En Grande-Bretagne, le rail a été privatisé en 1993, sous le gouvernement conservateur de John Major. Depuis près de 25 ans, les Britanniques disposent donc d’un système ferroviaire sans cheminots « privilégiés ». Est-ce que cette merveille a tenu ses promesses ?

La privatisation s’est accompagnée de la dispersion des équipes de spécialistes confirmés et qui coûtaient trop cher à leurs nouveaux patrons, quitte à nuire à l’entretien des lignes. Un risque qui s’est douloureusement concrétisé en 1999, lors de l’accident d’Hatfield. Un déraillement a fait 31 morts et 523 blessés. La compagnie responsable du réseau avait volontairement ignoré les lois sur la sécurité, par souci d’économie.

Cette course à la réduction des coûts n’a pas pour autant débouché sur des tarifs plus bas pour les voyageurs. Au contraire, ces dix dernières années, ils ont augmenté deux fois plus vite que le salaire moyen. Les trains sont devenus chers, bondés et moins fiables. L’Etat lui-même y a perdu : il gaspille chaque année des milliards de Livres Sterling en subventionnant les compagnies privées. Le coût réel des chemins de fer, pour l’Etat, a plus que doublé depuis la privatisation : il est passé de 2,4 milliards de Livres par an, en 1990-1994, à 5,4 milliards en 2005-2010 !

Faillite

L’Etat a dû aussi parfois reprendre le contrôle direct de certaines entreprises, comme en 2009 dans le cas de la East Coast Mainline, qui relie Londres à Edimbourg et que son propriétaire avait menée au bord de la faillite. Après avoir été remise à flot, elle a été de nouveau privatisée en 2015, cette fois-ci au profit de Virgin. Trois ans plus tard, à nouveau en difficulté, l’hypothèse d’un renflouement public est régulièrement évoquée...

Tout ceci a mené à une campagne des syndicats en faveur de la renationalisation du rail, un mot d’ordre repris par Jeremy Corbyn depuis son élection à la tête du Parti Travailliste. Sur la question des compensations éventuelles à accorder aux propriétaires privés si le rail devait être renationalisé, Steve Hedley, un des dirigeants du syndicat RMT, a donné son avis en 2017 : « Les travailleurs et les citoyens n’ont pas reçu un sou lors de la privatisation. Pourquoi les capitalistes auraient-ils droit aujourd’hui à cette largesse ? »