Dans la nuit du 8 au 9 juin, le Madleen, voilier affrété par la « Coalition de la flottille de la Liberté » (un mouvement de solidarité fondé en 2010) a été intercepté dans les eaux internationales par l’armée israélienne, à une centaine de kilomètres de Gaza, alors qu’il tentait de rompre le blocus de l’aide humanitaire imposé par l’Etat israélien. Depuis le 2 mars, presque aucun approvisionnement en vivre n’a pu être acheminé à la population de Gaza, qui est de facto privée d’accès à l’eau, à la nourriture et aux soins – tout en étant sous le feu constant de l’armée israélienne, y compris lors des rares distributions alimentaires qui y sont organisées.
Hypocrisie bourgeoise
Cette violation évidente du « droit international » se fait avec la complicité plus ou moins active de la plupart des dirigeants impérialistes français et des éditorialistes bourgeois. Quant au ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, ce n’est pas Israël qu’il a critiqué aujourd’hui, mais Jean-Luc Mélenchon, l’accusant de « désinformation » pour avoir critiqué la passivité de la diplomatie française face à cet acte de piraterie.
Les portes-paroles de l'armée israélienne et leurs relais dans les médias français affirment en chœur que le Madleen aurait été un « yacht à selfies ». Dans un billet sur TF1, Elizabeth Martichoux parlait même d’une « mise en scène [...] indécente », d’une « instrumentalisation » et d’une « opération de comm’ politique ». En réalité, le Madleen était exposé à de véritables risques. Le bateau a été menacé à plusieurs reprises par l’Etat israélien. Il y a un mois, un autre bateau de la flottille, le Conscience, a dû rebrousser chemin après avoir été bombardé par des drones israéliens au large de Malte. En 2010, un autre navire humanitaire avait été pris d’assaut par les forces spéciales israéliennes, qui avaient tué 10 personnes à bord. L’Etat israélien ne peut tolérer la moindre action de solidarité – aussi limitée soit-elle – envers les Gazaouis.
Les 12 militants présents sur le bateau, parmi lesquels se trouvent Greta Thunberg et l’eurodéputée LFI Rima Hassan, ont été arrêtés et sont, pour la plupart, toujours détenus par l’armée israélienne. Celle-ci a tenté de les forcer à visionner des vidéos des attaques du 7 octobre. D’après les portes-paroles de l’armée israélienne, il fallait que « Greta l’antisémite et ses amis, partisans du Hamas, voient exactement quel type d’organisation terroriste est le Hamas ». D’après les conventions internationales, ce type de traitement s’apparente à de la torture… Mais ce n’est pas ça qui va empêcher les dirigeants sionistes de dormir en paix.
Les dirigeants israéliens ont indiqué qu’ils n’expulseront les ressortissants étrangers qu’à la condition que ceux-ci signent une déclaration reconnaissant leur entrée illégale sur le territoire israélien – ce que la plupart d’entre eux a refusé de faire, puisque cette accusation est totalement mensongère. En cas de refus, ils seront déférés devant un tribunal israélien dans les prochains jours, et resteront en détention d’ici là.
L’impasse du « droit international »
La France Insoumise a appelé l’Union Européenne et l’ONU à s’opposer à ces arrestations illégales. C’est une impasse. Les dirigeants impérialistes européens versent des larmes de crocodile sur le sort des Gazaouis, tout en armant les génocidaires sionistes et en réprimant la solidarité avec la lutte des Palestiniens.
Après cet acte de piraterie des troupes israéliennes, Emmanuel Macron a fait étalage de son hypocrisie. Il a qualifié le blocus humanitaire de « honte » et demandé le retour des ressortissants français arrêtés « dans les plus brefs délais ». Mais, dans le même temps, il a refusé de qualifier la situation à Gaza de génocide, en expliquant que « ce n‘est pas à un responsable politique d’utiliser ces termes, mais aux historiens ». On suppose qu’il faudra donc attendre quelques décennies et des études universitaires pour pouvoir qualifier ce qui se passe à Gaza. En attendant, des entreprises françaises continuent à fournir des pièces détachées et des composants de munitions aux troupes israéliennes – avec l’approbation des services de l’Etat français – et le gouvernement présidé par Macron continue à vouloir interdire le collectif Urgence Palestine…
Nous ne devons accorder aucune confiance à ces hypocrites, qui arment Israël pour son « autodéfense » tout en feignant compatir avec le sort des Gazaouis. Tout comme nous ne devons accorder aucune confiance à l’ONU et aux soi-disant institutions internationales qui, depuis 75 ans, sont totalement passives face aux crimes de l’Etat israélien.
Mobilisation de masse
Pour lutter contre le génocide des Gazaouis, les travailleurs et la jeunesse ne doivent compter que sur leurs propres forces. Lundi soir, de nombreux rassemblements de solidarité ont eu lieu partout en France. D’après la France Insoumise, ils ont regroupé 150 000 manifestants, dont 50 000 sur la place de la République à Paris. C’est une démonstration du large soutien que rencontre la cause palestinienne. Ce soutien doit être mobilisé de façon active.
Les dockers de Fos-sur-Mer ont montré la voie à suivre. Le 5 juin, ils ont refusé de charger des cargaisons de pièces détachées à destination de l’armée israélienne, expliquant, dans un communiqué, qu’ils « ne participeront pas au génocide en cours orchestré par le gouvernement israélien. » Le lendemain, ils ont à nouveau refusé de charger des conteneurs renfermant des pièces détachées d’artillerie. Leur action montre que la classe ouvrière a les moyens d’agir pour empêcher notre gouvernement impérialiste d’apporter son soutien à la guerre génocidaire d'Israël. L’exemple des travailleurs de Fos-sur-Mer doit être suivi.
Comme nous l’expliquions dans un précédent article : « Les directions politiques et syndicales du mouvement ouvrier – à commencer par celles de la CGT mais aussi de la FI – [...] doivent se tourner vers la classe ouvrière et s’inspirer de l’exemple héroïque des dockers de Fos-sur-Mer pour généraliser ces actions de blocage dans tous les secteurs et toutes les entreprises en lien, d’une manière ou d’une autre, avec l’appareil militaire de l’Etat sioniste. » Seule une mobilisation de masse du mouvement ouvrier peut enrayer le carnage mené par l’Etat israélien et ses soutiens impérialistes.