En 1948, le peuple palestinien fut brutalement chassé de sa patrie par des milices sionistes armées. Cet événement, que la mémoire collective palestinienne a retenu sous le nom de Nakba (la catastrophe), était inhérent au projet sioniste. C’est pourquoi les véritables communistes révolutionnaires se sont toujours opposés à cette idéologie, et défendaient l’idée d’un État partagé entre les peuples juif et palestinien. Pourquoi, dès lors, Staline décida-t-il en 1947 de soutenir la partition de la Palestine et la formation d’un Etat juif séparé ?
Lénine s’opposait au sionisme comme à une idéologie réactionnaire. Il comprenait que le projet sioniste ne pourrait se réaliser qu’aux dépens du peuple palestinien. Dans ses Thèses sur les questions nationales et coloniales, adoptées en 1920 par le Deuxième Congrès de l’Internationale Communiste, il en parlait en ces termes :
« Comme exemple frappant des duperies pratiquées à l'égard de la classe des travailleurs dans les pays assujettis par les efforts combinés de l'impérialisme des Alliés et de la bourgeoisie de telle ou telle nation, nous pouvons citer l'affaire des sionistes en Palestine, où, sous prétexte de créer un Etat juif, en ce pays où les juifs sont en nombre insignifiant, le sionisme a livré la population indignée des travailleurs arabes à l'exploitation de l'Angleterre. »
Pourquoi Staline a-t-il donc agi aux antipodes de la position de Lénine en permettant l’adoption d’une résolution pour la partition de la Palestine à l’ONU en 1947 ? Ce texte de sinistre mémoire avait en effet besoin des deux tiers des voix de l’assemblée des Nations-Unies, et Staline joua un rôle clé pour lui donner cette majorité.
De nos jours, les partisans de Staline préféreraient que ces faits tombent dans l’oubli. Ils tiennent à préserver la légende qui les dépeint comme des adversaires éternels du sionisme. D’autres ont tenté de trouver des justifications, pour expliquer cette trahison par Staline des principes fondamentaux établis lors des quatre premiers congrès de l’Internationale Communiste.
Malheureusement pour eux, les faits historiques ne s’effacent pas aisément, et la vérité est toujours concrète. Aucune contorsion argumentative ne peut justifier ce que fit Staline. Nous verrons comment et pourquoi il en vint à abandonner la position de Lénine, et comment cette décision cruciale ricocha sur les partis communistes, en particulier au Moyen-Orient.
Quelques années auparavant, l’Union soviétique s’opposait encore officiellement à la création d’un Etat juif en Palestine. Le gouvernement soviétique continuait de défendre l’idée d’un Etat pour deux peuples. Les partis communistes, au Moyen-Orient et ailleurs, faisaient publiquement campagne contre le projet sioniste.
Mais cela n’empêcha pas de hauts diplomates soviétiques de s’entretenir avec des dirigeants sionistes pendant et juste après la Seconde Guerre mondiale. Ils les assurèrent de leur soutien – ou du moins de leur sympathie – pour la création d’un Etat juif en Palestine. En coulisse, le gouvernement soviétique était manifestement en train de changer de politique.
Les archives témoignent d’un mouvement en ce sens dès 1940 - peu après le pacte Hitler-Staline de 1939, qui divisa la Pologne entre l’Allemagne et l’Union soviétique. La Pologne comptait alors une importante population juive, et un grand nombre de Juifs polonais se trouvaient donc désormais sous l’autorité du gouvernement soviétique. Les dirigeants sionistes y virent une occasion pour accroître l’immigration des Juifs en Palestine.
Dans l’article « Une alliance improbable. L’URSS et la création d’Israël », écrit sur la base de documents d’archives soviétiques, l’historien Laurent Rucker a fourni d’intéressantes précisions sur les échanges entre les diplomates soviétiques et des dirigeants sionistes de premier plan.
Il cite notamment une rencontre particulièrement révélatrice, dont les détails sont tirés de documents officiels sur les relations israélo-soviétiques, les Sovetsko-Izrail'skie otnoshenia. Sbornik Dokumentov. [1] Il s’agit d’une entrevue organisée en janvier 1941, entre Chaïm Weizmann, le président de l’Organisation Sioniste Mondiale, et Ivan Maïski, l’ambassadeur soviétique au Royaume-Uni. Comme le rapporte Rucker :
« Weizmann aborde l’avenir de la Palestine. Le diplomate soviétique déclare sans s’en émouvoir qu’une partie des Arabes palestiniens devra inévitablement être transférée pour que les Juifs puissent s’installer en Terre promise. Weizmann estime qu’un [demi] million d’Arabes doivent partir pour que deux millions de Juifs s’installent à leur place. » [C’est moi qui souligne]
Plus loin, Rucker explique :
« Si les contacts entre le mouvement sioniste et l’URSS ont pu être établis malgré l’alliance germano-soviétique, la rupture de celle-ci, après le 22 juin 1941, leur donne un nouvel élan. Les dirigeants sionistes poursuivent dès lors un double objectif : obtenir l’accord de Moscou pour l’émigration en Palestine des Juifs polonais réfugiés sur le territoire soviétique […] et, surtout, convaincre les dirigeants bolcheviques antisionistes que la création d’un Etat juif en Palestine n’est nullement contradictoire avec leurs intérêts. » [2]
S’ensuivit une rencontre à Londres en octobre 1941 entre Maïski et David Ben-Gourion – le premier dirigeant d’Israël et fondateur de son armée -, qui était alors président de l’Agence Juive. En 1943, Maïski s’entretint de nouveau avec Weizmann, à qui il assura que le gouvernement soviétique comprenait et « pourrait soutenir le point de vue sioniste ». Maïski visita même la Palestine, où il retrouva Ben-Gourion, et sembla très impressionné par les réalisations des sionistes.
Moscou envisageait donc déjà de soutenir l’établissement d’un Etat juif en Palestine – ce qui impliquait nécessairement de chasser un demi-million de Palestiniens de leurs terres. Mais ce n’était pas sa position publique. Officiellement, l’Union soviétique restait opposée à la perspective d’un Etat purement juif, et soutenait la formation d’un seul Etat binational.
En 1943, Staline dissout l’Internationale Communiste. Il n’en avait plus besoin, puisqu’il avait depuis longtemps abandonné la perspective d’une révolution mondiale. C’était aussi un geste d’apaisement vis-à-vis de ses alliés occidentaux dans la Seconde Guerre mondiale, Churchill et Roosevelt.
Le régime de Staline se comporta de la même manière à propos de la Palestine : il conduisit la politique étrangère soviétique dans le dos des partis communistes nationaux. La base et les directions de ces partis ne savaient rien des entrevues entre les diplomates soviétiques et les figures dirigeantes du mouvement sioniste.
Le discours de Gromyko à l’ONU en 1947
La Palestine était alors sous mandat britannique. Mais la Grande-Bretagne était une puissance en déclin, qui s’apprêtait à perdre son empire. Elle n’avait plus les moyens d’assurer sa présence en Palestine, où les sionistes la traitaient en ennemi - puisque la création d’un Etat juif entrait alors en conflit avec les intérêts de l’impérialisme britannique.
La Grande-Bretagne avait laissé courir diverses rumeurs, promettant la Palestine à la fois aux Arabes et aux Juifs. C’était un élément de sa stratégie « diviser pour mieux régner ». En réalité, l’impérialisme britannique était hostile à la création d’un Etat juif séparé. Non par amour pour les Palestiniens, mais pour soigner ses relations avec les régimes arabes, riches en pétrole, de la région. Cependant, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le destin de la Palestine n’était plus entre les mains de Londres mais de Washington – aidée par Moscou.
C’est pourquoi le gouvernement britannique décida de renoncer à son mandat sur la Palestine en février 1947, laissant l’ONU, récemment créée, décider du futur statut de ce territoire.
C’est dans ce contexte qu’Andreï Gromyko, délégué soviétique auprès des Nations-Unies, prononça un discours crucial devant l’assemblée générale de l’ONU le 14 mai 1947. Son contenu fut un choc pour les millions de militants des partis communistes officiels à travers le monde, et en particulier pour ceux des pays du monde arabe.
Dans ce discours, traitant de la formation d’un comité spécial de l’ONU pour la Palestine, Gromyko s’attarda sur les souffrances qui touchaient les nombreux réfugiés juifs à travers l’Europe à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il était clairement en train de préparer le terrain pour les événements qui allaient suivre dans l’année.
Dans son discours, Gromyko déclara :
« Le fait qu'aucun Etat d'Europe occidentale n'ait été en mesure d'assurer la défense des droits élémentaires du peuple juif et de le protéger contre la violence des bourreaux fascistes explique les aspirations des juifs à établir leur propre Etat. Il serait injuste de ne pas en tenir compte et de nier le droit du peuple juif de réaliser cette aspiration. Il serait injustifiable de refuser ce droit au peuple juif, surtout au vu de tout ce qu'il a subi pendant la Seconde Guerre mondiale. » [C’est moi qui souligne]
Il avança ensuite quatre solutions potentielles pour résoudre cette question :
« 1. La création d'un État arabo-juif unique, avec des droits égaux pour les Arabes et les Juifs ;
2. La partition de la Palestine en deux États indépendants, l'un arabe et l'autre juif ;
3. La création d'un État arabe en Palestine, sans tenir dûment compte des droits de la population juive ;
4. L'établissement d'un État juif en Palestine, sans tenir compte des droits de la population arabe. » [C’est moi qui souligne]
En conclusion, il reconnut qu’un « Etat arabo-juif indépendant, double, démocratique et homogène » serait la seule manière de garantir à la fois les droits des populations juive et palestinienne. Cependant, ajouta-t-il ensuite, si cette solution s’avérait impossible à mettre en œuvre, il faudrait envisager « la partition de la Palestine en deux États autonomes indépendants, un juif et un arabe ». [3]
Comme le montra la suite des événements, ce discours servait en réalité à préparer le terrain. L’Union soviétique s’apprêtait à soutenir le projet sioniste d’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens pour fonder Israël sur leurs terres – c’est-à-dire la mise en œuvre de ce dont Maïski avait discuté avec des dirigeants sionistes quelques années auparavant. Les actes suivirent les paroles. Entre 1947 et 1949, l’Union soviétique fournit toute son aide aux sionistes – aussi bien sur le plan politique que militaire – et facilita même l’émigration de Juifs d’Europe de l’Est en Israël.
Un membre de la délégation soviétique aux Nations-Unies, Semion Tsarapkine, prononça un discours à l’ONU le 13 octobre 1947. Il alla plus loin que Gromyko, en affichant ouvertement le soutien de l’Union soviétique à la partition de la Palestine. Selon Rucker, « désormais, l’URSS [était] un fervent partisan de la cause sioniste. » [4]
Le vote de l’URSS pour la création d’Israël
Le mois suivant, le 29 novembre 1947, l’URSS vota pour la partition de la Palestine. La “Résolution 181” fut ainsi adoptée par l'Assemblée Générale de l’ONU par 33 voix pour, 13 voix contre et 10 abstentions. Staline remplissait toutes les espérances des sionistes !
Rappelons que, pour qu’une résolution de l’ONU soit juridiquement contraignante, elle doit recueillir une majorité des deux tiers de l’assemblée. En plus de l’URSS, Staline contrôlait alors la Biélorussie, l’Ukraine, la Pologne et la Tchécoslovaquie, qui étaient toutes membres de plein droit de l’ONU. Et toutes votèrent pour la partition. Si ces cinq pays s’y étaient opposés, le résultat aurait été de 28 voix pour, 18 contre et 10 abstentions. La résolution ne serait donc pas passée. Les faits sont têtus.
On sait ce qui advint ensuite. Les pays arabes refusèrent de reconnaître la résolution de l’ONU et les forces armées sionistes profitèrent de la confusion pour lancer une campagne de terreur contre les Palestiniens. Ils les poussèrent à l’exil, fondèrent Israël, et le jeune Etat juif entra en guerre. Au cours de ce processus, 700 000 Palestiniens subirent ce qu’on appelle pudiquement un « nettoyage ethnique » – c’est-à-dire qu’ils furent chassés de leurs terres par la force et par le sang. Le génocide qu’Israël mène actuellement à Gaza découle de ces événements tragiques.
L'Union soviétique ne se contenta pas d’assister les sionistes en votant pour la résolution de l’ONU : elle leur fournit aussi des armes à travers l’un de ses satellites. En 1948, Staline autorisa la Tchécoslovaquie à envoyer des armes lourdes à la nouvelle armée israélienne. En fin d’année 1947 et en 1948, les sionistes et l’Agence Juive en Palestine achetèrent pour 22 millions de dollars d’armes à la Tchécoslovaquie. Cela correspond à environ 250 millions de dollars actuels. L’URSS interdit parallèlement au gouvernement tchécoslovaque de livrer les armes qu’il avait prévu de vendre aux Arabes.
Des années plus tard, en 1968, Ben-Gourion reconnut l’importance de l’aide fournie par l’URSS et la Tchécoslovaquie : « Elles sauvèrent le pays, je n’en ai aucun doute. Les armes tchèques constituèrent l’aide la plus importante que nous avons obtenue. Elles nous ont sauvés et je doute fort que, sans elles, nous aurions pu survivre le premier mois. »
L'Union soviétique aida aussi Israël en facilitant l’émigration d’un grand nombre de Juifs d’Europe de l’Est (Pologne, Hongrie, Roumanie, Bulgarie et Tchécoslovaquie) avant 1948. Les liens forgés avec les sionistes étaient si forts que l’URSS fut le premier pays à reconnaître légalement l’Etat d’Israël, après sa proclamation par Ben-Gourion en mai 1948. Molotov (le ministre soviétique des Affaires étrangères et le plus proche collaborateur de Staline) envoya le télégramme suivant à Shertok, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement provisoire d’Israël, le 17 mai 1948 :
« Nous vous informons que le Gouvernement de l’URSS a décidé d’accorder sa reconnaissance officielle à l’Etat d’Israël et à son Gouvernement provisoire. Le Gouvernement soviétique estime que la création par le peuple juif de son Etat souverain servira la cause du renforcement de la paix et de la sécurité en Palestine et au Moyen-Orient et exprime sa confiance dans le développement fructueux de relations amicales entre l’URSS et l’Etat d’Israël. » [C’est moi qui souligne]
La création d’Israël était bien loin de garantir « la paix et la sécurité ». Mais Staline poussa le cynisme encore plus loin lors de l’examen de la Résolution 194-III par l’ONU en décembre 1948. Cette résolution accordait aux réfugiés palestiniens le droit de revenir dans leurs maisons ou de recevoir une compensation pour la perte ou l’atteinte à leur propriété. L’Union soviétique et ses satellites d’Europe de l’Est votèrent tous contre, tandis que les impérialistes britanniques et américains votèrent pour !
Bien sûr, les puissances qui votèrent pour cette résolution ne firent jamais rien de concret pour la mettre en œuvre. L’adhésion d’Israël à l’ONU, en 1949, fut conditionnée à l’application de la Résolution 194. Un de ses délégués accepta pour la forme, après quoi les dirigeants israéliens continuèrent d’ignorer cette résolution, en expliquant que ceux qui avaient fui et abandonné leurs propriétés n’avaient aucun droit à être compensés. Israël viola même directement la résolution de l’ONU en 1950, en votant une loi abjecte sur la « propriété des absents » pour exproprier les maisons de tous les Palestiniens déplacés. L’Union soviétique était tellement attachée à ses positions prosionistes qu’elle refusa même d’étudier les motions de soutien aux droits des réfugiés palestiniens, qui avaient été brutalement expulsés de leurs terres.
Pourquoi Staline soutint la partition
Voilà donc les faits. Mais pour comprendre ce qui conduisit Staline à mener une telle politique, il faut identifier ce qui motivait ses actions. Staline n’agissait pas pour défendre les intérêts de la classe ouvrière mondiale, ni pour favoriser le renversement révolutionnaire du système capitaliste. Il n’était pas là pour promouvoir la révolution socialiste internationale, mais pour servir des intérêts bien plus mesquins.
Sa pensée était déterminée par les intérêts nationaux de la bureaucratie qui avait usurpé le pouvoir de la classe ouvrière en Union soviétique, et qui constituait la colonne vertébrale de son régime. Le processus de dégénérescence de la révolution russe, qui découlait de son isolement dans un pays seul et sous-développé, a été brillamment exposé par Trotsky dans son chef-d’œuvre La Révolution trahie.
Voilà pourquoi l’Union soviétique stalinienne finit par s’aligner sur les impérialistes américains et les sionistes en 1947. Quant aux Etats-Unis, ils avaient intérêt à permettre l’émergence d’un Etat juif en Israël pour chasser les Britanniques du Moyen-Orient – ce qui leur permettait de devenir la puissance dominante dans cette importante région pétrolifère. Staline aussi voyait les Juifs de Palestine comme un levier pour affaiblir l’impérialisme britannique. Il espérait en faire un point d’appui pour l’URSS en Méditerranée.
Les partisans de Staline le décrivent comme un stratège rusé. Dans le mouvement communiste, ceux qui tentent de justifier la politique qu’il mena alors en Palestine expliquent que tout cela faisait partie d’un plan très habile. En réalité, Staline n’avait juste aucune perspective pour la transformation socialiste du Moyen-Orient, et donc il ne lui restait plus qu’à espérer que s’établisse un Etat juif prosoviétique en Israël – c’est-à-dire un capitalisme israélien entretenant de bonnes relations avec l’URSS.
Rien de très rusé là-dedans. Comme l’explique l’historien John Lewis Gaddis, dans un article publié par la revue Diplomatic History en 1989 :
« On oublie souvent que Staline souhaitait, à sa façon, rester « ami » avec les Américains et les Britanniques. Son but était d’assurer la sécurité de son régime et de l’Etat qu’il gouvernait, pas de mettre en œuvre la révolution prolétarienne internationale tant attendue. Il voulait y parvenir sans guerre, et de préférence avec l’appui de Occidentaux. » [C’est moi qui souligne] [5]
Gaddis est reconnu comme un expert en histoire de la Guerre froide et écrit du point de vue des intérêts de l’impérialisme américain. Ce qu’il dit de Staline confirme notre analyse des motivations du personnage. Depuis qu’il avait adopté la théorie du « socialisme dans un seul pays », peu après la mort de Lénine en 1924, sa pensée exprimait les intérêts d’une bureaucratie conservatrice, et non ceux de la classe ouvrière mondiale. La bureaucratie était pleine d’éléments non-communistes, de gens qui avaient rejoint le parti pour faire carrière. Ils avaient acquis des privilèges matériels et aspiraient à une vie paisible où ils pourraient en jouir tranquillement. Ils étaient bien loin d’espérer une révolution mondiale.
La théorie du « socialisme dans un seul pays » correspondait aussi aux tendances nationalistes « grand-russes » des bureaucrates. Pour eux, l’Union soviétique et son économie planifiée n’étaient pas un avant-poste de la révolution prolétarienne mondiale, mais un moyen de préserver les intérêts matériels de leur caste. Ils identifiaient les « intérêts nationaux » de la Russie, dans un sens étroitement nationaliste, avec leurs propres intérêts. La lutte de Lénine et des bolcheviks pour une nouvelle société socialiste mondiale leur était étrangère. Et c’étaient les intérêts de cette caste qui guidaient la politique soviétique au Moyen-Orient.
Staline crut d’abord qu’il parviendrait à un accord avec les autres grandes puissances, que chacun disposerait de sa sphère d’influence et respecterait les intérêts des autres. Dans ce contexte, il pensait qu’Israël pourrait s’allier avec l’Union soviétique. Quelle clairvoyance ! Il est vite devenu évident qu’Israël allait devenir un allié crucial de l’impérialisme américain dans la région.
A l’instar de Ben-Gourion, les fondateurs d’Israël se déguisèrent d’abord en « socialistes ». Dans les premiers temps, l’Etat israélien et la fédération syndicale Histadrout – qui était liée à l’appareil d’Etat – jouèrent un grand rôle dans le développement de l’économie, ce qui permit de renforcer une classe capitaliste israélienne initialement très faible. Ils s’en servirent pour diffuser la légende selon laquelle Israël était une sorte d’« expérience socialiste ». Les Juifs d’Europe de l’Est avaient de fortes traditions socialistes, et nombre d’immigrants juifs en Israël venaient de ce milieu. Ils établirent des kibboutz – des colonies organisées autour de fermes collectives – qui furent présentés comme des exemples de fonctionnement socialiste. A leur apogée, les kibboutz assuraient une part importante de la production agricole et même de la production industrielle, dans des centaines d’usines coopératives.
Mais présenter Israël comme une sorte d’expérimentation « socialiste », c’est oublier que les kibboutz étaient souvent des avant-postes militaires d’Israël, et qu’ils jouèrent un rôle crucial dans la colonisation des terres qui appartenaient aux Palestiniens. Certains les décrivirent ainsi comme « un socialisme pour les Juifs, sans les Arabes ».
Or, on ne peut pas construire le socialisme sur ces bases. Si le socialisme n’est pas établi par un mouvement unitaire de l’ensemble de la classe ouvrière – ici, des Juifs et des Palestiniens – il ne fait que masquer, et donc favoriser, l’oppression d’une section de la société par une autre. En dernière analyse, cela ne profite qu’à la classe capitaliste. C’était bien un régime capitaliste qui se constituait en Israël. Et du fait de son isolement et de sa nature oppressive, il est rapidement devenu un avant-poste de l’impérialisme au Moyen-Orient. C’est pour cela, d’ailleurs, que la plus grande puissance impérialiste de la planète n’a jamais eu de problème avec le « socialisme » d’Israël.
Des effets dévastateurs dans les partis communistes du Moyen-Orient
Comme on pouvait s’y attendre, le soutien de Staline à la partition de la Palestine et à la création d’Israël eut un effet dévastateur sur les partis communistes de la région. Comme l’explique l’universitaire indien Mohammed Shafi Agwani :
« La décision brutale de l’Union soviétique de soutenir la partition stupéfia les communistes palestiniens. […] L’évolution drastique de la position des soviétiques – de la dénonciation du sionisme comme « conspiration impérialiste » à l’acceptation de sa principale revendication – secoua sévèrement les communistes, non seulement en Palestine, mais dans tout le monde arabe. »
« Quelle que fut la raison de ce soubresaut soviétique, il fut difficile même pour les communistes les plus ingénieux de le justifier idéologiquement. Mais une fois la décision prise et clairement affichée par l’Union soviétique, les communistes furent forcés de s’y plier. » [6]
La dégénérescence bureaucratique de l’Union soviétique - entamée dans la deuxième moitié des années 1920 et renforcée par les purges staliniennes des années 1930 – avait aussi touché l’Internationale communiste. Fondée comme un véritable parti de la révolution mondiale, elle était devenue un simple instrument du gouvernement soviétique. Sa ligne était dictée par les besoins momentanés de la bureaucratie d’URSS et consistait en une série d’inexplicables zigzags.
Pour en arriver là, il avait fallu écraser la démocratie interne qui caractérisait l’Internationale communiste lors de ses quatre premiers congrès. Aucune opposition n’était plus tolérée. Une ligne était présentée, et il n’y avait qu’à obéir en l’appliquant. Ainsi, lorsque l’Union soviétique vota pour la partition de la Palestine, les partis communistes de la région durent défendre la nouvelle position de l’URSS. Mais, comme l’explique Agwami :
« Les communistes arabes eurent énormément de mal à expliquer à leurs partisans ce qui avait motivé la posture des Soviétiques. […] Les communistes furent gravement affaiblis par ce dernier acte de la tragédie palestinienne, aussi bien moralement que politiquement. La confusion était grande parmi leurs militants. »
En découlèrent des situations tragiques. Lors de la guerre qui suivit la création d’Israël, les communistes juifs et palestiniens se trouvèrent dans des camps opposés, les premiers justifiant la guerre « défensive » d’Israël. En Irak, les communistes locaux, fidèles à Staline, organisèrent des manifestations de soutien à la résolution de partition de l’ONU, et appelèrent à coopérer avec les « forces démocratiques » israéliennes ! Quant aux communistes arabes qui eurent le courage de s’opposer à la ligne de Staline, ils rejoignirent la guerre contre Israël. On trouva ainsi des communistes de part et d’autre de la barricade, dans un véritable conflit armé.
Début 1944, peu après la dissolution officielle de l’Internationale communiste en 1943, le Parti communiste palestinien scissionna sur des lignes ethniques. Les Palestiniens fondèrent une « Ligue de libération nationale » (LLN).
La LLN s’opposait à la partition de la Palestine mais voulait accorder la citoyenneté palestinienne aux Juifs qui y avaient immigré. Emile Touma de la LLN écrivit à Moscou peu après le discours de mai 1947 de Gromyko, pour critiquer l’idée d’un potentiel soutien à la partition :
« Ce discours a attisé la suspicion et la méfiance dans le monde arabe, parmi les grandes masses arabes. Les réactionnaires arabes sont parvenus à semer le doute sur l’attitude de l’Union soviétique quant au problème palestinien, qui est considéré comme une partie intégrante de la question arabe au Moyen-Orient. […] »
« Le discours de Gromyko a semé la confusion parmi les communistes. Il a été très mal reçu par les masses arabes, et une clarification redonnerait de l’espoir non seulement aux communistes, mais à tous les Arabes du Moyen-Orient. On ne peut ignorer le potentiel révolutionnaire dans les pays arabes, dans la situation internationale actuelle. »
Touma critiqua également Gromyko pour avoir « complètement ignoré le peuple arabe en Palestine, ses aspirations, son mouvement national anti-impérialiste et ses liens traditionnels avec les peuples arabes au Moyen-Orient. »
Mais le principal reproche qu’il adressa à Gromyko fut d’avoir ouvertement exprimé son soutien à la cause sioniste :
« Nous avons toujours lutté contre la conception sioniste et considéré le sionisme comme une entreprise dirigée par l’impérialisme britannique dans le but de créer un cheval de Troie au Moyen-Orient. Par conséquent, nous avons toujours discrédité les revendications historiques du sionisme comme réactionnaires, et rejeté ses théories irréalistes sur les racines historiques des Juifs. […] »
« Par son discours, le camarade Gromyko a renforcé l’idéologie sioniste et l’emprise du sionisme sur les masses juives. Un tel renforcement encourage les impérialistes à utiliser les masses juives comme un instrument pour affaiblir les mouvements de libération nationale dans le Moyen-Orient arabe. » [7]
Une fois la partition entérinée, le LLN revendiqua la formation d’un Etat palestinien, comme le promettait la résolution de partition adoptée par l’assemblée de l’ONU en novembre 1947.
Mais cela n’advint jamais. A la fin de la guerre, en 1949, la Cisjordanie fut annexée par la Jordanie, et Gaza fut placée sous tutelle égyptienne. Ces territoires furent ensuite occupés par Israël en 1967, et le sont restés jusqu’à ce jour. Ainsi, des « deux Etats indépendants » de Gromyko, il ne resta en fait qu’un puissant Etat juif, et le déni de tout Etat pour les Palestiniens. C’était donc sa quatrième option, un Etat juif sans égard pour les droits des Palestiniens, qui l’avait emporté. Ce fut une trahison du peuple palestinien, dans tous les sens du terme.
Affirmons-le clairement : le soutien de Staline à la création d’Israël créa une situation désastreuse pour les communistes en Palestine et pour les partis communistes dans l’ensemble du monde arabe. Il affaiblit considérablement les idées du communisme dans la région.
Ce ne fut pas un simple revers idéologique. Des attaques physiques furent organisées contre des locaux communistes et des missions diplomatiques soviétiques à Alep et à Damas. Les autorités profitèrent de l’hostilité générale pour interdire les organisations communistes au Liban et en Syrie.
Tout cela mina les partis communistes, aussi bien sur le plan de l’autorité morale et politique que de leur force organisationnelle sur le terrain. Entre août 1947 et juin 1949, le parti communiste libanais passa de 12 000 à 3 500 adhérents. En Syrie, le parti passa de 8 400 à 4 500 membres. Leurs forces furent donc divisées par deux ou par trois.
En Irak, une vague révolutionnaire était en cours, début 1948, sous la direction du parti communiste. La proclamation de l’Etat d’Israël et sa reconnaissance par l’URSS en mai furent utilisées par les autorités pour déclarer la loi martiale, écraser le mouvement, et isoler le parti communiste irakien. Ses dirigeants furent arrêtés, condamnés à mort et exécutés en février 1949. Tel fut le bilan tragique des « habiles » manœuvres de Staline.
La politique de Staline eut des conséquences durables dans la région. Mais elle affecta aussi les partis communistes de nombreux autres pays. Les communistes s’étaient partout opposés à la partition de la Palestine, et le vote de l’URSS pour la partition fin 1947 sema la confusion dans leurs rangs.
Le revirement sans principes des partis communistes occidentaux
Selon Dorothy Zellner, militante américaine dont les parents étaient des « immigrés juifs laïcs, non sionistes et partisans indéfectibles de l’Union soviétique », « la gauche communiste américaine en fut abasourdie ». Elle décrit la confusion qui agita alors les communistes américains dans un article publié par Jewish Currents en 2021.
Ce fut aussi le cas dans le parti communiste italien (PCI), quand il s’afficha en faveur de la partition de la Palestine. Par une ironie de l’histoire, le gouvernement chrétien-démocrate d’Alcide de Gasperi soutenait alors une position ambiguë sur la reconnaissance de l’Etat d’Israël, afin de préserver ses relations avec les régimes arabes. Comme en Grande-Bretagne, la classe dirigeante italienne s’inquiétait avant tout de l’approvisionnement en pétrole de son économie après la guerre. Elle cherchait aussi désespérément à retrouver ses colonies d’avant-guerre, et espérait le soutien des pays arabes à l’ONU. C’est pourquoi le gouvernement italien attendit février 1949 pour reconnaître officiellement l’Etat d’Israël.
Le PCI afficha pour sa part un soutien total à Israël, en cohérence avec la ligne de l’Union soviétique, comme le démontrent les archives de son journal, L’Unità, dans les années 1946-1948. Les sionistes y sont présentés comme des combattants anti-impérialistes pour l’indépendance nationale, face à l’impérialisme britannique. Le numéro du 29 mai 1948 comporte une déclaration anonyme – probablement rédigée par le rédacteur en chef Pietro Ingrao – évoquant « L’héroïque résistance des Juifs » (« L’eroica resistenza degli ebrei ») pour parler de l’opération de nettoyage ethnique à grande échelle que les sionistes menaient alors par la terreur contre les Palestiniens.
Dans l’éditorial de L’Unità du 29 mai 1948, Pietro Ingrao fustigea le gouvernement italien pour son refus de reconnaître le jeune Etat d’Israël. Deux jours plus tôt, le 27 mai, une déclaration officielle de la direction du parti réclamait la reconnaissance immédiate d’Israël, qu’elle décrivait comme « une manifestation de justice internationale et un signe de solidarité avec un peuple qui défend héroïquement son existence, hier contre la menace hitlérienne et aujourd’hui contre les dirigeants des démocraties occidentales. »
En Grande-Bretagne, avant 1947, le parti communiste défendait une solution à un Etat en Palestine, avec des droits égaux pour les différents groupes ethniques, côte-à-côte dans une fédération arabe. Mais quand le gouvernement soviétique décida de soutenir la partition, le parti fit volte-face à son tour.
En 1948, il défendit la création d’un Etat juif et la résolution de l’ONU sur la partition de la Palestine, dans son journal le Daily Worker. En mai 1948, il célébrait la formation d’Israël comme « un grand pas vers l’accomplissement de l’autodétermination des peuples de Palestine » et « un grand signe des temps ». « Les jours de l’impérialisme sont comptés », proclamait le Daily Worker, décrivant les milices juives armées luttant contre les forces britanniques en Palestine comme des forces anti-impérialistes. [8].
Lors de la fondation d’Israël, il appela toutes les « forces progressistes » à le soutenir et dénonça l’offensive des pays arabes comme une agression impérialiste ! William Gallacher, député communiste de West Fife, réclama la reconnaissance d’Israël et la fin immédiate de toute aide militaire aux Arabes.
Quelques années plus tard, l’Union soviétique changea de position et les partis durent suivre. La direction du PCI dénonça alors Israël comme la tête de pont de l’impérialisme occidental dans le monde arabe, et le parti communiste britannique découvrit soudainement qu’Israël avait toujours été un outil de l’impérialisme américain.
En effet, la position soviétique venait d’opérer un virage à 180 degrés vers l’antisionisme, au début des années 1950. En février 1953, l’Union soviétique rompit les relations diplomatiques avec Israël, à la suite du « complot des blouses blanches » - une campagne antisémite qui avait agité l’URSS, sur la base d’un complot prétendument orchestré par des médecins juifs pour assassiner des dirigeants soviétiques.
Comme on peut le voir, les « principes » de Staline étaient très souples ! Les « principes » des dirigeants des partis communistes du monde l’étaient tout autant. Ils se résumaient à un mantra : « dis et fais ce que te demande Staline » - bien qu’il fût parfois difficile de réagir rapidement aux zigzags les plus inattendus. Quand Staline soutint la création d’Israël, ils suivirent docilement. Et quand il adopta la position inverse, ils s’y plièrent aussi facilement.
Revenons à Lénine !
Ce n’étaient pas les méthodes de Lénine, ni celles des quatre premiers congrès de l’Internationale communiste, que Trotsky avait décrite comme une « école de stratégie révolutionnaire ». C’étaient les méthodes d’une bureaucratie qui avait abandonné la perspective de la révolution mondiale, et qui ne poursuivait que ses étroits intérêts nationaux. Les partis communistes en furent affaiblis pour des décennies, et le drapeau du communisme en fut souillé aux yeux des masses travailleuses de la région et du monde entier.
C’est en partie à cause de cela que des nationalistes arabes radicaux parvinrent à dominer les mouvements révolutionnaires qui éclatèrent dans la région après la Seconde Guerre mondiale. C’est aussi une des raisons de l’émergence de phénomènes comme le « socialisme baasiste », etc.
La radicalisation des masses arabes dans la lutte contre l’impérialisme se refléta dans un certain nombre de pays (Irak, Egypte, Syrie) à travers l’émergence de dirigeants nationalistes « de gauche », issus de couches radicalisées de l’intelligentsia et même du corps des officiers. Ces dirigeants prirent des mesures anti-impérialistes et révolutionnaires, qui leur valurent le soutien plus ou moins actif des masses.
Les éléments les plus radicaux de ces couches petites-bourgeoises étaient attirés par les idées de planification centralisée de l’économie et de propriété étatique des moyens de production. Ils voyaient que l’économie planifiée de l’Union soviétique lui avait permis de devenir une puissance moderne et industrialisée, malgré ses déformations. Ajoutons qu’ils enviaient aussi la situation de la bureaucratie privilégiée qui dirigeait l’URSS.
Ironiquement, dans ces pays - notamment en Egypte et en Syrie - les processus révolutionnaires se déroulèrent parallèlement à une féroce répression des communistes locaux.
Si l’Union soviétique et les partis communistes du Moyen-Orient étaient restés fidèles à l’idée d’un Etat pour deux peuples et n’avaient pas trahi la cause du peuple palestinien, ces partis auraient pu jouer un rôle clé dans la région. Ils auraient pu prendre la direction des masses travailleuses et de la jeunesse.
Cet épisode tragique démontre l’importance des idées qu’un parti défend, de la façon dont ce parti agit, et des positions qu’il adopte sur les questions clés, qui peuvent le renforcer ou l’affaiblir. Elles peuvent littéralement construire ou détruire les forces du parti. La politique de Staline au Moyen-Orient entre 1947 et 1949 affaiblit considérablement les partis communistes, ouvrant la voie à la défaite des mouvements révolutionnaires et à la montée de la réaction.
Mais, au même moment, des communistes d’un genre différent – de véritables communistes – continuèrent de défendre les méthodes et les idées de Lénine, malgré la brutale répression stalinienne. C’étaient les partisans de Léon Trotsky. En Grande-Bretagne, ils étaient organisés dans le Revolutionary Communist Party. Leur journal, Socialist Appeal, défendait une position de principe. Nous avons republié deux articles de Socialist Appeal de novembre et décembre 1947 sur le site de notre internationale. Ils ont été écrits peu après l’adoption de la résolution de partition à l’ONU et avertissent face aux conséquences de cette partition :
« La partition de la Palestine est réactionnaire de bout en bout. Les masses juives et arabes n’ont rien à en tirer. En montant les Juifs contre les Arabes, elle pousse deux peuples qui ont un intérêt commun à lutter contre l’impérialisme à se battre l’un contre l’autre, au lieu de combattre l’impérialisme. Elle fait le jeu des capitalistes et des propriétaires terriens arabes en détournant l’attention des ouvriers et paysans arabes de leurs exploiteurs. La seule solution, pour résoudre les problèmes de la Palestine et du Moyen-Orient, c’est d’abandonner les plans impérialistes de partition, et de retirer toutes les troupes de la région. Il ne peut pas y avoir de véritable indépendance, ni de véritable sécurité pour les Juifs et les Arabes dans une Palestine partitionnée. »
Les événements des 76 années qui suivirent donnèrent mille fois raison à ces camarades. Depuis 1948, nous avons vu s’enchaîner les conflits sanglants. Les Palestiniens ont été privés de leur patrie, et Israël n’a jamais réussi à garantir la sécurité aux Juifs.
Nous défendons encore aujourd’hui l’idée d’une patrie commune pour les deux peuples, dans la lignée de nos camarades du RCP en 1947-1948. Pour y parvenir, il faudra constituer un Etat socialiste sur l’ensemble du territoire de la Palestine historique, dans le cadre d’une fédération socialiste du Moyen-Orient. En son sein, les Juifs et les Palestiniens pourront vivre en paix, sur la base d’un développement socialiste de l’économie.
[1] Sovetsko-Izrail'skie otnoshenia. Sbornik Dokumentov 1941-1953 (SIO) (Moskva: Mezhdunarodnye Otnoshenia, 2000), vol. 1, pp. 15-17
[2] Laurent Rucker, « Une alliance improbable. L’URSS et la création d’Israël », dans Relations Internationales, 2002/2
[3] Discours prononcé par le ministre soviétique des Affaires étrangères Andreï Gromyko devant le Conseil spécial de l'ONU Comité sur la Palestine (14 mai 1947)
[4] Laurent Rucker, « Une alliance improbable. L’URSS et la création d’Israël », dans Relations Internationales, 2002/2
[5] John Lewis Gaddis, « Intelligence, Espionage, and Cold War Origins », Diplomatic History, 1989
[6] Mohammed Shafi Agwani, Communism in the Arab East
[7] Laurent Rucker, « Moscow’s Surprise: The Soviet-Israeli Alliance of 1947-1949 », Cold War International History Project, volume 46
[8] Daily Worker, 15 et 22 mai 1948