’interventions a bondi de 15 % en 2018. Le SDIS de la Meuse a connu une hausse des interventions de 68 % depuis 2012. Cette tension conduit à l’épuisement des équipes et à la démobilisation des SPV : « On se retrouve plusieurs fois par semaine à trois ou quatre de garde, au lieu de douze », confie un pompier meusien.

Cette situation découle de la crise du capitalisme et des politiques d’austérité. La pauvreté s’étend et les services publics affaiblis sont incapables de répondre aux besoins d’une population de plus en plus précaire et démunie. Les pompiers se retrouvent en première ligne face à la misère sociale.

L’austérité met en danger les soldats du feu et la population, comme le souligne le syndicaliste CGT Marc Bardin : « Un fourgon peut partir sur un feu avec deux personnes, contre huit normalement. Même s’ils sont rejoints plus tard par d’autres agents, les deux pompiers vont être seuls sur l’incendie pendant vingt à trente minutes. » Ces dix dernières années, 102 pompiers sont morts en service.

Urgentistes et pompiers : même combat !

Comme leurs camarades pompiers, les travailleurs des Urgences subissent le manque de moyens et d’effectifs. Les pompiers sont solidaires de la grève des urgentistes. Sur le terrain, des actions unitaires se multiplient à travers le pays. Le syndicaliste Marc Bardin explique : « toutes les problématiques que rencontre l’hôpital, on les rencontre avant. Lorsqu’une personne qu’on amène aux urgences est agressive avec nous, forcément, elle le sera à l’hôpital. (…) La solution est claire : il nous faut des effectifs, le respect du temps de travail et des agents. »

Les SPP appellent les SPV à soutenir leur grève. C’est la voie à suivre : les travailleurs ne peuvent obtenir gain de cause qu’unis dans la lutte. Ils doivent aussi faire pression sur les directions syndicales pour qu’elles préparent un vaste mouvement de grèves reconductibles dans plusieurs secteurs clés de l’économie.   

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