Des missiles occidentaux ont à nouveau frappé la Syrie le 13 avril dernier, tirés par des avions et des navires américains, britanniques et français. Trois établissements de l’armée syrienne ont été touchés, mais sans faire de victimes : les Américains avaient prévenu la Russie des sites visés plusieurs jours à l’avance, pour éviter que des militaires russes ne soient tués. L’armée syrienne – informée par les Russes – avait donc eu le temps, elle aussi, de vider les établissements en question.

Tout cela prouve que Washington ne voulait pas trop provoquer les Russes. Il est clair que les esprits les plus avisés, à Washington, ont pris le dessus, et qu’ils ont voulu éviter une confrontation plus sérieuse. Cela souligne la réalité de la situation bien mieux que les déclarations démagogiques des laquais de Trump, à Londres ou à Paris.

Le cynisme des impérialistes

Ces frappes faisaient suite à ce que les chancelleries occidentales ont décrit comme une attaque chimique menée par le régime de Bachar al-Assad à Douma, dans la Ghouta orientale, une région proche de Damas et tenue jusqu’à début avril par les « rebelles » (islamistes). Macron affirme avoir les « preuves » d’une telle attaque chimique. Mais, d’une part, des journalistes présents sur place affirment qu’il s’agissait d’un bombardement « conventionnel ». D’autre part, on peut se demander pourquoi le régime d’Assad aurait ordonné une attaque chimique alors que, dans les faits, il a déjà remporté la guerre civile.

Bien sûr, le régime d’Assad est réactionnaire et criminel. Mais ce n’est pas une raison pour croire tout ce que racontent les impérialistes lorsqu’ils veulent justifier une intervention militaire.

Selon Edouard Philippe, les frappes du 13 avril visaient à sauver « la raison et la civilisation », qui étaient menacées par l’usage d’armes chimiques. Très bien. On attend donc que Macron condamne fermement le régime de Tel-Aviv, puisque l’armée israélienne a passé une bonne partie du mois d’avril à massacrer des civils palestiniens désarmés. Et peut-être le gouvernement français voudra défendre la « raison et la civilisation » face au régime saoudien, qui bombarde des hôpitaux et des écoles au Yémen ? Non, bien sûr, puisqu’il s’agit là de pays « amis » de l’impérialisme français – et que la France vend des milliards d’euros d’armes à Riyad, au passage.

Le cynisme des impérialistes n’a pas de limite. Ils sont les principaux responsables de la guerre civile qui a ravagé la Syrie. Paris, Washington, Londres et leurs alliés dans la région – la Turquie et l’Arabie Saoudite – ont tenté pendant des années de renverser Assad en apportant une aide militaire directe à des « rebelles » jihadistes. Mais leurs plans ont échoué ; Assad s’en est sorti grâce à l’intervention russe de 2015. Ce sont les Russes qui dominent en Syrie, désormais. Et ce ne sont pas quelques missiles occidentaux lancés sur des hangars vides qui y changeront quoi que ce soit.

Gesticulations

La réalité est que les frappes du 13 avril avaient un but démonstratif. Elles visaient à redorer le blason de dirigeants occidentaux en difficulté. Trump est mis sous pression par l’enquête sur sa campagne électorale ; le gouvernement de Theresa May est extrêmement fragile ; Macron est confronté à une contestation massive de sa politique. Pour May et Macron, il s’agissait surtout de détourner l’attention du peuple au moyen d’une intervention militaire.

Du point de vue de Macron, c’est un échec. Seuls le PS et Génération.s (Hamon) ont approuvé les frappes. Par ailleurs, beaucoup d’observateurs ont souligné le gâchis financier qu’a représenté toute l’opération, l’armée française ayant tiré pour 16 millions d’euros de missiles – pour un résultat nul, militairement.

Au niveau international, ces frappes ont surtout montré la véritable place de l’impérialisme français. Loin des déclarations tonitruantes de Macron, Paris en est réduit à jouer les supplétifs de Washington. Après que Macron s’est glorifié publiquement d’avoir fait changer Trump d’avis en le convainquant de maintenir une présence américaine en Syrie, il s’est fait corriger par un communiqué de la Maison-Blanche, qui affirmait que l’objectif de Washington restait de quitter le pays au plus vite. Trump, isolationniste convaincu, espère en fait que ces frappes le placeront en position de force pour négocier un compromis avec la Russie. Après avoir montré ses muscles et sa détermination à « tenir tête à la Russie », Trump pourrait commencer des négociations.

Aucune aventure impérialiste ne pourra apporter la moindre aide au peuple syrien. Au contraire : ce sont les impérialistes qui, ces vingt dernières années, ont semé la guerre et le chaos dans toute la région. Pour eux, les souffrances du peuple syrien ne sont qu’un argument hypocrite, bon uniquement à justifier de nouvelles interventions militaires.

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