Le 1er octobre dernier, l’association « Nous toutes » recensait 112 femmes assassinées par leur partenaire ou ex-partenaire, depuis le début de l’année. Ce bilan ne cesse de s’alourdir : en moyenne, une femme meurt tous les deux jours des suites de violences conjugales. Ces dernières années, les initiatives dénonçant les violences contre les femmes se sont multipliées, notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi dans les rues.

En réponse, le gouvernement a inauguré, le 3 septembre dernier, un « Grenelle contre les violences conjugales », dans la continuité du programme de communication et de la mise en place d’un numéro d’écoute (3919), il y a un an. Dès le lancement du Grenelle, 10 « mesures d’urgence » ont été adoptées. Elles comprennent notamment la création de 1000 places en centre d’hébergement temporaire, la réalisation d’un audit de 400 commissariats afin de « détecter des dysfonctionnements », ainsi que le recyclage de mesures préexistantes, telles que le recours au « bracelet anti-rapprochement géo-localisé » ou la possibilité de déposer plainte dans les hôpitaux.

L’hypocrisie du gouvernement

Ces mesures ne permettront ni de prévenir les violences conjugales ni de protéger efficacement les victimes. La création de 1000 nouvelles places en centre d’hébergements temporaires, pour 2020, est insuffisante au regard des besoins réels. Et aucune mention n’est faite de créations de centres de prise en charge des hommes violents – ce qui permettrait, dans certaines situations, à la femme de rester à son domicile, mais également de prendre en charge les auteurs de violences.

Au niveau légal, rien n’est prévu pour corriger des aberrations telles que l’absence d’individualisation de certaines aides sociales au sein des couples. Il est pourtant plus difficile de quitter un conjoint violent quand c’est lui qui perçoit votre RSA. Quant à l’audit dans les commissariats, il répond à ce fait brutal : certaines victimes avaient déposé des dizaines de plaintes restées sans suite. Mais on imagine mal comment l’Etat va évaluer des commissariats qui, d’ailleurs, seront sans doute prévenus. Soulignons que la loi prévoit déjà un certain nombre de dispositifs pour lutter contre les violences conjugales. Mais il manque une volonté politique pour la faire appliquer.

Surtout, le combat contre ces violences ne se joue pas uniquement sur le terrain légal. L’oppression, les meurtres et les viols de femmes, comme les violences que vivent les minorités sexuelles ou les enfants, prospèrent sur le terreau des inégalités, de la misère et de l’isolement. Dès lors, toutes les mesures de démantèlement des services publics, toutes les contre-réformes du gouvernement (loi Travail, retraites, assurance chômage, etc.) ont – ou auront – pour conséquence directe d’accroître la pauvreté et la dépendance de très nombreuses femmes. Le gouvernement fait donc semblant de vouloir éradiquer un mal qu’il nourrit lui-même par sa politique antisociale, laquelle détériore objectivement les conditions de vie de millions de femmes.

Contre les violences, il faut des moyens

Pour lutter efficacement contre les violences conjugales, un plan ambitieux devrait passer par la reconnaissance publique et le financement des organisations qui assurent l’écoute et le soutien des femmes victimes de violences et assument quotidiennement le travail de prévention. Pour briser l’omerta sur cette question, il faut débloquer des moyens humains et financiers notamment dans le domaine judiciaire. Mais pour le Premier ministre, « ce n’est pas le sujet », comme il l’a déclaré aux militantes de « Nous toutes ».

Plus largement, l’augmentation des salaires, l’égalité salariale hommes /femmes, la répartition du travail entre tous, le développement de services publics efficaces sur tout le territoire, de services de prise en charge de la petite enfance, de lieux de solidarité, etc., font partie des moyens nécessaires et indispensables pour mettre fin aux crimes contre les femmes. C’est pourquoi ce combat est indissociable de la lutte contre ce gouvernement et contre ceux qui s’enrichissent aux dépens de la société.