En France comme ailleurs, la réponse extrêmement brutale du gouvernement israélien à l’attaque du Hamas, le 7 octobre, suscite l’indignation de millions de jeunes et de travailleurs. Mais au nom du « droit d’Israël à se défendre » et de « la lutte contre le terrorisme et l’antisémitisme », le gouvernement Macron a décrété que cette indignation était inacceptable et devait être réduite au silence, coûte que coûte.

Les manifestations de solidarité avec les Palestiniens de Gaza – et le peuple palestinien en général – ont été interdites par le pouvoir, puis réprimées. Le 10 octobre, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, annonçait que le NPA était visé par une « enquête pour apologie du terrorisme ». La veille, le même avait menacé « d’engager des procédures de dissolution » contre toute organisation « appelant à la haine, à l’intifada, à l’apologie du terrorisme ». Les dirigeants de la France insoumise, dont la position est pourtant très modérée (hélas), sont accusés en permanence d’alimenter le terrorisme et l’antisémitisme, voire d’être eux-mêmes des antisémites « masqués ». A Toulouse, le maire macroniste, Jean-Luc Moudenc, exige l’annulation d’une réunion de solidarité avec la Palestine qui doit se tenir dans les locaux de la CGT, à la Bourse du Travail. Moudenc a même déclaré se réserver le droit de saisir le préfet si la CGT n’obtempère pas. Et ainsi de suite.

Bien sûr, rien de tout cela n’est très nouveau, au fond. L’impérialisme français est un solide allié de l’impérialisme israélien, dont il défend les crimes depuis des décennies. L’accusation d’antisémitisme est régulièrement jetée à la face de quiconque ose critiquer la politique réactionnaire de l’Etat sioniste. Mais sur fond de profonde crise du capitalisme français et d’extrême fragilité du gouvernement Macron, un cap est en train d’être franchi, depuis le 7 octobre, dans la répression du mouvement de solidarité avec le peuple palestinien. Le mouvement ouvrier français a le devoir impérieux de réagir – non seulement par des paroles, mais aussi par des actes.

Les menaces de dissolution qui pèsent sur le NPA, notamment, sont absolument scandaleuses. On l’a dit : Darmanin range dans un même sac les appels « à la haine », à « l’intifada » et au « terrorisme ». Cet amalgame serait simplement d’une stupéfiante bêtise – ce qui est toujours possible, avec Darmanin – s’il n’était pas délibéré. En identifiant l’intifada – qui désigne un soulèvement de masse contre l’oppresseur – et le terrorisme, Darmanin menace quiconque soutient la légitime révolte du peuple palestinien contre l’oppression qu’il subit depuis des décennies.

Nous ne sommes pas d’accord avec chaque détail de la position du NPA sur le conflit actuel [1], mais une chose est parfaitement claire : le NPA n’appelle pas à des actes terroristes ; il appelle à une nouvelle intifada en Palestine. Révolution aussi, comme bien d’autres organisations et associations. Est-il interdit, désormais, de souhaiter le soulèvement du peuple palestinien contre le gouvernement réactionnaire de Netanyahou ? C’est ce qu’affirme le ministre de l’Intérieur français.

Les menaces contre le NPA, les attaques contre la FI, les interdictions de manifester et de se réunir ne doivent pas rester sans réponse de la part des organisations politiques et syndicales du mouvement ouvrier. Le problème, c’est que la plupart des dirigeants de la gauche et du mouvement syndical se sont empressés de plier sous la pression de la propagande anti-palestinienne qui sature les plateaux de télévision depuis le 7 octobre. Fabien Roussel, en particulier, a piétiné en quelques heures la position historique du PCF sur cette question. Celle-ci était loin d’être parfaite, mais elle valait bien mieux que les lamentables déclarations de Roussel, qui place un signe d’égalité entre l’attaque du Hamas et la réponse israélienne. François Ruffin fait de même. La position de la direction de la CGT est à peine meilleure, c’est-à-dire très mauvaise. La position du PS, sans surprise, ne se distingue en rien de celle du gouvernement. Ce sont précisément toutes ces capitulations face à l’opinion publique bourgeoise qui permettent à Macron, Darmanin et consorts de menacer le NPA et d’autres petites organisations de solidarité avec le peuple palestinien.

Tous les militants de gauche doivent analyser cette situation dans le contexte du développement continu de la répression policière et judiciaire de la jeunesse et du mouvement ouvrier, en France. Les interdictions de manifester se multiplient, ces dernières années, sous des prétextes absolument irrecevables. Lorsqu’elles sont autorisées, les manifestations sont souvent brutalement réprimées par la police. Enfin, il y a un lien – de classe – entre les menaces de Darmanin contre le NPA et la vague de répression judiciaire qui frappe en ce moment même des centaines de militants syndicaux, auxquels il est reproché d’avoir lutté contre la réforme des retraites, entre janvier et juin derniers.

Les militants de la CGT, de la FI, du PCF et de l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier doivent réagir et exiger que leurs dirigeants organisent l’opposition à la répression du mouvement de solidarité avec la Palestine. Ils doivent aussi exiger que leurs organisations participent pleinement à ce mouvement. Ceci doit prendre la forme, pour commencer, de grandes manifestations – autorisées ou non, peu importe – contre l’agression de Gaza, contre les crimes du gouvernement israélien et, oui, pour une nouvelle et victorieuse intifada en Palestine !


[1] Lire notre position.