Il y a seulement quelques mois, PSA (Peugeot et Citroën) annonçait sa fusion avec le constructeur italo-américain Fiat-Chrysler (FCA). Les dirigeants de PSA promettaient « une direction, des ressources et une dimension qui lui permettront de relever les défis d’une nouvelle ère de mobilité durable ». Ce nouveau groupe se retrouverait à la quatrième place du classement mondial des plus grandes entreprises du secteur avec 8,7 millions de véhicules vendus par an, 170 milliards d’euros de chiffre d’affaires global, 400 000 salariés et pas moins de 14 marques de voiture. Malheureusement pour les rêves monopolistes des dirigeants de PSA, la crise du COVID-19 a mis l’entreprise au bord du gouffre... et la direction a décidé d’y pousser ses salariés.

Confinement et production

Avant la pandémie, PSA disposait d’un matelas financier confortable : pas moins de 23 milliards d’euros de réserves de sécurité. Le groupe a pourtant annoncé récemment devoir faire un crédit bancaire de 3 milliards d’euros pour éviter le défaut de paiement. En effet, la baisse partielle de la production et la mise à l’arrêt des ventes de voitures lui posent des difficultés sans précédent : les ventes ont chuté de 72 % en mars, et de 34 % sur l’ensemble du premier trimestre. PSA n’a pas pour autant mis ses chaînes de production à l’arrêt.

Sous le capitalisme, la production ne vise pas à satisfaire un besoin, mais à procurer des profits aux capitalistes. La production est donc menée indépendamment de la capacité des consommateurs à acheter les produits. Les entreprises se regroupent d’ailleurs (comme le font PSA et FCA) pour pouvoir produire encore plus et ainsi étouffer la concurrence sous leur poids. Même si la demande en voiture est actuellement presque nulle, la direction de PSA n’entend pas pour autant arrêter sa production. Cela risquerait de la mettre en difficulté face à ses concurrents sur le marché mondial. Les usines doivent donc continuer à tourner, quel qu’en soit le prix pour les salariés.

Maintenir la production à tout prix

Alors que tous les pays ont cruellement besoin de masques pour protéger les populations, la direction de PSA ne cherche qu’à maintenir son taux de profit – et sa production de voitures. Pour se conformer aux règles sanitaires dérisoires fixées par le gouvernement, elle constitue donc des réserves de masques et de gants pour ses ouvriers. Ces équipements ont beau manquer cruellement aux hôpitaux, ils ne peuvent suffire pour protéger les travailleurs dans des usines où le mètre de distance sanitaire est une pure fiction.

La situation sur le site de Vesoul en Haute-Saône illustre bien cette politique criminelle. A l’heure où nous écrivons, la plate-forme compte en effet déjà 128 cas suspects et 5 cas avérés de COVID-19. Cela n’empêche pourtant pas PSA de maintenir l’activité sur le site, transformé en un véritable bouillon de culture. Des chaînes de production, le virus se répand ensuite parmi les familles des salariés, réduisant à néant toute l’utilité du confinement. Comme le dit Jean-Pierre Mercier, délégué syndical CGT, cela équivaut à « risquer des vies pour envoyer des essuie-glaces et des rétroviseurs ! »

Et ce n’est pas tout. Les salariés qui ne sont pas envoyés à l’usine voient leurs salaires baisser de près de 16 %. Pour que le groupe PSA accepte de payer 100 % des salaires, les salariés devront renoncer à des jours de congés pour rattraper la production « perdue » pendant le confinement. Après le « confinement à la maison » ce sera donc le « confinement à l’usine et dans les bureaux » pour les salariés de PSA. Là encore, ils se retrouveront sans aucune protection sérieuse face à la contagion.

Contre le cynisme patronal, place au contrôle ouvrier

Les travailleurs de l’automobile ne sont d’ailleurs pas les seuls à faire les frais du cynisme des capitalistes. Dans nombre de secteurs (comme dans le bâtiment), le patronat sacrifie froidement la santé de ses salariés sur l’autel du profit. Et il bénéficie de la complicité active du gouvernement. L’entreprise Airbus a ainsi pu bénéficier de dérogations spéciales pour maintenir sa production, et accaparer des masques au détriment de certains hôpitaux.

Les travailleurs n’ont aucune compassion à attendre de leurs patrons ou de ce gouvernement de banquiers. Si nous voulons protéger nos vies et notre santé, c’est à nous de prendre le contrôle de nos entreprises. Les syndicats d’entreprise doivent immédiatement se mobiliser pour mettre à l’arrêt les entreprises non essentielles, sans perte de salaires. Partout où c’est possible, il faut aussi réorienter la production pour fournir du matériel sanitaire aux soignants et à la population. Ce sont les travailleurs qui font tourner le monde, ce doit être à eux de décider comment le faire tourner.