Venezuela

Ces derniers jours, nous assistons à une dangereuse escalade dans les menaces et les provocations de Washington contre le Venezuela. Le ministère américain de la Justice a accusé le président Maduro et d’autres hauts fonctionnaires vénézuéliens de fausses accusations de trafic de drogue, entre autres choses. Le ministère des Affaires étrangères des Etats-Unis a offert des récompenses montant jusqu’à 15 millions de dollars pour toute « information conduisant à l’arrestation » des accusés. Immédiatement, le président Trump a annoncé qu’il envoyait des vaisseaux de guerre dans les Caraïbes, au large des côtes du Venezuela, pour combattre « le trafic de drogue ».

Dans le même temps, l’envoyé spécial au Venezuela Elliot Abrams et le Secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo ont annoncé un « plan de transition démocratique » pour le Venezuela, dont le premier point serait la destitution du président Maduro.

Il est tout à fait clair pour nous qu’il s’agit de la continuation de la tentative de « changement de régime » qui a commencé en janvier 2019 quand Juan Guaidó s’est autoproclamé « président en charge », soutenu par les Etats-Unis. Pendant six mois, Washington s’est servi de tous les moyens à sa disposition pour destituer le gouvernement du président Maduro : intimidation diplomatique, diabolisation dans les médias, sanctions, embargo pétrolier, coup d’Etat militaire, menaces d’invasion militaire, provocations à la frontière. Tous ont échoué. Le président Maduro est toujours au pouvoir. Juan Guaidó est discrédité, accusé de corruption par son propre camp et corrompu par ses liens avec les gangs de narcotrafiquants colombiens.

En cette année d’élection, alors que Trump est confronté aux conséquences de sa gestion épouvantable de l’épidémie du COVID-19 et à une profonde récession économique, le président américain a décidé de faire diversion en multipliant les menaces de plus en plus violentes contre le Venezuela.

L’idée que ces manœuvres aient un rapport avec la « lutte contre le trafic de drogue » est absurde. D’après la DEA (bureau américain de lutte contre la drogue), 92 % de la cocaïne saisie aux États-Unis est produite en Colombie. 93 % de la cocaïne qui arrive dans le pays depuis l’Amérique du Sud voyage par le couloir du Mexique et de l’Amérique centrale, et seulement 6 à 7 % est acheminée par le couloir caribéen. Cela pose la question des raisons pour lesquelles Washington se focalise sur le Venezuela, au lieu de se concentrer sur le gouvernement de Duque en Colombie et ses fanfaronnades militaires dans le couloir reliant l’Amérique centrale au Pacifique oriental.

Cocaine movement

Si, en temps normal, les sanctions économiques sont illégales et coûtent des vies, les maintenir pendant une crise sanitaire mondiale majeure est purement criminel, car elles empêchent les gouvernements comme ceux du Venezuela et de Cuba d’obtenir les ressources nécessaires pour combattre le COVID-19. Dans leur lancée vindicative, les Etats-Unis bloquent même les efforts du gouvernement vénézuélien pour rapatrier les citoyens vénézuéliens vivant aux Etats-Unis et qui souhaitent retourner dans leur pays.

Nous exigeons : 

  • L’arrêt immédiat des menaces des États-Unis et des ingérences contre le Venezuela.
  • La levée immédiate de toutes les sanctions et embargos commerciaux sur le Venezuela et Cuba.
  • Le déblocage immédiat des 1,2 milliard de dollars d’or vénézuélien retenus illégalement par la Banque d’Angleterre, afin qu’ils puissent être utilisés pour l’urgence sanitaire.

Pas touche au Venezuela : pas de menaces, pas de sanctions !

Le 5 août dernier, l’administration Trump a franchi un nouveau palier dans son agression impérialiste contre le Venezuela, en lui imposant un embargo économique. La tentative de changement de régime dirigée contre le président Nicolas Maduro a, jusqu’à maintenant, lamentablement échoué. Dans l’incapacité d’utiliser des moyens militaires directs pour renverser le gouvernement vénézuélien et le remplacer par un gouvernement fantoche à sa botte, Washington a décidé de serrer encore plus l’étau financier autour d’une nation qui souffre déjà d’une situation économique catastrophique, que les précédentes sanctions n’ont fait qu’aggraver. Nous nous opposons avec détermination à cette nouvelle et scandaleuse agression impérialiste.

L’ordre exécutif, signé par Trump, gèle tous les actifs du gouvernement vénézuélien aux Etats-Unis et interdit toute transaction avec le Venezuela, à l’exception de celles explicitement autorisées ; c’est la première fois que de telles mesures sont prises dans le monde occidental depuis 30 ans. Comme John Bolton, conseiller en sécurité intérieure, l’a déclaré lors d’une conférence : « Cela a marché avec le Panama, avec le Nicaragua, cela marchera encore, et cela marchera avec le Venezuela et avec Cuba ! »

Jusqu’à maintenant, le changement de régime promu par Trump, avec le soutien total du président colombien Duque et du démagogue réactionnaire brésilien Bolsonaro, a échoué. L’autoproclamation comme président de Guaido, dirigeant de l’opposition et marionnette de Washington, le 24 janvier dernier, a lamentablement échoué à provoquer une scission dans l’armée. Les provocations menées aux frontières, le 23 février, sous le prétexte d’une soi-disant aide humanitaire, se sont transformées en une vaste farce. Le coup militaire bâclé, mené par Guaido le 30 avril, a tourné court au bout de quelques heures. Jusqu’à maintenant, les hauts gradés de l’armée sont restés fidèles au gouvernement élu de Maduro et il y a eu très peu de défections.

Bolton, Pompeo et Marco Rubio ont promis à Trump que le Venezuela serait un succès rapide de politique étrangère et, qui plus est, un succès salué par le puissant lobby réactionnaire cubain de Floride, ce qui permettrait à Trump de gagner de précieuses voix pour l’élection de 2020. Mais ça, c’était avant : il y a déjà deux mois, des rapports rapportaient que Trump avait l’impression d’avoir été trompé et qu’il « perdait de l’intérêt » envers le Venezuela.

Pourquoi cette nouvelle escalade ?

BoltonQuelle est donc la raison de l’actuelle escalade des sanctions ? D’un côté, Trump a toujours besoin des voix des puissants réactionnaires cubains de Floride. Il faut noter que, lors de son discours à Lima, Bolton [Photo] a mentionné Cuba neuf fois en douze minutes, alors que le Venezuela était le sujet principal du sommet. Une autre raison est la mauvaise image renvoyée par l’incapacité de Washington à tenir ses promesses. Comme une intervention militaire a été totalement exclue (le Venezuela possède de puissantes défenses antiaériennes, les chefs de l’armée brésilienne s’opposent à une intervention armée et il n’y a pas vraiment la volonté, aux Etats-Unis, de s’engager dans une autre aventure militaire à l’étranger), la seule option restant à Washington consiste à renforcer les sanctions économiques, comme cela a été fait lundi 5 août.

Il nous faut rappeler que le Venezuela et les membres de son gouvernement ont déjà été l’objet de toute une série de sanctions, à commencer par un ordre exécutif signé par le président Obama en 2015. Ces sanctions ont empêché le gouvernement vénézuélien de renégocier sa dette étrangère aux Etats-Unis ; l’ont amputé de ressources et de fonds, rendant très difficile toute transaction dans des devises étrangères ; ont réduit l’importation de nourriture et de matériel de soins et, depuis février, ont permis de saisir les actifs de la compagnie pétrolière nationale PDVSA aux Etats-Unis, tout en arrêtant la totalité des échanges de PDVSA avec les Etats-Unis (exportation de pétrole et importation de produits nécessaires pour raffiner le pétrole extra-lourd du pays).

Ces sanctions ont frappé le gouvernement vénézuélien et ont diminué sa capacité de fonctionnement, mais les principales victimes en ont été les travailleurs vénézuéliens ordinaires ; ce sera de nouveau le cas avec cette nouvelle escalade de sanctions. Plutôt que de les dresser contre le gouvernement, cela ne fera qu’augmenter leur résilience anti-impérialiste.

En réalité, il n’est même pas sûr que l’embargo fasse tomber le gouvernement de Nicolas Maduro. Les rodomontades de Bolton – « cela a marché au Nicaragua, cela a marché au Panama » – sont fausses. Au Panama, c’est l’invasion des Etats-Unis qui a « fait le travail », et au Nicaragua l’étranglement économique s’est accompagné d’une intervention militaire menée par les impitoyables gangs financés et armés par les Etats-Unis. Rien de tout ceci n’est prévu pour le Venezuela, du moins jusqu’à maintenant ; par ailleurs, l’histoire de la révolution cubaine a montré combien un embargo économique est inefficace.

Tant que la Russie, la Chine et d’autres (Turquie, Inde), continueront de commercer avec le Venezuela, l’embargo aura certes un effet sérieux et dévastateur, mais peu de chances – seul – de faire tomber Maduro.

Dans son discours de Lima, Bolton a lancé un avertissement à ces pays : « Nous envoyons un signal à des tierces parties qui voudraient faire des affaires avec le régime de Maduro : faites extrêmement attention », ajoutant qu’elles « risque[raient] [leurs] affaires avec les Etats-Unis ».

S’opposer à l’impérialisme avec une lutte révolutionnaire

Cette nouvelle escalade a lieu en même temps que des discussions entre le gouvernement vénézuélien et l’opposition réactionnaire, qui se sont d’abord tenues en Norvège puis à La Barbade (aux Caraïbes). L’une des raisons de cet embargo pourrait être de vouloir forcer Maduro à faire des concessions à la table des négociations. Trump est connu pour proférer de grandes menaces et faire pression afin de prendre l’avantage lors de négociations avec ses adversaires. L’autre possibilité est que Washington cherche à détruire le processus de négociation de La Barbade, comme il l’a fait avec les précédentes discussions de 2018, en République Dominicaine.

Pendant ce temps, au Venezuela, le gouvernement a fait de très nombreux pas vers la mise en œuvre des mesures économiques demandées par la classe dirigeante. Tous les contrôles (sur les devises étrangères, sur les prix) ont été supprimés. Le gouvernement a mis en place une réduction brutale de la liquidité, qui a permis de contenir partiellement l’hyperinflation, mais a dégradé encore plus profondément le pouvoir d’achat des Vénézuéliens [1]. En parallèle, la répression s’intensifie envers les militants et les mouvements chavistes de base et de la gauche.

Marche Paysans CaracasLe traitement réservé à la marche des paysans vers Caracas, le 6 août, en est un bon indicateur. Il y a un an, ils avaient été reçus par le président, qui leur avait promis la lune. Ces promesses n’ont pas été tenues, et maintenant que les paysans reviennent à Caracas pour réclamer ce sur quoi il y avait eu accord, ils font face à un double cordon de police les empêchant de s’approcher du palais de Miraflores. Pendant ce temps, le ministre de l’Agriculture parle d’alliance avec la « bourgeoisie patriotique » et remet des secteurs agricoles publics au secteur privé.

La seule façon sérieuse de répondre à ces sanctions scandaleuses et à l’embargo serait d’exproprier, sans compensation, tous les actifs des multinationales américaines au Venezuela, d’arrêter et de juger tous les fomenteurs de coup d’Etat (Guaido inclus qui, malgré ses tentatives de coup d’Etat, est toujours en liberté), de nationaliser sous le contrôle des salariés les entreprises de tous les putschistes et de placer tout le pouvoir dans les mains des travailleurs. Malheureusement, depuis janvier, lorsque la tentative de changement de régime a commencé, rien de tout ceci n’a été fait. Pire, la politique gouvernementale semble aller complètement à l’opposé : tout en prenant des mesures pour rester au pouvoir, le gouvernement fait des concessions toujours plus grandes à la classe capitaliste dans le domaine économique et utilise l’appareil d’Etat pour freiner l’aile chaviste et les travailleurs organisés.

Il faut s’opposer à l’embargo et à l’agression impérialiste. Le renversement de Maduro par Trump serait un désastre sans précédent pour les travailleurs et les paysans du Venezuela, et au-delà. Néanmoins, il est de notre devoir de souligner que les politiques du gouvernement de Maduro sont en train de miner sérieusement la Révolution bolivarienne ; elles vont à son encontre et préparent la voie à un désastre. Il faut construire une alternative révolutionnaire, venant des paysans et des travailleurs en lutte, dont ceux qui ont marché sur Caracas le mardi 6 août dernier. Une telle alternative doit être construite à partir d’une lutte contre l’agression impérialiste, par des moyens révolutionnaires.


[1] La inflación se ralentiza: ¿Por qué no hay motivos para celebrar?

Le 23 février dernier, l’impérialisme américain pensait pouvoir en finir avec le régime de Nicolas Maduro, au Venezuela. Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu. La provocation des Etats-Unis et de ses laquais à la frontière vénézuélienne, sous couvert d’« aide humanitaire », s’est soldée par un cuisant échec.

Bien sûr, jamais le gouvernement américain n’a eu l’intention d’apporter de l’aide humanitaire au Venezuela. S’il voulait vraiment aider les Vénézuéliens, il commencerait par mettre fin à sa politique de sanctions économiques à l’encontre de ce pays, car ces sanctions sont l’une des principales causes de la crise économique qu’il traverse.

Démoralisation et impatience

L’opposition vénézuélienne et ses maîtres, à Washington, comptaient sur la provocation du 23 février pour mobiliser massivement les anti-chavistes et mener à son terme la tentative de coup d’Etat. Mais ils ont vite réalisé qu’ils avaient surestimé leurs forces. Leur mobilisation fut beaucoup plus faible que prévu. En conséquence, les partisans de Juan Guaidó – le président autoproclamé – sont démoralisés. Ils placent tous leurs espoirs dans une intervention militaire directe des Etats-Unis. A l’inverse, les adversaires du coup d’Etat ont montré qu’ils étaient toujours nombreux et déterminés à résister à cette ingérence impérialiste flagrante.

Les instigateurs du coup d’Etat perdent patience. Ils sentent que la situation leur échappe, après avoir surestimé l’opposition et sa capacité de mobilisation. Le gouvernement américain est mécontent de son pantin Juan Guaidó. Aussi a-t-il tenté de le transformer en martyr. Il lui a ordonné de retourner au Venezuela, le 4 mars – dans l’espoir que le gouvernement de Maduro, en l’arrêtant, fournirait une nouvelle occasion de diviser les sommets de l’armée vénézuélienne. Mais ce plan a échoué, lui aussi. Le gouvernement n’a pas arrêté Guaidó (à tort, selon nous). Pire encore : son retour au Venezuela n’a pas fait grand bruit.

Le blackout

La coupure générale d’électricité dans la majorité du pays, le 7 mars, est arrivée à point nommé pour Washington et l’opposition vénézuélienne. Les médias bourgeois se sont jetés sur cette occasion pour justifier, une fois de plus, l’ingérence des impérialistes. L’opposition a accusé le gouvernement Maduro d’être responsable de la panne du principal générateur d’électricité du pays, au barrage de Guri.

La version selon laquelle un feu de forêt aurait entraîné la coupure a été réfutée. Maduro a dénoncé plusieurs attaques du gouvernement américain sur le système informatique du barrage. Ces accusations sont crédibles : Washington a déjà eu recours à ce genre de méthodes, par le passé, et le gouvernement américain a besoin d’appuyer sa thèse d’un « désastre humanitaire » au Venezuela. Il est prêt, pour cela, à le déclencher lui-même.

A ce stade, les Etats-Unis ne veulent pas courir le risque d’une intervention militaire directe. Leur stratégie consiste à aggraver la situation économique du pays par tous les moyens, dans l’espoir que cela finisse par pousser les sommets de l’armée vénézuélienne à renverser Maduro. Pour le moment, c’est un échec.

Cette politique de sanctions économiques et de sabotage frappe d’abord les Vénézuéliens les plus pauvres, bien sûr. Mais il en faut plus pour émouvoir les Trump, Abrams, Rubio, Bolton et compagnie. Cette politique immonde fait tomber le masque de leurs soi-disant « préoccupations humanitaires ». Ils sont prêts à tout pour imposer leur gouvernement au peuple vénézuélien. Jusqu’à présent, ils ont échoué. Mais ils n’ont pas renoncé. Et pour parvenir à leurs fins, ils sont prêts à recourir aux méthodes les plus abjectes – comme des attaques sur les systèmes informatiques de l’industrie vénézuélienne.

Comment vaincre le coup d’Etat ?

La seule politique efficace, contre le coup d’Etat impérialiste, est une politique révolutionnaire. L’histoire de la révolution vénézuélienne prouve qu’il est impossible de faire la moitié d’une révolution. La bourgeoisie vénézuélienne domine toujours l’économie du pays. Forte de cette position, elle ne renoncera jamais à reprendre le contrôle de l’Etat. Dans le même temps, elle spécule sur la misère, alimente le marché noir, sabote l’économie et refuse d’investir dans la production. La seule solution, pour le peuple vénézuélien, c’est donc de renouer avec l’objectif que fixait Chavez : rompre avec le capitalisme.

Les travailleurs vénézuéliens doivent être armés pour défendre la révolution. Des milices ouvrières doivent être organisées dans chaque usine et chaque quartier. Le contrôle ouvrier dans les entreprises nationalisées doit devenir une réalité. Toutes les entreprises des capitalistes et des impérialistes engagées dans la tentative de coup d’Etat doivent être nationalisées et placées sous le contrôle démocratique des salariés. Le coup d’Etat sera balayé si l’initiative et l’énergie révolutionnaires des masses sont libérées !

Dans le monde entier, nous devons redoubler d’efforts pour développer la campagne contre l’ingérence des impérialistes au Venezuela. En France, l’ensemble du mouvement ouvrier devrait dénoncer la position scandaleuse du gouvernement Macron – qui, non content de réprimer brutalement les gilets jaunes, soutient ouvertement la tentative de coup d’Etat impérialiste au Venezuela.

Pas touche au Venezuela !

Mener la révolution à son terme !

Pour bien comprendre la situation actuelle au Venezuela, il faut connaître l’histoire de la révolution vénézuélienne.

Entre 1958 et 1998, deux partis de droite se partageaient le pouvoir. Ils appliquaient le programme de la classe capitaliste et les mesures d’austérité dictées par le FMI. A la fin des années 80, le taux de pauvreté s’élevait à 80 %. La classe dirigeante, elle, vivait grassement de la rente pétrolière.

En 1989, suite à l’augmentation brutale de certains prix, des manifestations et des émeutes – connues sous le nom d’El Caracazo – sont réprimées dans le sang par l’armée, dans les rues de Caracas, la capitale. Il y a entre 300 et 3000 victimes, selon les sources.

Hugo Chavez

A l’époque, Hugo Chavez est un officier de l’armée qui entretient d’étroites relations avec des milieux de gauche (y compris dans l’armée). Choqué par la répression du Caracazo, il tente un coup d’Etat en février 1992. C’est un échec qui le mène en prison, mais lui assure une grande popularité dans la masse de la population, car Chavez a publiquement appuyé sa tentative de coup d’Etat sur un programme de gauche.

Libéré en 1994 sous la pression des masses, Chavez remporte facilement les élections présidentielles de 1998. Aussitôt, il fait adopter par référendum une nouvelle constitution « bolivarienne » – du nom de Simón Bolívar –, qui marque toute une série d’avancées démocratiques. En 2001, des lois sont promulguées permettant à l’Etat d’intervenir davantage dans l’économie. Les principales concernent la réforme agraire (favorable aux petits paysans) et la reprise en main, par l’Etat, de la gigantesque entreprise pétrolière du pays (PDVSA). Par exemple, les compagnies pétrolières étrangères sont davantage taxées.

Grâce à l’argent du pétrole, Chavez finance des programmes sociaux de grande ampleur, notamment en matière d’éducation (éradication de l’analphabétisme) et de santé (grâce à des milliers de médecins cubains). Un vaste programme de construction de logements sociaux est lancé. La grande pauvreté recule rapidement.

La réaction passe à l’offensive

Pour la classe dirigeante vénézuélienne et l’impérialisme américain, c’en est trop. Un coup d’Etat est organisé le 11 avril 2002 par les Etats-Unis, le patronat vénézuélien, les médias privés, l’Eglise et une fraction des sommets de l’armée. Chavez est arrêté. Mais en l’espace de 48 heures, la mobilisation révolutionnaire des masses balaye le coup d’Etat. Cet épisode extraordinaire de la révolution vénézuélienne est saisi sur le vif dans le documentaire intitulé : La révolution ne sera pas télévisée.

En décembre 2002, la bourgeoisie vénézuélienne tente à nouveau de renverser le gouvernement Chavez, cette fois-ci au moyen d’un lock-out patronal (les entreprises sont fermées par leur propriétaire). L’objectif est de semer le chaos économique pour créer les conditions d’un nouveau coup d’Etat. Mais là encore, les masses se mobilisent et balayent le lock-out. Les travailleurs de PDVSA parviennent à relancer la production, alors que les dirigeants de l’entreprise, y compris les ingénieurs, sont partis après avoir saboté les machines.

Crise économique

En 2006, Chavez proclame le caractère « socialiste » de la révolution bolivarienne. Cependant, la bourgeoisie vénézuélienne et les impérialistes ne sont pas expropriés. Et ils tentent de renverser Chavez par tous les moyens : manifestations violentes, sabotage économique, boycotts d’élections, référendums révocatoires, etc. Mais à chaque fois, les masses vénézuéliennes se mobilisent pour y faire échec.

A partir de la crise mondiale de 2008, la situation économique se complique, en particulier du fait de la chute des prix du pétrole. Les mesures sociales deviennent de plus en plus difficiles à financer. En 2015, le prix du baril tombe à 27 dollars. Le Venezuela s’enfonce dans une crise économique profonde, qui est aggravée par les sanctions américaines.

Ces quatre dernières années, le PIB a diminué de moitié. Il y a une chute drastique des importations – de 66 milliards de dollars en 2012 à 9 milliards en 2018. La production de pétrole tombe de 3 millions de barils par jour à 1,1 million. Le taux de change passe de 1 dollar pour 60 bolivars, en août 2018, à 1 dollar pour 3300 bolivars en février 2019. Les salaires ne suivent pas le rythme de l’hyperinflation.

La raison fondamentale de cette impasse économique est claire : il est impossible de réguler le capitalisme, en particulier en période de crise. Les capitalistes vénézuéliens continuent de spéculer sur la monnaie et sur les prix des biens de consommation. Ils exportent leurs capitaux à l’étranger et, pour le reste, alimentent le marché noir.

En conséquence, le gouvernement de Nicolas Maduro – élu après la mort de Chavez, en 2013, et réélu en 2018 – perd de plus en plus de soutien dans la masse de la population. L’initiative révolutionnaire des travailleurs est entravée par la bureaucratie « bolivarienne », ce qui conduit à la désillusion et au scepticisme. La révolution vénézuélienne ne pourra être sauvée qu’en allant jusqu’à son terme, celui qu’avait fixé Chavez lui-même : le socialisme. Nous l’avons dit et répété au sujet du Venezuela : il n’est pas possible de faire la moitié d’une révolution.

L’homme qui s’est auto-proclamé « président en charge du Venezuela », Juan Guaidó, n’a aucun pouvoir. L’armée soutient toujours le président légitime du pays, Nicolas Maduro, élu en 2018. Les provocations organisées par Trump à la frontière du Venezuela et de la Colombie, le 23 février, n’y ont rien changé.

« Aide humanitaire » ?

Ceci dit, la tentative de coup d’Etat dirigée par l’impérialisme américain n’est pas terminée. De nouvelles provocations seront organisées, sous prétexte d’« envoyer de l’aide humanitaire » au Venezuela. L’aide humanitaire joue ici le même rôle que « les armes de destruction massive » en Irak avant son invasion en 2003. C’est un mensonge visant à justifier l’ingérence impérialiste au Venezuela, laquelle poursuit des objectifs évidents : placer à la tête du pays un gouvernement « ami des Etats-Unis », éliminer tout ce qu’il reste des conquêtes de la révolution vénézuélienne et faciliter l’accès des Etats-Unis aux énormes réserves pétrolières du pays.

Guaidó affirme que 300 000 personnes sont sur le point de mourir de faim au Venezuela. C’est un mensonge – que reprennent les grands médias français. Certes, il y a une grave crise économique au Venezuela, notamment du fait des sanctions imposées par les Etats-Unis, ces dernières années. Mais il n’y a pas la situation de famine dont parle Guaidó. Par ailleurs, depuis le début du mois de janvier, les Etats-Unis ont saisi 7 milliards de dollars d’avoirs vénézuéliens – et la Banque d’Angleterre refuse de restituer au Venezuela des réserves d’or lui appartenant (1,2 milliard de dollars). Qui peut croire un instant que les puissances impérialistes qui volent ainsi le Venezuela sont en même temps soucieuses de lui apporter de l’aide humanitaire ?

Intervention militaire ?

Aide humanitaire VenezuelaDonald Trump et d’autres officiels américains ont déclaré que « toutes les options sont sur la table » – y compris, donc, une intervention militaire américaine. Guaidó lui-même a déclaré qu’il n’excluait pas « d’autoriser une intervention militaire étrangère » au Venezuela.

Cependant, ce n’est probablement pas l’option privilégiée par Washington. Une intervention militaire directe serait très coûteuse en argent, en vies humaines et en conséquences politiques. Plus de 15 ans après l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, les Etats-Unis ne sont toujours pas parvenus à en sortir. Une intervention terrestre au Venezuela nécessiterait un grand nombre de soldats, qui se heurteraient sans doute à une très forte résistance. Cela aurait aussi d’énormes conséquences dans toute l’Amérique latine, où les sentiments anti-impérialistes sont très enracinés dans les masses.

Pour chasser Maduro du pouvoir (soit par un coup d’Etat de l’armée vénézuélienne, soit par une démission de Maduro lui-même), l’administration américaine table sans doute sur une combinaison de sévères sanctions économiques, d’isolement diplomatique et de pressions militaires.

Pas touche au Venezuela !

La situation est donc très sérieuse. Nous devons combattre cette agression impérialiste de toutes nos forces. Malheureusement, en France et à l’échelle internationale, une partie de la gauche défend la position : « ni Maduro, ni Guaidó ». C’est un très mauvais point de départ. Il ne s’agit même pas de Guaidó, mais des ambitions de Trump au Venezuela. En 2003, tous les anti-impérialistes conséquents se sont opposés à l’intervention américaine en Irak, indépendamment du fait que Saddam Hussein était un dictateur qui massacrait son propre peuple. Le cas du Venezuela est encore plus clair. L’un des objectifs de l’agression américaine est précisément d’écraser la Révolution bolivarienne, ou ce qu’il en reste. Et il n’est pas nécessaire de soutenir le gouvernement de Maduro pour s’opposer de façon catégorique à l’agression impérialiste américaine – et à sa marionnette locale, Juan Guaidó.

Si Trump parvient à mener le coup d’Etat à son terme, non seulement ce qui reste des acquis de la révolution vénézuélienne sera détruit, mais seront également détruites les organisations révolutionnaires des travailleurs, des paysans et des pauvres. Comment peut-on se dire « de gauche » et ne pas comprendre cela ?

Est-ce que cela signifie que nous devons suspendre nos critiques à l’égard de la politique réformiste de Nicolas Maduro ? Pas du tout. Mais il ne faut pas critiquer abstraitement cette politique. Il faut tenir compte du contexte. Il faut donc exiger du gouvernement – et proposer aux masses révolutionnaires – que des mesures radicales soient prises pour combattre la tentative de coup d’Etat. C’est précisément ce que font nos camarades vénézuéliens de Lucha de Clases. Voici un extrait d’un de leurs récents tracts : « Prison pour Guaidó et ses complices ! Aucune impunité pour les putschistes ! Dissolution de l’Assemblée Nationale putschiste ! Armer les milices bolivariennes ! Expropriation des grandes entreprises et des multinationales impliquées dans le coup d’Etat ! Plus de concessions à la bourgeoisie parasitaire ! » Voilà comment il faut « critiquer » le gouvernement de Maduro, face à une tentative de coup d’Etat impérialiste.

La Tendance Marxiste Internationale rejette la tentative de coup d’Etat qui est en cours au Venezuela, à l’initiative de l’impérialisme américain.

Sous la direction de Donald Trump, une coalition de pays s’efforce de renverser le gouvernement du Président Nicolas Maduro. Ce n’est pas nouveau. Ces 20 dernières années, l’impérialisme a lutté contre la Révolution bolivarienne au moyen de tentatives de coups d’Etats, d’infiltrations paramilitaires, de sanctions économiques, de pressions diplomatiques, de manifestations violentes et de tentatives d’assassinats.

Sur instruction de la Maison Blanche et après des réunions à Washington, Juan Guaidó s’est proclamé « Président en charge » du Venezuela lors d’un rassemblement dans les rues de Caracas, le 23 janvier. Cette déclaration n’a aucune légitimité, mais Guaidó a été immédiatement reconnu comme Président par Trump, Bolsonaro, Duque, Macri et Almagro. D’autres gouvernements ont suivi leur exemple, dont 19 gouvernements européens.

Les impérialistes ont appelé l’armée vénézuélienne à déclarer sa loyauté au nouveau « Président ». Puis les Etats-Unis ont imposé de nouvelles sanctions à PDVSA, la grande compagnie pétrolière du Venezuela. Les avoirs de PDVSA aux Etats-Unis (7 milliards de dollars) ont été saisis. Par ailleurs, les Etats-Unis ont obtenu de la Banque d’Angleterre qu’elle refuse de restituer au Venezuela des réserves d’or d’une valeur de 1,2 milliard de dollars.

L’objectif est d’asphyxier l’économie vénézuélienne – pour faire plier le régime.

Cette agression impérialiste flagrante est menée sous les prétextes de « défendre la démocratie » et « d’apporter une aide humanitaire » au pays. Soyons clairs : l’impérialisme a menti sur les raisons d’envahir l’Irak (« armes de destruction massive »), a menti sur les raisons de bombarder la Libye (« sauver Benghazi ») – et, de manière générale, cherche toujours une noble justification à ses agressions impérialistes.

Le gouvernement américain construit un mur pour empêcher les migrants d’entrer aux Etats-Unis. Il emprisonne les migrants qui parviennent tout de même à entrer – et va jusqu’à séparer les enfants de leurs parents. De toute évidence, il n’a aucune considération pour le sort des migrants vénézuéliens. Par ailleurs, Trump a confié à Elliot Abrams la charge de superviser « la restauration de la démocratie au Venezuela ». Ce seul fait en dit assez sur les intentions réelles de l’impérialisme américain, car Elliot Abrams est connu pour avoir directement participé à la direction des opérations contre-révolutionnaires au Nicaragua, au Salvador et au Guatemala, dans les années 70 et 80.

Cette tentative de coup d’Etat a trois objectifs. Premièrement, il s’agit de détruire la Révolution bolivarienne, ce que Washington s’efforce de faire depuis 20 ans. Deuxièmement, la victoire du coup d’Etat permettrait à l’impérialisme américain de mettre la main sur les immenses richesses pétrolières et minières du Venezuela. Enfin, cela servirait de leçon aux travailleurs et paysans de tout le continent. En particulier, cela renforcerait les menaces qui pèsent sur la Révolution cubaine.

Le succès du coup d’Etat aurait des conséquences désastreuses pour les travailleurs du Venezuela – et au-delà. Guaidó a déjà annoncé son programme : la privatisation des entreprises nationalisées (électricité, acier, ciment, télécommunications) et des terres expropriées par la Révolution ; l’« ouverture » de l’industrie pétrolière aux multinationales étrangères, à des conditions très favorables ; des licenciements massifs dans le secteur public ; la destruction de tous les programmes sociaux ; la privatisation de la santé et de l’éducation publiques ; un « budget équilibré », etc. C’est un programme complètement réactionnaire dans les domaines économique et social.

Pour mettre en œuvre un tel programme, un gouvernement de Guaidó devrait écraser la résistance des travailleurs et des paysans, supprimer leurs droits démocratiques, attaquer les syndicats et organisations communautaires, arrêter leurs dirigeants. Les gangs réactionnaires – qui se sont illustrés à plusieurs reprises, ces dernières années – attaqueraient brutalement les militants chavistes.

Tous les socialistes, communistes, anti-impérialistes – et même, tous les démocrates conséquents – doivent s’opposer de toutes leurs forces à ce coup d’Etat. Il n’y a pas de place, ici, pour les vacillations. Face à une agression impérialiste flagrante, il n’est pas possible d’adopter une position de « ni, ni ».

La situation a été aggravée par les vacillations de Maduro et de la bureaucratie du PSUV, qui ont sans cesse cherché des compromis avec l'impérialisme et la classe dirigeante vénézuélienne. La poursuite de cette politique aurait des conséquences désastreuses.

La tentative de coup d’Etat doit être combattue en mobilisant les travailleurs et les paysans révolutionnaires. Il faut frapper l’impérialisme et ses agents vénézuéliens – les banquiers, capitalistes et grands propriétaires terriens. Les milices doivent être renforcées, armées et développées dans les quartiers ouvriers, les usines et les communautés paysannes.

Guaidó a ouvertement appelé à un coup d’Etat, a soutenu la saisie des avoirs vénézuéliens et a demandé aux Américains d’intervenir militairement. Il trahit le peuple vénézuélien. Il doit être arrêté et jugé. L’Assemblée Nationale, qui participe activement à la tentative de coup d’Etat, doit être fermée.

Les multinationales des pays impliqués dans le coup d’Etat doivent être expropriées, tout comme les avoirs des oligarques vénézuéliens qui participent à cette nouvelle offensive contre-révolutionnaire. Les grandes propriétés terriennes doivent être transférées aux paysans. L’ensemble de ces grands leviers économiques doivent être placés sous le contrôle démocratique des travailleurs et des paysans, dans le cadre d’un plan de production démocratique qui permettra de résoudre la crise actuelle et de répondre aux besoins les plus urgents des masses vénézuéliennes.

La Tendance Marxiste Internationale s’engage à intensifier sa campagne Pas touche au Venezuela ! au sein du mouvement ouvrier et de la jeunesse du monde entier. Nous appelons toutes les forces de gauche, les syndicats et organisations de la jeunesse à rejoindre cette campagne.

Pas touche au Venezuela !
Non au coup d’Etat ! Non à la guerre impérialiste !
Exproprier les impérialistes et l’oligarchie !
Travailleurs du monde entier, unissez-vous !

HOV 720x720

Une tentative de coup d’Etat est en cours au Venezuela, à l’initiative de l’opposition réactionnaire et en concertation avec plusieurs puissances impérialistes. Le 23 janvier, le député Guaido s’est auto-proclamé « Président en charge de la République ». Donald Trump a immédiatement reconnu Guaido comme « Président du Venezuela par intérim ». Le Secrétaire général de l’Organisation des Etats Américains (OEA), une organisation dominée par les Etats-Unis, a également soutenu les putschistes.

Face à cette interférence impérialiste, le Président Nicolas Maduro a annoncé la rupture de ses relations avec les Etats-Unis, donnant 72 heures aux diplomates américains pour quitter le Venezuela. A quoi Guaido a répondu par un communiqué appelant toutes les missions diplomatiques à poursuivre leurs activités. Dans le même temps, le Républicain et réactionnaire notoire Marco Rubio a proposé d’expulser les diplomates vénézuéliens en activité sur le territoire américain.

Lucha des Clases, la section vénézuélienne de la TMI, n’a jamais caché ses profonds désaccords avec la politique de Maduro, qui cherche vainement la conciliation avec la bourgeoisie vénézuélienne, ce qui a pour conséquence de placer le poids de la crise sur les travailleurs et les pauvres, de paralyser l’initiative révolutionnaire des masses, de miner les conquêtes de la révolution bolivarienne et, au final, de faciliter le travail des forces réactionnaires.

En même temps, nous rejetons catégoriquement le coup d’Etat fomenté par Trump-Bolsonaro-Almagro et ses laquais du Cartel de Lima. D’un point de vue économique, social, politique et démocratique, le retour au pouvoir de l’opposition réactionnaire serait une catastrophe pour la masse de la population. Le « plan de transition » élaboré par l’Assemblée Nationale parle ouvertement de privatiser toutes les entreprises publiques et de licencier un grand nombre de fonctionnaires – entre autres mesures clairement anti-ouvrières et pro-capitalistes.

Seule l’énergie révolutionnaire des travailleurs et des paysans pauvres peut garantir la défaite du coup d’Etat. Des milices doivent se constituer dans tous les quartiers et toutes les usines. Celles-ci doivent être placées sous le contrôle des travailleurs. Les latifundias doivent être occupées et défendues par des Brigades de défense populaires, qui existent déjà dans différents Etats du pays.

Pour combattre le coup d’Etat, les capitalistes et banquiers qui le soutiennent et le financent doivent être expropriés. Toutes les grandes entreprises et multinationales impliquées dans le coup d’Etat doivent être expropriées et nationalisées. Toutes les entreprises paralysées ou semi-paralysées doivent être placées sous le contrôle démocratique des travailleurs, sur la base d’un plan de production démocratique, pour satisfaire les besoins du plus grand nombre. Assez de concessions aux capitalistes ! Assez de vaines négociations, conciliations et autres « pactes » avec la bourgeoisie, qui soutient le coup d’Etat !

Nous en appelons aux travailleurs du monde entier pour qu’ils se mobilisent contre ce coup d’Etat réactionnaire et impérialiste. Des rassemblements doivent être organisés devant les ambassades et consulats américains, dans tous les pays.

Pas touche au Venezuela !
Exproprier la bourgeoisie !
Yankees, go home !

HOV

Le 20 mai dernier, Nicolas Maduro a été élu pour un nouveau mandat présidentiel au Venezuela. A quoi peut-on s’attendre ?

La majorité de l’opposition réactionnaire, avec l’entier soutien de Washington et Bruxelles, a appelé à boycotter les élections, ce qui a mené à une grande abstention dans les quartiers où vivent les classes moyennes et supérieures. Leur demande d’annulation des élections a été reprise par les gouvernements de droite de ces régions. Cela signifie que de nombreux travailleurs et habitants des quartiers pauvres ont vu dans le vote une façon de contrer cette ingérence éhontée des impérialistes. Malgré tout, la participation a été beaucoup plus faible que lors des élections précédentes. Le principal problème est la profonde crise économique ; la plupart des Vénézuéliens doutent de la capacité du gouvernement à la résoudre.

Henri FalcónQuelques heures après la fin du vote, le Conseil National Electoral annonçait les premiers résultats officiels de l’élection présidentielle. Avec un dépouillement de 92 %, 8 603 336 personnes avaient exprimé leur voix, soit une participation de 46,01 %, qui devait ensuite s’élever à 48 % après dépouillement complet. 67 % (5 823 728 voix) ont voté pour Maduro, 21 % pour le candidat de l’opposition Henri Falcón [Photo] (1 820 552 voix), 10 % pour le prêtre évangéliste Bertucci (925 042 voix) et 0,4 % (soit 34 614) pour le moins connu Quijada, qui se présentait lui-même comme candidat de l’opposition en provenance du camp chaviste.

A l’opposé des discours des médias internationaux sur les « irrégularités massives » (BBC), l’« auto réélection » de Maduro (El Pais) et sur les « élections truquées » (Financial Times), l’élection s’est déroulée dans des conditions normales, sans incident, et en présence d’observateurs internationaux, dont l’ancien président espagnol Zapatero. Les Nations Unies et l’Union Européenne ont également été appelées à envoyer des observateurs sur place, ce qu’elles ont refusé. Elles déclareront maintenant qu’il y a eu des « irrégularités massives » alors qu’elles n’étaient pas sur place pour en constater.

L’hypocrisie de la droite

Les élections ont eu lieu sur fond d’attaques constantes de l’opposition réactionnaire et de l’impérialisme, qui tentaient de les faire annuler. Depuis le jour de leur annonce, les Etats-Unis et l’Union européenne avaient immédiatement annoncé qu’ils ne reconnaîtraient pas la légitimité du scrutin et exigeaient sa suspension. Le groupe de Lima s’est associé à eux : il s’agit d’une bande de gouvernements latino-américains de droite, constituée pour publier des déclarations conformes à la politique impérialiste américaine, quand ils ne peuvent pas obtenir une majorité à l’Organisation des Etats Américains ou dans d’autres institutions officielles. Les prétendues préoccupations autour de garanties démocratiques de la part de l’Argentine, du Brésil, de la Colombie, du Mexique et du Honduras sont totalement hypocrites. Aucun de ces gouvernements n’a sourcillé lors de l’exécution extrajudiciaire de Maldonado, activiste pour les droits des indigènes en Argentine, ni pour les centaines de milliers de déplacés et de disparus en Colombie, ni pour l’implication de l’Etat dans la disparition des 43 étudiants d’Ayotzinapa au Mexique, ni pour la flagrante fraude électorale au Honduras il y a quelques mois à peine.

Les partis réactionnaires d’opposition au Venezuela – regroupés maintenant dans le Frente Amplio Venezuela Libre (FAVL) [front large pour la libération du Venezuela], qui a passé six mois l’an dernier à mener une campagne terroriste et violente pour demander la tenue d’élections anticipées – ont appelé au boycott de ces élections. Elles ont eu lieu exactement un an après que des violents supporters de ces messieurs dames ont mis le feu à un jeune chaviste, noir de peau, Orlando Figuera, qui a succombé à ses blessures. Cet incident suffit à dire tout ce qu’il faut savoir sur le réel caractère réactionnaire, oligarchique, pro-impérialiste et raciste de l’opposition vénézuélienne.

La poursuite du processus électoral a apporté une réponse claire à ces forces. L’opposition vénézuélienne a subi un sévère revers l’an passé et est maintenant divisée et démoralisée. Toutes les tentatives faites pour mobiliser la rue en prévision du 20 mai ont lamentablement échoué. A l’approche du jour des élections, un nombre croissant de dirigeants de l’opposition a rompu avec le FAVL et appelé à voter pour Henri Falcón, soutenu par son propre parti ainsi que par le MAS et le COPEL. En vain. La participation a été extrêmement faible dans les quartiers aisés des grandes villes – des bastions traditionnels de l’opposition – où la plupart des bureaux de vote étaient, soit complètement vides toute la journée, soit très peu fréquentés.

Bien évidemment, Henri Falcón, fidèle à la tradition de l’opposition vénézuélienne quand elle perd une élection, a crié à la fraude – évoquant 900 cas d’irrégularités –, indiqué qu’il ne reconnaissait pas le résultat et appelé à de nouvelles élections en octobre. C’est risible. Il est clair pour tout le monde qu’il n’a pas réussi à mobiliser la base de l’opposition, qui a largement suivi l’appel au boycott du FAVL, selon les instructions de Washington.

Les travailleurs et les pauvres contre l’impérialisme

La participation a été plus élevée dans les régions où vivent les travailleurs et les pauvres, bases traditionnelles de soutien à la révolution bolivarienne. Nombreux sont ceux qui ont voté en réponse à la campagne scandaleuse de l’impérialisme et de l’opposition pour l’annulation des élections. Beaucoup ont également voulu défendre ce qu’il reste de la révolution. Il est évident que si l’opposition arrivait au pouvoir, elle détruirait tout et ferait payer aux travailleurs et aux pauvres le prix de la crise, avec un programme brutal d’« ajustements » façon FMI. Néanmoins, la participation dans les quartiers traditionnellement chavistes a été plus basse que d’habitude. Un décompte complet des votes n’a pas encore été publié, mais de nombreux indices corroborent ceci : des files dans de nombreux bureaux de vote – délibérément ignorées par les médias internationaux – mais pas aussi longues ni persistantes qu’elles ont pu l’être lors des élections passées. Et ceci malgré les tentatives sans précédent du PSUV et de l’Etat d’utiliser leurs appareils pour mobiliser le vote chaviste. Le vote pro Maduro représente environ 30,5 % du total des voix, alors qu’il était de 40 % lors de sa première élection en 2013. Ceci représente une perte de 1,5 million de voix, alors que le nombre d’électeurs potentiels a augmenté de 2 millions.

Il existe toujours un noyau dur de vote chaviste, qui exprime à chaque élection sa loyauté envers la révolution bolivarienne et la lutte pour le socialisme, incarnée par Chavez. Mais il devient de plus en plus difficile à ce noyau de mobiliser d’autres couches. Au sein de l’aile gauche du mouvement chaviste, les critiques grandissent contre les dirigeants et la bureaucratie, qui se sont montrés incapables de résoudre la situation économique et font obstacle à l’initiative révolutionnaire des masses.

Les communes rurales ont été un des principaux lieux de conflits. Au cours des derniers mois, des groupes de paysans organisés en communes– sur des terres officiellement fournies – ont été expulsés à plusieurs reprises. Ces faits ont été perpétrés par la police locale, la garde nationale, des juges locaux et des fonctionnaires de l’Institut national des terres (INTI), sur l’injonction des propriétaires terriens, et le plus souvent en lien avec les affaires politiques et autres business de l’appareil d’Etat.

Commune rurale Venezuela

Lors des élections, des hauts fonctionnaires du gouvernement sont intervenus pour renverser cette tendance et Maduro a même promis qu’il n’y aurait plus d’expulsions. L’une des principales organisations paysannes révolutionnaires, le CRBZ, a appelé à voter Maduro tout en maintenant ses critiques de la bureaucratie et de l’appareil d’Etat. Ce fut également le cas de El Maiza Commune à Lara, où l’Etat n’a toujours pas reconnu la victoire du porte-parole de la commune, Angel Prado, contre le candidat officiel du PSUV lors des élections municipales de décembre 2017.

L’état d’esprit de nombreux soutiens chavistes a été rapporté dans une courte interview donnée à la BBC Mundo : « Nous allons lui [Maduro] donner un vote de confiance. Si cela ne marche pas, c’est fini. Je vais [aux urnes] avec espoir, mais si la situation du pays ne s’améliore pas, les gens prendront la rue. Je vais voter pour Maduro car il a donné sa parole que les choses s’amélioreront. S’il comprend ce que “donner sa parole” veut dire, il a intérêt à tenir sa promesse. »

L’alternative révolutionnaire comme sortie de crise

Le problème est que, compte tenu de leur bilan, Maduro et les dirigeants bolivariens sont incapables et ne souhaitent pas mettre en œuvre les mesures nécessaires pour s’attaquer à la crise économique. Plutôt que de s’y mettre à bras le corps en expropriant les capitalistes, les banquiers et les propriétaires terriens, le gouvernement fait constamment appel à eux pour investir. Alors qu’il dénonce le rôle qu’ils jouent dans la « guerre économique », le gouvernement leur octroie des prêts et un accès favorisé au dollar. Dans son discours de victoire, Maduro, une fois de plus, a appelé l’opposition à revenir à la table des négociations. Appel qu’il a même étendu jusqu’à l’impérialisme américain…

Dans les prochaines semaines, nous assisterons à une intensification de la campagne impérialiste contre le gouvernement vénézuélien et à de plus grandes sanctions. Le secrétaire d’Etat John Sullivan, s’exprimant en Argentine, a indiqué que les Etats-Unis envisageaient des sanctions pétrolières qui paralyseraient l’économie vénézuélienne. Ils espèrent faire tomber le gouvernement en exacerbant la crise et en asphyxiant l’économie du pays.

Pour les masses bolivariennes, le problème principal sera la grave crise économique, qui a provoqué une hyperinflation, un effondrement du pouvoir d’achat et les pénuries de produits de base. Maduro a promis de s’attaquer à ces problèmes après les élections et de redonner au pays une « prospérité économique ». Ces promesses ne seront pas tenues et les couches avancées des pauvres et des travailleurs seront poussées à chercher une alternative capable de faire face à l’impérialisme tout en résolvant la crise économique.

Il n’y a en réalité que deux solutions possibles. Une, plébiscitée par toute l’opposition (avec le soutien de l’impérialisme), est un plan d’ajustement brutal incluant des coupes dans les dépenses sociales et étatiques, l’arrêt des subventions et des colis de nourriture, la privatisation des entreprises d’Etat et des ressources naturelles, et des licenciements massifs dans les secteurs public et privé. Ce serait un désastre total pour les travailleurs et entraînerait une énorme régression des droits démocratiques.

Chavez HeritageL’autre option serait de nationaliser tous les leviers fondamentaux de l’économie, sous le contrôle des travailleurs, et de les utiliser pour produire dans l’intérêt du peuple, et pas pour le profit d’une poignée de parasites constituant l’oligarchie.

La politique en demi-teinte du gouvernement Maduro, qui concède toujours plus à la classe dirigeante, ne mène qu’à la démoralisation, au scepticisme, à l’aggravation de la crise et, finalement, d’une manière ou d’une autre, à un plan d’ajustement brutal qui s’abattra sur le dos des travailleurs.

Pour rompre avec cette situation, l’avant-garde révolutionnaire doit se donner pour principal objectif de construire une véritable alternative révolutionnaire fondée sur un programme socialiste, qui offre une solution dans l’intérêt des travailleurs. C’est la tâche du moment.

Les Vénézuéliens sont confrontés à une situation économique qui s’est dramatiquement détériorée durant Noël. Les problèmes déjà présents ont empiré : les prix se sont envolés hors de tout contrôle, le système de transport s’est effondré, et les pénuries (de nourriture, de combustible, et de cash) s’accentuent, menant à des manifestations diverses et à des pillages.

L’élection de l’Assemblée Nationale Constituante, en juillet 2017, avait soulevé de nombreux espoirs parmi les masses bolivariennes, qui attendaient des mesures pour résoudre les problèmes économiques auxquels elles font face. Elles ont été cruellement déçues. Les lois, les projets et les annonces à grand bruit se sont succédé, alors que, la situation empire sur le terrain.

Manifestations et pillages

Pour encourager la participation aux élections municipales du 10 décembre, le gouvernement et la direction du PSUV avaient lancé toutes sortes de promesses (distribution de colis alimentaires par les CLAPs, livraisons spéciales de nourriture pour Noël, etc.), mais beaucoup n’ont pas été tenues. Suite à l’exaspération engendrée par cette situation, des manifestations ont éclaté avant Noël, sous forme de petits rassemblements de voisinage à travers tout le pays. Les habitants sont sortis spontanément pour protester contre l’augmentation du prix des transports, le manque de nourriture, les coupures d’électricité, le manque de combustible… Ces manifestations se sont intensifiées durant la dernière semaine de 2017 et, dans certains cas, des tentatives de pillages ont été rapportées. Les Vénézuéliens protestaient contre l’absence de livraison des colis de nourriture des CLAP subventionnés par le gouvernement ainsi que du traditionnel pernil (jambon) de Noël. Il faut souligner que ces manifestations ont principalement eu lieu dans des zones chavistes et n’avaient rien à voir avec l’opposition de droite. Elles se sont produites dans les Etats de Aragua, Nueva Esparta, Bolívar, Anzoátegui, Portuguesa, Guárico, Aragua, Táchira et à Caracas, la capitale.

La situation s’est détériorée avec la nouvelle année : il y a eu des cas de pillage d’entrepôts de nourriture et de supermarchés, ainsi que des attaques contre des convois de nourriture. A Cagua, dans l’Aragua, les habitants ont dressé des barricades et réquisitionné la nourriture des camions qui circulaient. Des pillages (ainsi que d’autres formes de protestation) se sont produits dans au moins six Etats, tous liés au manque de nourriture et à l’absence d’autres produits de base.

Les incidents les plus graves ont eu lieu sur la Panamericana, au nord de Merida, les 11 et 12 janvier. Dans plusieurs villes, des supermarchés ont été pillés, des convois attaqués, et dans un cas, des centaines de

personnes se sont introduites dans une ferme, tuant et emportant au moins cent bœufs. Durant ces incidents, quatre personnes ont été tuées et quinze blessées. Les circonstances sont encore floues ; certains rapports font état d’hommes lourdement armés (peut-être des paramilitaires) qui ont ouvert le feu contre les pilleurs d’Arapuey.

Le 16 janvier, un camion qui transportait des poulets vivants est tombé dans un blocage routier à Villa de Cura, dans l’Aragua. Des habitants ont surgi et ont pillé le camion, emportant les poulets. Le 18 janvier, un bateau de pêche plein de sardines a été vidé avant de pouvoir atteindre le rivage de Margarita Island.

Il est clair que dans toute situation de manifestations et de pillages spontanés des éléments criminels se retrouvent impliqués, avec leurs propres motifs. On a ainsi assisté à des pillages de magasins de liqueur et d’autres dont la raison n’était à l’évidence pas la quête désespérée de nourriture. Néanmoins, il faut noter que ces événements ont eu lieu en très grande majorité dans des zones pauvres et ouvrières qui supportent traditionnellement la révolution bolivarienne, et qu’ils ont été motivés par des revendications légitimes ainsi que par le manque de nourriture. Ils constituent l’expression désespérée de la colère des gens ordinaires et des pauvres. L’opposition a rapidement dénoncé les pillages et s’est clairement prononcée pour la défense de la propriété privée.

L’échec des tentatives violentes de l’opposition pour renverser le gouvernement entre mars et juillet 2017, ainsi que le reflux consécutif au sein du mouvement contre-révolutionnaire, ont probablement encouragé les gens à protester plus ouvertement, du fait qu’il n’y a plus le risque d’être assimilé à une opposition qu’ils détestent.

Augmentation des prix

L’augmentation brutale des prix après le Nouvel An a joué un rôle majeur dans le déclenchement des manifestations et s’est posée comme le principal problème que les travailleurs doivent affronter. Quelques exemples : la farine de maïs a augmenté de 15 000 bolivars par kilo en octobre à 60 000 bolivars ; 500 grammes de margarine sont passés de 65 000 bolivars en décembre à 120 000 en janvier ; un kilo de viande coûtait 26 000 bolivars en septembre et maintenant 280 000 bolivars ; le poulet était vendu à 25 000 bolivars le kilo en octobre, 85 000 bolivars en décembre et 180 000 bolivars maintenant.

Ces augmentations ont eu lieu alors que le gouvernement annonçait une augmentation du salaire minimum. Il était de 177 000 bolivars, auquel il faut ajouter des tickets alimentaires d’une valeur de 279 000 bolivars (soit un total de 465 000 bolivars) ; il a augmenté à 248 000 bolivars plus des tickets d’une valeur de 549 000 bolivars (soit un total de 797 000 bolivars). Mais ces fréquentes augmentations de salaire sont annulées par l’inflation. Dans ce cas particulier, lorsque l’annonce de l’augmentation a été faite, les supermarchés ont retiré leurs produits pour les remettre en vente, au double de leur prix, une fois entrée en vigueur. [1]

En plus de la hausse des salaires, le gouvernement a annoncé une série d’avantages spéciaux et de bonus pour Noël, le Nouvel An et la nativité, à destination de 8 millions de familles. Dans son discours du Nouvel An à l’Assemblée constituante, le président Nicolas Maduro a annoncé une nouvelle série de mesures, dont une qui bénéficierait à 4 millions de familles (320 000 bolivars pour une famille de deux personnes, à 1 million de bolivars pour une famille de six personnes) ainsi qu’une nouvelle allocation de grossesse de 700 000 bolivars par mois.

Le problème de ces mesures est double : premièrement, elles ne s’attaquent ni à l’approvisionnement ni à la production ; deuxièmement, elles sont financées par l’émission de monnaie supplémentaire, ce qui en retour alimente l’inflation.

L’augmentation de la masse monétaire a atteint des niveaux inégalés : entre les élections du 10 décembre et la fin de l’année, la mesure M2 de la masse monétaire a augmenté de 26 %. Entre les élections régionales du 15 octobre et la fin de l’année, de 163 % ; entre l’élection de l’assemblée constituante et la fin de l’année, de 466 %. Au cours de l’ensemble de l’année 2017, la masse monétaire a bondi de 1 121 % [2] ! Malgré les protestations des économistes présents au sein du gouvernement, il est clair que l’augmentation massive de la masse monétaire dans un contexte de forte contraction économique est une des causes principales de l’actuelle spirale d’hyperinflation.

Les raisons des pénuries

En parallèle, l’approvisionnement du marché vénézuélien a été touché par une série de facteurs, au rang desquels l’effondrement de l’économie vénézuélienne pour la quatrième année consécutive. Selon les chiffres officiels, la croissance du PIB était de - 3,9 % en 2014 ; - 6,2 % en 2015 et - 16,5 % en 2016 [3]. Bien qu’il n’y ait pas encore de chiffres officiels pour 2017, le CEPAL avance - 9,5 %, ce qui représenterait une contraction de l’économie d’au moins un tiers depuis 2014.

Le principal facteur de cet effondrement est bien évidemment la chute du prix du baril de pétrole, de 100 dollars le baril en 2013 à 35 dollars en 2016. Le léger rétablissement à 56 dollars fin 2017 a été contrebalancé par la chute de la production due à un manque d’investissement dans la maintenance et le renouvellement des équipements (ainsi qu’à un sabotage ouvert et à la corruption). La production vénézuélienne de pétrole a chuté de 2,8 millions de barils par jour à 1,6 million en décembre 2017. Pour un pays qui tire 96 % de ses devises des revenus de l’exportation du pétrole, cela a de lourdes conséquences sur les finances publiques et la capacité du pays à importer des aliments et d’autres produits de base.

Maduro

De leur côté, les réserves en devises étrangères ont fondu de 30 milliards de dollars en 2012 à 22 milliards en 2014 et moins de 10 milliards aujourd’hui. Les importations du pays se sont effondrées, d’une valeur totale de 57 milliards de dollars en 2013 à 47 milliards en 2014, 33 milliards en 2015 et 16 milliards en 2016 [4]. Les chiffres pour 2017 ne sont pas encore publiés, mais l’on peut s’attendre à une chute supplémentaire. Pendant ce temps, les revenus décroissants en devises étrangères ont été utilisés par le gouvernement pour rembourser ponctuellement ses obligations étrangères. Dans un discours du 8 janvier, au cours duquel le président Maduro a tiré un bilan de 2017, il a expliqué que le Venezuela avait payé 74 milliards de dollars de dette étrangère.

C’est bien évidemment un facteur majeur créant de la pénurie, qui à son rend la contrebande, le racket, le marché noir et l’ensemble de la corruption si rentables. Y sont impliqués des membres du gouvernement, des capitalistes et des officiers militaires travaillant dans l’appareil d’Etat et dans les compagnies publiques à tous niveaux. L’enrichissement obscène de ces individus sans scrupules ajoute de la rage aux gens ordinaires qui doivent déjà endurer les conséquences des pénuries.

Confronté à l’effondrement des revenus du pétrole, le gouvernement a eu recours à la planche à billets. Selon les chiffres officiels, le déficit était de 8,8 % du PIB en 2014, 10,3 % en 2015 et 17 % en 2016. Et la masse monétaire a augmenté de 64 %, 100 % et 156 % sur ces trois années, avec un record de 1 121 % en 2017 [5].

Les Etats-Unis ont rajouté de l’huile sur le feu de l’économie vénézuélienne en lui imposant des sanctions ciblées, qui affectent principalement la capacité du gouvernement à contracter de nouvelles dettes ou à renégocier la dette actuelle, ainsi que la capacité des compagnies étrangères à payer le gouvernement vénézuélien. Le but est d’asphyxier le gouvernement, jusqu’à la soumission.

L’absence d’une monnaie forte a augmenté la valeur du dollar, qui est devenu un objet de spéculation. Le système officiel grâce auquel le gouvernement alloue des dollars aux importateurs à un taux préférentiel est devenu une forme extrêmement lucrative de fuite des capitaux. Les importateurs, de mèche avec les représentants du gouvernement, recevaient un dollar pour 10 bolivars à une époque où le prix du marché noir était de 10 000 bolivars pour un dollar. Bien entendu, plutôt que d’utiliser cet argent pour importer, les dollars préférentiels subventionnés par le gouvernement se retrouvaient au marché noir ou sortaient directement du pays. Selon certains calculs, 300 milliards de dollars ont ainsi été siphonnés sur une période de 15 ans par les capitalistes, les hommes d’affaires et les membres corrompus du gouvernement.

Ce système s’est presque effondré mais n’a été remplacé par aucun autre. L’année dernière, le gouvernement a organisé des ventes aux enchères de dollars à travers le système DICOM, où le taux de change a atteint 10 000 bolivars par dollar ; mais sur le marché noir, ce taux était alors de 23 000 bolivars. DICOM a été fermé en septembre car le gouvernement n’était plus capable d’y investir de l’argent. Depuis, le taux de change du dollar sur le marché noir a bondi à plus de 200 000 bolivars.

Alors que le gouvernement dénonce la manipulation des prix du marché noir par ceux qui essayent de ruiner l’économie vénézuélienne, à travers le site DollarToday, il est clair que sans une certaine demande pour ces dollars, même à un tel prix, personne n’accepterait une telle manipulation du marché. Nous assistons à une dévaluation massive du bolivar, qui est bien sûr l’autre face de l’inflation. En retour, cela aggrave l’inflation dans un pays qui importe la majorité des biens qu’il consomme.

Travailleurs de Petrocedeño

En plus de ces problèmes, la crise économique a eu un impact négatif sur toute une série de secteurs, des transports publics au système de santé. L’ensemble de ces éléments a poussé un nombre important de Vénézuéliens à émigrer vers d’autres pays d’Amérique Latine, l’Europe et les Etats-Unis. Bien évidemment, ce phénomène concerne les classes moyennes et les travailleurs qui ont assez d’argent pour payer un billet d’avion et déménager.

Contrairement à ce que les médias capitalistes clament, la crise économique au Venezuela n’a rien à voir avec un « échec du socialisme ». Bien au contraire. En 2003, le président Chavez avait introduit une série de mesures visant à réguler le capitalisme après un lock-out pétrolier extrêmement destructeur, organisé par l’opposition réactionnaire et la grande industrie. Le contrôle du change et des prix a été mis en place pour empêcher la fuite des capitaux et protéger les familles travailleuses de l’inflation et de la spéculation. Le gouvernement avait également introduit une interdiction de licenciements. Mais le capitalisme ne peut pas être régulé ; ses représentants ont trouvé différentes façons, légales et illégales, de contourner les contrôles existants.

Tant que le gouvernement possédait encore de nombreux fonds, l’impact négatif de ces contrôles ne se voyait pas. Le gouvernement pouvait utiliser les revenus des exportations de pétrole pour importer de la nourriture et garantir l’approvisionnement en aliments subventionnés pour les travailleurs et les pauvres. Dès que le prix du pétrole s’est effondré, le gouvernement n’a pu se permettre de continuer. Si les capitalistes refusent de produire des aliments – car ils devront les vendre à des prix régulés – et si le gouvernement ne peut plus importer de la nourriture pour la vendre à ces prix régulés, les pénuries éclatent.

Ce qui a échoué au Venezuela, ce n’est pas le socialisme, mais la tentative de réguler le capitalisme pour le mettre au service des travailleurs. Il n’y a que deux solutions à cette crise : la première serait de lever tous les contrôles et laisser l’économie capitaliste fonctionner « normalement », ce qui veut dire pour le profit privé. Ce serait un désastre total pour les travailleurs et les pauvres. La nourriture reviendrait sur les étals des supermarchés mais à des prix inabordables. On assisterait également à des licenciements massifs dans les secteurs privé et public.

Jusque-là, la politique du gouvernement a été une combinaison de concessions au secteur privé (les prix régulés ont presque été abolis et vont maintenant être remplacés par des prix « convenus »), d’impression massive de monnaie pour subventionner l’augmentation des salaires, et de subventions alimentaires ciblées (à travers les colis alimentaires des CLAPs). Cette politique ne résout pas le problème des travailleurs, qui voient leurs revenus dévorés par l’inflation, mais ne satisfait pas non plus la classe capitaliste, qui demande une levée complète de toutes les régulations et le redémarrage de la production.

Impact politique

La crise économique et l’incapacité du gouvernement à y faire face, en dépit de grandioses annonces, a eu un impact sévère sur le soutien à la révolution bolivarienne. C’est ce qui a mené à la défaite aux élections de l’Assemblée nationale en décembre 2015. La caractéristique de 2017 est que, sous le fouet de la contre-révolution, l’esprit révolutionnaire des masses s’est ravivé, et s’est notamment exprimé lors de la participation massive à l’élection de l’Assemblée constituante.

Un noyau dur de la population, environ 30 %, reste fidèle à l’esprit révolutionnaire du chavisme. Malgré sa violence campagne au début de 2017, l’opposition n’a pas réussi à faire pencher les travailleurs et les pauvres de son côté. Guidées par un instinct de classe très sain, les masses savaient que l’arrivée au pouvoir d’une opposition réactionnaire et pro-impérialiste n’aurait pas résolu les problèmes de pénurie.

La bureaucratie du PSUV et de l’Etat en a tiré de mauvaises conclusions. Elle a cru que le soutien des masses était acquis, et a voulu les mobiliser à travers deux campagnes électorales supplémentaires : pour les gouverneurs régionaux en octobre et pour les conseils municipaux en décembre. Entre temps, aucun des problèmes auxquels la population est confrontée n’a été traité. La corruption rampante, l’inflation galopante et les pénuries n’ont pas faibli.

A l’occasion des élections d’octobre et de décembre, il y avait déjà un courant d’opposition critiquant la direction pour avoir échoué, une nouvelle fois, à s’attaquer à la crise économique. Les membres officiels du PSUV ont traversé ces élections grâce au clientélisme : les candidats PSUV ont promis des colis alimentaires CLAP et d’autres subventions pour mobiliser leur électorat. Aux yeux de militants révolutionnaires, ces pratiques sont répugnantes ; elles sont identiques à celles qu’Accion Democratica (la social-démocratie, NDT) utilisait sous la Quatrième république pour acheter des voix.

En outre, lors des élections municipales, le PSUV et l’appareil d’Etat ont eu recours à des méthodes non démocratiques pour étouffer les tentatives de certains candidats bolivariens de gauche [6] qui s’opposaient aux candidats officiels. Cela concerne un nombre isolé de cas mais a eu un profond impact sur l’avant-garde révolutionnaire impliquée dans ces campagnes, à Caracas et dans une demi-douzaine d’autres conseils locaux (principalement en zones rurales).

Angel Prado : candidat bolivarien aux élections municipales, contre le PSUV

Les dirigeants du parti sont vus de plus en plus comme d’impitoyables bureaucrates qui ne veulent rester en place que par amour du pouvoir et qui sont incapables de résoudre les problèmes auxquels les masses sont confrontées. Ce qui nourrit également la vague actuelle de protestations.

Alors que les masses souffrent de la crise, le gouvernement s’engage dans des discussions avec l’opposition réactionnaire, en République Dominicaine. Nombreux sont ceux qui se demandent pourquoi le gouvernement est en train de parler à ces terroristes plutôt que de dialoguer avec les pauvres, les travailleurs, les paysans… Et la peur est grande d’une répétition de l’infâme pacte de Punto Fijo de 1958 : un accord entre élites pour partager le pouvoir.

Les discussions en République Dominicaine sont centrées sur un certain nombre de questions : l’une est la reconnaissance de l’Assemblée constituante par l’opposition en échange de la reconnaissance de l’Assemblée nationale par le gouvernement. Une autre concerne les conditions dans lesquelles aura lieu l’élection présidentielle de 2018, et la composition du Conseil National Electoral qui la supervisera.

On ne peut dire avec certitude si un accord sera trouvé. Le gouvernement a courtisé une partie de l’opposition (Un Nuevo Tiempo de Manuel Rosales) ; d’autres, comme l’Accion Democratica de Ramos Allup, sont tellement prêts à tout pour partager le pouvoir, qu’ils pourraient également être inclus ; d’autres sont totalement opposés à tout accord avec le gouvernement et soutiennent le renversement violent de la « dictature » (surtout ceux autour de Maria Corina Machado). Entre ces deux ailes se trouve le reste de la MUD (Table d’Unité Démocratique), composé de partis qui vacillent d’une position à l’autre. En réalité, pour la plupart des dirigeants de l’opposition réactionnaire, ce n’est pas une question de principes mais de tactique. Ils souhaitent renverser le gouvernement de Maduro et prendre le pouvoir ; s’ils pensent pouvoir y arriver par la force (par des méthodes terroristes, une intervention impérialiste, un coup d’Etat militaire), ils prendront cette voie. Pour le moment, comme ils sont faibles et divisés, et que leurs rangs sont démoralisés par les défaites de l’an passé, ils pencheront sans doute vers une sorte d’accord avec le gouvernement en espérant battre Maduro lors d’une élection. Si ce chemin se bloque, ils n’hésiteront pas à retourner aux violences de rue et au terrorisme.

Pendant ce temps, une autre section de la classe dirigeante fait campagne pour l’homme d’affaires Lorenzo Mendoza, le propriétaire du monopole de distribution Polar, pour une candidature à l’élection présidentielle de 2018. Ce serait un candidat semblable à Macron, prétendant représenter le « centre », mettant en avant « son expérience en entreprise », et donnant l’apparence d’une solution « non partisane » ou « transversale » aux problèmes de la société. Ils espèrent qu’un tel candidat, non entaché des violences de l’opposition, pourrait conquérir une partie de ceux qui se trouvent entre les deux camps, même une section des chavistes mécontents.

La lutte des travailleurs

Au cours des dernières semaines, nous avons observé de très notables signes d’un renouveau de la lutte des travailleurs. Le 9 novembre, un groupe de travailleurs et de syndicalistes a occupé les locaux du ministère du travail, exigeant une solution à leurs problèmes. En janvier, des travailleurs de la cimenterie nationalisée Vencemos, à Anzoategui, sont descendus dans la rue pour protester contre la demi-paralysie de leur entreprise, craignant pour l’avenir de leur emploi. Encore plus significatif : une manifestation des travailleurs pétroliers de Petrocedeno, une joint-venture de Total, PDVSA et Statoil, qui ont demandé un complément de fin d’année car ils ne pouvaient pas survivre avec leur seul salaire. Ces travailleurs ont souligné qu’ils n’avaient rien à voir avec les guarimbos (les émeutiers de l’opposition) et qu’ils ne souhaitaient pas paralyser la production (une action qui pourrait sérieusement endommager l’économie et fait écho aux lock-out pétroliers menés par l’opposition en 2002).

Pour l’instant, ce ne sont que des cas isolés, mais ils sont symptomatiques d’une ambiance générale dans la société et de la traduction de celle-ci parmi les travailleurs. Les travailleurs et les pauvres sont ceux qui souffrent le plus de l’effondrement économique. Ils ne veulent clairement pas que l’opposition réactionnaire arrive au pouvoir, mais sont poussés dans la bataille pour défendre leur existence.

La situation est hautement inflammable et les manifestations spontanées qui ont eu lieu au début de l’année pourraient grossir et se transformer en des pillages de plus grande ampleur. Seuls les travailleurs organisés peuvent donner d’autres formes d’expression à cette colère.

Quelle voie suivre ?

En tant que marxistes, nous avons expliqué pourquoi nous ne pouvons accorder aucun soutien aux politiques de ce gouvernement. Depuis qu’il est arrivé au pouvoir, il n’a pris aucune mesure sérieuse pour combattre la crise économique. Il a au contraire insisté pour concéder toujours plus aux capitalistes (en levant le contrôle des prix, en mettant en place une nouvelle loi pour les investissements étrangers, etc), ce qui n’a aucun impact réel.

Il nous faut bien évidemment être très clairs sur un point : si l’opposition réactionnaire arrivait au pouvoir, ce serait un désastre absolu pour les travailleurs et les pauvres. Elle déverserait le fardeau de la crise économique sur les travailleurs, détruirait toutes les protections sociales et les droits qui existent encore. Au lieu d’émettre de la monnaie pour financer le déficit, elle mettrait en œuvre des coupes massives dans les dépenses publiques, détruisant ce qui reste des programmes sociaux bolivariens (misiones). Elle abrogerait immédiatement la loi contre les licenciements et licencierait massivement dans le public et le privé. Elle mettrait un terme aux colis de nourriture subventionnés des CLAPs, plongeant des millions de familles en situation difficile dans la famine pure et simple. Du point de vue des libertés démocratiques, l’opposition commencerait une chasse aux sorcières contre les activistes bolivariens et leurs organisations, détruisant tout élément qui pourrait survivre des communes, des conseils et du contrôle ouvrier.

Le gouvernement de Maduro et les dirigeants du PSUV se sont montrés totalement incapables de changer les choses. Les bureaucrates au sommet du PSUV et de l’Etat ne semblent intéressés qu’à garder le pouvoir. Les travailleurs, les pauvres et les paysans ne peuvent faire confiance qu’à leurs propres forces.

Les organisations de travailleurs et les courants de gauche de la révolution bolivarienne ont la responsabilité de proposer un programme qui offre une véritable solution à la crise économique, un programme qui sera en contradiction avec les politiques du gouvernement mais qui rejette également fondamentalement les plans de l’opposition.

Un tel programme inclurait au moins les points suivants :

- Un monopole d’Etat sur le commerce extérieur, afin qu’aucun dollar n’arrive plus dans les mains de la bourgeoisie.

- Un audit des travailleurs sur les allocations des dollars préférentiels au cours des 15 dernières années. La confiscation des propriétés et la prison pour tous ceux coupables de vol ou de mauvaise gestion (les capitalistes et les bureaucrates).

- La nationalisation et la centralisation des assurances et des banques pour que toutes leurs ressources soient mises au service d’un plan rationnel de production, sous le contrôle démocratique des travailleurs.

- La nationalisation, sous le contrôle des travailleurs, de toutes les compagnies impliquées dans l’accumulation, la spéculation et le marché noir.

- L’expropriation de toutes les grandes propriétés foncières au bénéfice des paysans organisés en communes, qui seraient responsables de l’achat des semences, des engrais, des machines…

- La nationalisation de toutes les entreprises de production, transformation et distribution alimentaires, sous le contrôle démocratique des communes de paysans, des travailleurs et des consommateurs.

- Des comités de ravitaillement révolutionnaires dans chaque quartier, avec le pouvoir de contrôler et d’organiser la distribution de nourriture sur la base des besoins.

- La suspension de tous les paiements de la dette étrangère. Les importations de nourriture et de médicaments doivent être une priorité.

- Tout le pouvoir à la classe ouvrière et au peuple organisé ! A bas la bureaucratie !

- Un appel international à tous les travailleurs et paysans d’Amérique Latine et du monde pour venir à l’aide de la révolution vénézuélienne contre l’intervention impérialiste.


[1] Toutes les informations sur l’augmentation des prix sont tirées de la déclaration de la section vénézuélienne de la TMI

[2] Banque Centrale Vénézuélienne

[3] Rapport du gouvernement vénézuélien

[4] https://www.sec.gov/Archives/edgar/data/103198/000119312517376486/d505622dex99d.htm

[5] https://www.sec.gov/Archives/edgar/data/103198/000119312517376486/d505622dex99d.htm

[6] Venezuela after the municipal elections

Lors des élections des gouverneurs régionaux, le 15 octobre, le Parti Socialiste Unifié du Venezuela (PSUV) a remporté une large victoire face à la coalition des partis de droite (la MUD). Le parti du gouvernement Maduro a remporté 18 Etats sur 23.

Cette victoire électorale du PSUV est une bonne nouvelle. Cependant, aucun problème n’est réglé. La révolution vénézuélienne est toujours gravement menacée.

Crise économique et bureaucratisme

Depuis qu’elle a partiellement perdu le contrôle de l’appareil d’Etat, en 1998 (élection de Chavez), la bourgeoisie vénézuélienne s’est efforcée par tous les moyens d’en finir avec cette révolution : en tentant un coup d’Etat (avril 2002), un lock-out patronal (décembre 2002/janvier 2003) et, depuis, en sabotant systématiquement l’économie, ce qui provoque des pénuries de biens de première nécessité et une hyper-inflation (1000 % cette année). Elle espère ainsi créer les conditions économiques d’un renversement du gouvernement, soit par la force, soit par des élections. Elle a déjà remporté une majorité à l’Assemblée nationale en décembre 2015. Son objectif n’est pas seulement la chute du gouvernement, mais la liquidation de tout ce qui reste des conquêtes de la révolution.

La situation économique est aggravée par la bureaucratie du PSUV, qui bloque les initiatives révolutionnaires de la base. Tout ceci génère une démoralisation dans les rangs « chavistes », ces dernières années. Une défaite du PSUV aux élections régionales était donc une sérieuse possibilité. Si cela ne s’est pas produit, c’est surtout grâce à l’élection de l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) par 8 millions de Vénézuéliens le 30 juillet dernier.

Les masses se sont saisies de l’ANC pour infliger une défaite à l’opposition réactionnaire. L’élection de l’ANC a été perçue comme une opportunité de pousser la direction du mouvement vers la gauche. Cela a permis la remobilisation de la base électorale chaviste. Une fois encore, les masses ont défendu la révolution – malgré le manque de médicaments, de nourriture et l’inflation galopante. Cependant, s’il n’y a pas de changement radical dans la politique économique du pays, l’enthousiasme des masses se transformera vite en son contraire.

La faillite du réformisme

Le problème central, au Venezuela, est que la révolution s’est arrêtée à mi-chemin. En dehors de l’industrie pétrolière, l’essentiel des moyens de production (y compris le secteur financier) reste entre les mains des capitalistes et des impérialistes. De même, l’appareil d’Etat échappe au contrôle des masses ; il est infesté d’ennemis de la révolution et d’éléments corrompus. Or toute l’histoire l’enseigne : on ne peut pas faire la moitié d’une révolution.

Maduro ne cesse de proposer un « compromis » à la bourgeoisie vénézuélienne. C’est comme demander à un tigre de devenir végétarien. Le gouvernement accorde aux capitalistes des dollars à des prix préférentiels, des zones sans taxe, des droits d’exploitation de l’arc minier de l’Orénoque, etc. Cela revient à transférer le poids de la crise sur les masses, pendant que les capitalistes continuent de s’enrichir. C’est une impasse et un danger mortel pour la révolution. La seule issue, urgente, c’est de mener une politique réellement socialiste, en expropriant les grands leviers de l’économie et en les plaçant sous le contrôle démocratique des travailleurs. Ainsi, les ressources du pays seront utilisées pour le bien de tous – et non plus d’une petite minorité. Sur cette base, il sera possible de construire un Etat ouvrier basé sur les conseils ouvriers et communaux.