Tour Triangle

 En avril 2014, Anne Hidalgo a pris la relève de Bertrand Delanoë à la tête de la Mairie de Paris. Revue de détail et inventaire, de renoncements en capitulations.

Le logement

L’équipe de Mme Hidalgo avait promis la construction de 10 000 logements sociaux par an. Pour 2014, la mairie annonce 7166 logements sociaux supplémentaires, un chiffre record. Mais seuls 3500 ont été nouvellement construits. La part la plus importante est constituée d’anciens logements ou bureaux réhabilités.

Par ailleurs, les chiffres bruts ne disent rien de la nature de ces logements. Le parc social est constitué de logements attribuables sous plafond de ressources, qui s’établit sur quatre niveaux : PLAI, PLUS, PLS et PLI. Ainsi, pour prétendre à un logement de type PLAI, dit « très social », un couple avec enfant doit gagner moins de 27 190 euros par an, soit environ deux SMIC. Pour un logement PLUS, il doit gagner entre 27 190 et 45 311 euros, etc. La plupart des demandeurs se trouvent dans la première catégorie (le PLAI). Or seuls 27 % des 7166 logements sociaux supplémentaires, en 2014, relèvent de cette catégorie. Et depuis 2001, cela représente 17 000 logements sur les 70 000 nouvellement créés. Le compte n’y est pas !

La mairie tient à rajouter au bilan de 2014 la « construction » de 2250 logements privés (des bureaux vides réhabilités, pour la plupart), ce qui lui permet d’afficher le chiffre global de 10 000 logements. Non seulement il ne s’agit pas de logements sociaux, mais en outre ils ne sont pas encore construits : le chiffre de 2250 correspond aux permis de construire délivrés.

Enfin, le chiffre de 10 000 logements est très en deçà des besoins : 120 000 ménages parisiens ont déposé un premier dossier ou renouvelé leur demande de HLM en 2014.

Logements sociaux agréés à Paris

Les transports et la pollution

 En 2015, Paris a connu 12 jours de dépassement du seuil autorisé de 40µg/m3 d’air des particules fines cancérigènes dites « PM10 ». AirParif, l’association chargée de surveiller la qualité de l’air francilien, lance des alertes régulières. Selon la CAFE, une organisation chargée par l’UE de mesurer l’impact de la pollution en Europe, environ 42 000 personnes décèdent chaque année, en France, des conséquences de la pollution aux particules PM10, issues majoritairement des véhicules diesel.

Et pourtant, aucune mesure n’est prise. Pire : Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, a annoncé en avril une baisse de 15 % des subventions de l’Etat à AirParif. Résultat : l’association dépend encore plus des grands groupes (Aéroports de Paris, Total et Sanofi…), dont la participation financière s’élevait déjà à 29 %. Les loups sont dans la bergerie !

Lors des épisodes de pollution, AirParif recommande notamment la circulation alternée et la gratuité des transports publics. La mairie de Paris n’a pris de telles mesures qu’une seule fois : les 21, 22 et 23 mars 2014. En pleine campagne électorale des municipales ! Depuis, le gouvernement et la Mairie s’accusent réciproquement de ne pas permettre ces mesures. Le vrai « problème », c’est que la gratuité des transports du 21 au 23 mars a coûté 10 millions d’euros. Austérité oblige, les Franciliens continueront de mourir des conséquences de la pollution...

Les « grands projets » inutiles et imposés

La municipalité continue de vouloir imposer des projets coûteux et néfastes pour l’environnement. Après des péripéties rocambolesques, la construction de la Tour Triangle – un projet pharaonique du côté de la Porte de Versailles – aura bien lieu. En novembre 2014, le Conseil de Paris avait pourtant voté contre. Mais Anne Hidalgo a fait revoter le Conseil de Paris, qui a fini par l’approuver en juin 2015 : 70 000 m² de bureaux (alors que 6 millions de m² de bureaux sont vides en Ile-de-France), un hôtel quatre étoiles et des commerces. La construction de cette tour de 180 mètres coûtera plus de 550 millions d’euros et coupera en deux le Parc des Expositions...

Dans le 16e arrondissement, c’est le Jardin des Serres d’Auteuil, classé aux Monuments Historiques, qui risque de faire les frais de la folie des grandeurs de la Fédération Française de Tennis, avec la bénédiction de la Mairie. Dans ce jardin gratuit, public et abritant plus de 10 000 espèces rares, est prévue la construction d’un court de tennis pour Rolland Garos. Ce projet prévoit une reconfiguration complète du jardin. La Mairie cède une fois de plus aux intérêts privés, alors que Paris est la capitale occidentale comptant le moins d’espaces verts par habitant : 14 m², contre 23 m² à Londres. Suite à la mobilisation de nombreuses associations, le projet est suspendu pour trois mois.

Au-delà de ce jardin, c’est ce quartier dans son ensemble qui est en train d’être reconfiguré dans l’intérêt du sport-business, en vue des Jeux Olympiques de 2024. Rénovée, la piscine municipale Molitor offre désormais un abonnement annuel à… 3300 euros ou une « adhésion Club » à 1200 euros. A ce prix, on nage dans du lait de coco ? A proximité, les scolaires et les amateurs ont été évincés du stade Jean Bouin. Le stade municipal Georges Hébert a été remplacé par deux centres d’entraînement de Rolland Garros.

Les JO de 2024 couronneront cette débauche d’argent public, qui sert à construire ou rénover des équipements auxquels les riverains n’ont pas (ou plus) accès – et à remplir les caisses de multinationales (sponsors, etc.), qui seront en outre exonérées d’impôts. Pour mémoire, les JO d’Athènes avaient coûté plus de 20 milliards d’euros, ceux de Pékin 32 milliards, pour de faibles retombées économiques et un coût écologique inacceptable.

La politique sociale 

Les réformes en cours au sein des services municipaux visent à générer le plus possible d’économies, à créer des guichets uniques, à regrouper et mutualiser les moyens, notamment les services sociaux. Mme Hidalgo a fait de la lutte contre l’exclusion la « grande cause » de sa mandature. Mais la politique d’austérité adoptée ne fait qu’enfoncer dans la précarité les agents et usagers des services publics parisiens.

Le Conseil de Paris a voté des augmentations des tarifs du Pass Navigo Améthyste, qui offrait aux personnes âgées des tarifs avantageux dans les transports publics. Auparavant, 120 000 Parisiens âgés payaient 40 euros par an. Avec la nouvelle grille tarifaire, certains vont devoir débourser jusqu’à 380 euros par an.

Il y a plus de 30 000 personnes sans abris à Paris : c’est 84 % de plus qu’en 2001. Mais la gestion reste toujours la même : en hiver, la Mairie ouvre des gymnases pour accueillir les sans-abris, la nuit. Elle n’offre pas d’hébergement pérenne : seul un SDF sur 10 a une chance d’être logé suite à des démarches. Alors que le SAMU Social reçoit 1500 appels par jour, la Mairie répond par une gestion au thermomètre et préfère payer des nuitées d’hôtel plutôt que de réquisitionner les 136 000 logements vides de la capitale.

La pression s’exerce également sur les agents de la Ville. Objectifs chiffrés, polyvalence, rentabilité : on leur en demande toujours plus en les payant moins. La Ville de Paris emploie environ 50 000 agents titulaires, mais aussi plus de 15 000 contractuels ou intérimaires soumis au bon vouloir de leur hiérarchie. En octobre, suite à de nombreuses attaques contre leur statut et leurs conditions de travail, les éboueurs et égoutiers de la Ville ont mené 4 jours de grève. Ils ont eu gain de cause.

Les agents des piscines municipales ont dû faire 16 mois de grève les dimanches pour obtenir enfin, en juillet 2015, une revalorisation de leur prime dominicale. Dans de nombreuses directions parisiennes, le dialogue social n’est qu’un simulacre cachant les véritables objectifs de la Mairie : réduire les coûts et la masse salariale. Pendant ce temps, les directeurs de la Ville de Paris sont payés en moyenne 12 500 euros nets par mois, dont 5000 à 8000 euros de « primes » mensuelles diverses.

Loyers inabordables, pauvreté, précarité… La « gauche » au pouvoir à Paris ne remplit pas son rôle. En participant à l’exécutif municipal, les élus du PCF jouent une fois de plus le rôle de caution « de gauche » de la politique pro-patronale et austéritaire des dirigeants « socialistes ».