Le 16 mai 2025, des diplomates russes et ukrainiens se sont rencontrés directement à Istanbul pour discuter d’une possible fin des hostilités en Ukraine. C’était la première fois depuis les négociations de mars-avril 2022, qui avaient débouché sur un projet d’accord, mais avaient capoté sous la pression des impérialistes occidentaux.

Gesticulations diplomatiques

Ces négociations se sont accompagnées de nouvelles gesticulations impuissantes de la « coalition des volontaires ». Macron, Merz et Starmer en sont réduits à mettre en scène leurs appels téléphoniques à Donald Trump – sans que ce dernier, pour autant, ne leur fasse la moindre concession. Depuis le début de cette guerre, les impérialistes européens n’ont été que les seconds couteaux de l’impérialisme américain. Et maintenant que Washington veut mettre fin à sa désastreuse aventure ukrainienne, les dirigeants de l’UE sont livrés à eux-mêmes.

A Istanbul, les délégations ont réussi à s’entendre sur un nouvel échange de prisonniers de guerre : c’est tout. L’exigence des Européens et de Zelensky – un cessez-le-feu de 30 jours préalable à toute négociation – s’est heurtée à une fin de non-recevoir des Russes. Ceux-ci affirment (non sans raison) qu’une telle cessation des hostilités offrirait l’opportunité à l’Ukraine de réorganiser ses forces dans la perspective d’une reprise des combats.

La délégation russe a répété ses conditions de paix, déjà édictées par Poutine l’année dernière. Elles incluent notamment l’impossibilité pour l’Ukraine de rejoindre l’OTAN, ainsi que la reconnaissance de l’annexion de la Crimée et des oblasts de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijia, dont la majorité est d’ores et déjà occupée par l’armée russe.

Dans ce contexte, les dirigeants européens ont multiplié les déclarations incendiaires. Friedrich Merz, le chancelier allemand, a déclaré qu’étaient levées toutes les limites d’emploi des missiles à longue portée – tels les Taurus allemands ou les SCALP français – livrés à l’Ukraine. Après une nouvelle vague de bombardements russes, Trump s’est joint au chœur des Européens en affirmant que Poutine était « devenu complètement fou »… tout en critiquant aussi Zelensky : « tout ce qu’il dit cause des problèmes. Il ferait mieux d’arrêter. »

La réalité du terrain

Toutes ces gesticulations visent à dissimuler une réalité très simple : la Russie est en train de gagner la guerre, et les impérialistes occidentaux ne peuvent rien faire pour l’empêcher.

Début mars, l’armée russe a mené une offensive éclair qui a chassé les Ukrainiens de la région de Koursk, en Russie. Les forces russes avancent à Vovchansk, au nord de Kharkov, mais aussi devant Pokrovsk et Kostiantynivka, dans le Donbass. Fin mai, Vladimir Poutine a ordonné à son armée de créer une « zone tampon » sur la frontière ukrainienne, pour éviter une nouvelle incursion comme celle de Koursk, l’été dernier. Les troupes russes ont franchi la frontière dans l’oblast de Soumy, dans le Nord de l’Ukraine, et y ont occupé près de 110 km² en à peine une semaine.

Le rapport de forces, sur le front, est profondément défavorable aux Ukrainiens, qui manquent désespérément de combattants. Leur état-major en est réduit à jeter ses troupes d’un « point chaud » à l’autre, sans pouvoir contenir les percées russes qui s’accumulent.

La situation n’est pas meilleure à l’arrière. Pour pallier le manque de soldats, les unités de « recrutement » de l’armée ukrainienne capturent des hommes dans les rues pour les envoyer sur le front. Elles se heurtent de plus en plus à la résistance des proches des nouvelles « recrues », voire de simples passants. D’après le ministère ukrainien de la Défense, durant la seule semaine du 19 au 25 mai, il y aurait eu des agressions contre des unités de recrutement dans les oblasts de Chernihiv, Poltava, Cherkasy et Lviv – soit dans près du quart du territoire sous contrôle du gouvernement de Kiev.

Défaite inéluctable

Les impérialistes occidentaux ne peuvent rien faire pour renverser cette situation militaire désastreuse. Les missiles Taurus ou SCALP ne vont rien changer à l’équilibre des forces sur le front. Quant aux nouvelles sanctions économiques, elles n’auront pas plus d’impact. Les précédentes vagues de sanctions n’ont pas coulé l’économie russe, comme l’espéraient les occidentaux. Par contre, elles ont durement touché le capitalisme européen.

La seule façon dont l’OTAN pourrait empêcher la Russie de l’emporter en Ukraine serait d’intervenir directement dans le conflit. Mais un tel scénario est encore moins envisageable aujourd’hui qu’il ne l’était déjà sous Joe Biden : cela reviendrait à déclencher une Troisième Guerre mondiale, ce qui ne ferait les affaires ni des impérialistes européens, ni de Donald Trump – qui cherche au contraire à s’extirper de ce bourbier.

Les occidentaux n’ont aujourd’hui « aucune carte en main », pour reprendre la formule que Trump avait lancée à Zelensky, en février. Après les fiascos en Irak et en Afghanistan, l’échec de cette guerre par procuration contre l’impérialisme russe sera une nouvelle humiliation pour les impérialistes occidentaux. Et c’est le peuple ukrainien, sacrifié par les impérialistes dans le jeu sanglant de leur rivalité mondiale, qui en paie le prix fort.

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