STMicroelectronics est une multinationale franco-italienne employant 50 000 salariés, spécialisée dans les semi-conducteurs – ces composants électroniques indispensables aux smartphones, à l’électroménager, mais aussi à l’industrie militaire, notamment dans la fabrication de puces pour les drones et les missiles. À travers ses activités, cette entreprise incarne parfaitement la logique brutale du capitalisme : elle pollue massivement, alimente l’armée israélienne en composants électroniques, empoche des milliards d’argent public… pour ensuite licencier et délocaliser. Chez STMicroelectronics, tout est sacrifié sur l’autel du profit – les vies humaines comme l’environnement.
Désastre écologique
En 2023, STMicroelectronics a consommé 13 882 m³ d’eau potable par jour, soit environ 160 litres par seconde. Sa voisine Soitec (produisant des matériaux nécessaires pour les semi-conducteurs) consommait 2635 m³ d’eau, soit 30 litres par seconde. Ces deux entreprises absorbent à elles seules 20 % de l’eau potable distribuée sur l’ensemble de la Métropole grenobloise et de la communauté de communes du Grésivaudan, qui rassemble plus d’un demi-million d’habitants.
Cette eau est captée dans la nappe phréatique de la Romanche à Vizille. 85 % de l’eau utilisée par STMicroelectronics est ensuite rejetée dans les cours d’eau, mais chargée de polluants : métaux lourds, ammoniac, chlore, substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), phosphore et azote.
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Même si l’eau est « traitée » par la station d’épuration de l’entreprise, elle est loin d’être inoffensive. Les conséquences sont désastreuses : l’excès de phosphore et d’azote provoque l’eutrophisation des milieux aquatiques, qui étouffent sous la prolifération d’algues. Depuis 2017, la basse Isère est classée zone sensible à ce phénomène. Le cuivre, toxique même à très faibles doses, s’accumule et menace durablement les organismes vivants.
Mais le plus préoccupant reste la présence de PFAS, surnommés « polluants éternels » pour leur résistance aux processus naturels de dégradation. STMicroelectronics figure parmi les plus gros émetteurs de ces polluants du département et ces substances sont connues pour leurs effets graves : cancers, troubles hormonaux, infertilité, immunité affaiblie. Et la population locale y est exposée quotidiennement.
Arrosé d’argent public
En quelques mois, STMicroelectronics s’est imposé comme l’un des champions toutes catégories des politiques de subventions publiques européennes. En 2023, elle a reçu 487 millions d’euros de subventions de la part de l’Etat français. En 2024, ce chiffre explose : 2,9 milliards d’aides publiques pour agrandir son site en Isère, puis 2 milliards supplémentaires pour un nouveau site en Sicile – financé cette fois par l’Etat italien avec l’aval de la Commission européenne.
Ces aides s’inscrivent dans le cadre du « Chips Act » européen, censé assurer l’indépendance de l’UE en matière de semi-conducteurs. Mais la guerre commerciale actuelle a fait chuter le bénéfice net de l’entreprise de 89 % au premier trimestre 2025 ; elle a pu dégager « seulement » 56 millions de dollars de bénéfices. Sa cote boursière a chuté de 20 % depuis le début de l’année. Face à la saturation du marché, à la concurrence internationale (notamment de Taïwan et des Etats-Unis), et aux mesures protectionnistes, l’Etat a beau dépenser des milliards d’argent public, l’entreprise n’en devient pas pour autant concurrentielle sur le marché mondial. Cet argent engraisse surtout les actionnaires : ils ont touché 218 millions d’euros en 2023. Et pour les gaver encore plus, STMicro s’apprête à licencier massivement.
Licenciements et délocalisation
Début 2025, la direction de STMicro a annoncé un plan d’économie de 300 millions d’euros. Le CSE du 14 avril a annoncé la suppression de 2800 postes et la potentielle délocalisation à Singapour du site de Tours qui regroupe au total 1400 salariés. Ce site produit des puces « 6 pouces » nécessaires à la fabrication de téléphones portables et de voitures électriques. Le seul espoir qu’avaient les travailleurs du site de Tours était l’arrivée de nouvelles lignes de production, notamment celles des puces en nitrure de gallium (GaN). C’est un projet de longue date qui n’est plus à l’ordre du jour : l’entreprise a décidé que ces nouvelles lignes de production seraient établies… en Italie, où le prix de la force de travail est moins élevé qu’en France.
Selon un représentant syndical de STMicroelectronics, interrogé par Francebleu, l’entreprise va se délester de 5000 à 10 000 emplois, soit jusqu’à 20 % de ses effectifs actuels, dans les trois années à venir. Le 30 avril, la direction confirmait 1000 suppressions de postes en France.
Nationalisation
Comme l’expliquait Marx, « la production capitaliste ne développe la technique et la combinaison du processus de production social qu’en ruinant dans le même temps les sources vives de toute richesse : la terre et le travailleur. » Microelectronics n’est pas une exception, mais bien l’expression, à son échelle, du fonctionnement normal du capitalisme.
L’exemple de cette multinationale révèle l’urgence de la nationaliser sous le contrôle démocratique des travailleurs – au même titre que tous les grands leviers de l’économie – sans aucune compensation pour les actionnaires. Une gestion rationnelle et démocratique de l’entreprise permettrait de réorienter sa production à des fins socialement utiles, en respectant l’environnement et sans la moindre suppression de poste.