La Guyane vit la plus grande mobilisation de son histoire. Samedi dernier, 37 syndicats réunis au sein de l’UTG, ont décidé d’appeler à la grève générale illimitée à partir du lundi 27 mars. La grève générale implique la quasi-totalité des travailleurs des différents secteurs de l’économie.

Le mouvement a commencé lundi 20 mars avec les travailleurs de l’énergie. Les salariés d’Endel (une filiale d’Engie chargée du transfert de la fusée Ariane sur son pas de tir) ont bloqué le centre spatial de Kourou pour revendiquer des augmentations de salaire. Ce fut l’étincelle qui entraina dans la grève d’autres secteurs de l’économie : les salariés d’EDF, une partie des agriculteurs ainsi que le personnel du centre médico-chirurgical de Kourou.

Les collectifs syndicaux ont érigé une douzaine de blocages et des barrages routiers à l’entrée de plusieurs villes. Le Grand Port de Cayenne, la préfecture et la Collectivité Territoriale ont également été bloqués. Des barrages spontanés érigés par des habitants sont venus s’ajouter aux barrages montés par les collectifs. Depuis lundi, le pays est complètement paralysé.

Cette mobilisation ne sort pas de nulle part. Elle s’enracine dans une situation sociale et économique catastrophique. Le taux de chômage dépasse les 22 % et touche plus de 40 % de la jeunesse. Le revenu moyen est de 1400 euros. Près de la moitié des Guyanais vit avec moins de 500 euros par mois, alors que les prix de nombreux biens de première nécessité sont plus élevés qu’en métropole. 15 % de la population n’a pas accès à l’eau potable. 44 % des enfants quittent l’école au niveau du primaire.

L’Etat français ne s’est jamais réellement soucié de la situation des Guyanais. Face à l’urgence sociale et économique, la délégation interministérielle envoyée par le Premier ministre, juste avant le début de la grève, dimanche 19 mars, n’avait que du replâtrage à proposer : 60 millions d’euros pour l’hôpital et l’envoi d’un renfort de 25 policiers et 23 gendarmes. Voilà tout ce qu’avait à proposer le gouvernement, alors que François Hollande avait promis en 2013 un « Pacte pour l’avenir de la Guyane », qui n’a toujours pas été signé.

Contraint par la puissante grève générale, le gouvernement a décidé d’envoyer le tout nouveau ministre de l’Intérieur Matthias Fekl (soutien de Hamon) et l’inconsistante ministre de l’Outre-mer Ericka Bareigts pour « apaiser la situation » et chercher des solutions à « dix ou quinze ans » tout en accordant 20 millions d’euros à l’hôpital de Cayenne. Mais les promesses et l’aumône ne suffiront pas, comme en témoigne la déclaration d’un porte-parole du mouvement à la sortie de la première réunion avec les ministres, jeudi 30 mars : « ils nous doivent les infrastructures que tous les départements français ont ! »

L’attitude du gouvernement révèle le cynisme de l’Etat français, qui ne s’intéresse à la Guyane que pour sa position géographique et le business des fusées « Ariane ». Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la révolte de la Guyane éclate en pleine campagne présidentielle. Le gouvernement est faible et le président Hollande est tellement discrédité qu’il a renoncé à être candidat à sa succession. Ses ministres, au bilan lamentable, s’enfuient vers Macron pour tenter de continuer à exister.

Si la colère s’exprime en Guyane, elle est aussi profonde en France et ne demande qu’à s’extérioriser.  La grève générale des Guyanais nous montre la voie à suivre pour sortir du statu quo, car elle témoigne du pouvoir de la classe ouvrière quand elle se mobilise. Cette grève a un caractère révolutionnaire évident, même si elle est limitée – pour le moment – à un département qui compte moins de 300 000 habitants. Mais elle indique son avenir à la métropole, où la colère n’est pas moins profonde.

Nous sommes tous des Guyanais !

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