Malik Louadoudi (Délégué CGT Transvilles) : « Le syndicat CGT et les salariés de Transvilles en veulent à tous les représentants politiques de deux communes, et particulièrement aux représentants du Parti Communiste et du Parti Socialiste. Ceux-ci prétendent défendre le service public sur le plan national. Mais dès que ça concerne leur commune ou leur mairie, ils partent tout de suite de l’autre côté, ils abondent dans le sens de leurs camarades de la droite – en l’occurrence, M. Decourrière –, et laissent tomber les salariés et les  usagers ».

Roger Piskorek (CGT Transvilles) : « Aujourd’hui, on s’est rendu à la mairie de Saint-Amand pour y remettre le “4 pages” du Parti Communiste [sur les Européennes] que tous les salariés ont reçu dans leur boite aux lettres.[…] Sur le service public, ce tract explique bien ceci : “Nous voulons une Europe reconnaissant les services publics comme un secteur spécifique ne pouvant être soumis aux règles de la concurrence”. Alors aujourd’hui, on ne comprend pas que ces hommes politiques de gauche soient tout à fait d’accord pour nous vendre au privé. »

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Le sujet est malheureusement banal : à Valenciennes, dans le Nord, des travailleurs des transports publics sont en lutte depuis plusieurs mois contre le passage d’une gestion publique à une gestion privée de la société Transvilles, chargée du transport urbain. Ces travailleurs et leur section CGT s’inquiètent des conséquences de ce changement sur leurs acquis sociaux, leurs conditions de travail et la qualité du service public. C’est à juste titre qu’ils font la différence entre une régie publique de gestion et une entreprise capitaliste.

Ce qui n’est pas banal, c’est que leur colère est en partie dirigée contre des élus PCF. Ceux-ci siègent au Syndicat intercommunal des transports urbains de Valenciennes (SITURV), qui a la charge d’organiser les transports publics, dans la ville et ses environs. La CGT Transvilles leur reproche d’avoir appuyé le passage du public au privé. Le conseil d’administration de Transvilles est composé de douze membres, dont huit sont des élus locaux issus du SITURV. Sur ces huit élus, il y a quatre communistes et un socialiste. Or, c’est à l’unanimité que la décision de confier la gestion de Transvilles au secteur privé a été prise, en séance, le 20 janvier dernier !

Des salariés et leur section CGT se retrouvent donc en lutte contre des élus du parti communiste. Comment en est-on arrivé là ?

Transvilles, qui bénéficie d’une délégation de service public, est une société d’économie mixte détenue à 80% par le SITURV – c’est-à-dire les collectivités locales – et à 20% par des capitaux privés. A partir du 1er janvier 2010, le SITURV a décidé de se défaire de la gestion de Transvilles en la confiant à 100% au secteur privé. L’objectif déclaré est de faire des économies.

Depuis un an, maintenant, les militants CGT de Transvilles s’alarment des conséquences prévisibles de ce passage au privé : suppressions de lignes, diminution des dessertes, suppressions d’emplois, remise en cause des acquis sociaux, etc. Ils demandent des comptes aux élus PCF qui siègent au SITURV et qui ont soutenu ce projet. Les élus PCF concernés se défendent en expliquant qu’il s’agit d’une formalité sans conséquences. Ils affirment que les 506 salariés de Transvilles ont obtenu des garanties sur leurs conditions de travail et leurs acquis. Les travailleurs concernés n’en sont visiblement pas convaincus : le 20 janvier et le 11 mai derniers, 90% d’entre eux étaient en grève. A plusieurs reprises, ils ont cherché à obtenir des explications de la part de ces élus PCF. Ils les ont interpellés sur la contradiction flagrante entre le discours officiel du parti, qui appelle à défendre les services publics, et la politique réelle qu’il mène, au niveau local, dans le cas de Transvilles.

Les réponses qu’ils ont obtenues sont pour le moins surprenantes. Le vice-président du SITURV, Eric Renaud, est élu PCF à la mairie de Saint-Amand, dont le maire est Alain Bocquet, par ailleurs député communiste à l’Assemblée nationale. Eric Renaud a soutenu et orchestré le passage de Transvilles à une gestion privée. Il assure que cela ne changera rien. Mais dans ce cas, pourquoi le faire ? Cité par le journal La voix du Nord, le 25 février dernier, Eric Renaud déclare, pour se justifier : « Je suis d’accord pour dire qu’un service public de transport est naturellement déficitaire, mais il y a des limites à tout. » Mais alors, c’est bien que quelque chose va changer ! Dans quel sens ? C’est simple : la gestion des transports urbains a un coût, nous explique Eric Renaud. Pour alléger ce coût, le SITURV fait appel à des capitaux privés. Ce faisant, le SITURV livre au privé ce marché juteux – en affirmant cependant avoir obtenu des « garanties » en termes de qualité de service, de conditions de travail et de salaires. Mais en la matière, la parole des capitalistes ne vaut rien !

En vérité, les capitalistes n’investissent pas pour le plaisir. Ils investissent pour, en retour, dégager des profits. Comment les capitalistes réaliseront-ils ces profits ? On le sait parfaitement, d’expérience. Les capitalistes remettront en cause la fréquence des dessertes ; ils fermeront des lignes ; ils s’attaqueront aux conditions de travail des salariés et à leurs acquis sociaux. A quel rythme et dans quel ordre mèneront-ils cette offensive ? Nous ne le savons pas. Mais on sait parfaitement qu’ils chercheront à diminuer tous les coûts au détriment des salariés et des usagers. C’est une évidence solidement appuyée par l’expérience. On s’étonne de devoir le rappeler à des élus communistes.

La Riposte apporte tout son soutien aux travailleurs de Transvilles en lutte, dont les revendications sont absolument légitimes. Ils ont raison de craindre pour la qualité du service public et leurs acquis sociaux. Tôt ou tard, ils se heurteront à la soif de profit des capitalistes. Les « garanties » que les capitalistes ont données ne les engagent à rien : elles sont simplement destinées à faire passer la pilule. Encore une fois, ils n’ont pas injecté des millions d’euros dans Transvilles pour le plaisir : ils voudront en retirer un maximum de profits, le plus rapidement possible.

A l’instar de la CGT Transvilles, nous considérons que des élus communistes ne doivent pas cautionner la privatisation d’un service public, même sous la forme d’une délégation de service public. Tous les militants communistes, et a fortiori les élus, doivent s’opposer de façon inconditionnelle à toute forme de privatisation. Le moindre recul, dans ce domaine, porte un coup sévère à l’autorité et à la crédibilité du PCF auprès des jeunes et des travailleurs. Le PCF a déjà payé très cher les privatisations massives du gouvernement Jospin, dont certaines étaient directement pilotées par le ministre « communiste » des Transports, Jean-Claude Gayssot. Manifestement, certains élus communistes n’ont toujours pas compris la leçon !

Il faut mettre un terme, au plus vite, à cette situation inacceptable. La lutte des travailleurs de Transvilles n’est pas terminée. Tous les communistes doivent la soutenir, aux côtés des militants CGT. Dans le Valenciennois, de nombreux militants PCF ont fait part de leur colère et de leur solidarité avec les salariés de Transvilles. Nous appelons tous les militants du PCF, dans tous les départements, à manifester leur solidarité avec les travailleurs de Transvilles et leur section CGT.

Solidarité avec les salariés et la CGT Transvilles !

Pour une opposition résolue des élus PCF à toute forme de privatisation !

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