Après la loi Travail, la remise en cause du statut des cheminots et la privatisation de la SNCF, le gouvernement Macron poursuit sa politique destructrice en visant les 5,2 millions d’agents de la Fonction publique (FP), soit un actif sur cinq dans le pays.

Déjà attaqués par les gouvernements précédents, les fonctionnaires ont été déclassés, comme l’illustrent ces chiffres fournis par la CGT : en 1986, un agent de catégorie A était recruté à 175 % du SMIC, contre à peine 110 % aujourd’hui. Entre 2010 et 2016, les fonctionnaires ont perdu 7 % de leur pouvoir d’achat. La part des primes dans le salaire était de 14 % en 1994, contre 25 % en 2014. Enfin, les « contractuels » (donc précaires) représentent désormais 22 % des agents de la Fonction publique, soit 1,3 million de travailleurs.

Dépeçage de services publics

Le nouveau chantier gouvernemental est une attaque sans précédent contre les agents publics et contre les services publics en général.

Le programme de réforme annoncé dans « CAP 2022 » contient la remise en cause du statut des fonctionnaires et l’objectif de 120 000 suppressions d’emplois (70 000 dans la FP territoriale et 50 000 dans la FP d’Etat). Cela se traduira par la disparition de services d’accueil physique, qui seront remplacés par des bornes informatiques ou des services gérés par le secteur privé, avec des coûts supplémentaires. Qui n’a pas entendu parler du fiasco de la numérisation des cartes grises ? Six mois après la fermeture des services préfectoraux, plus de 450 000 demandes de cartes seraient en attente, selon Le Parisien.

Sous couvert d’améliorer la qualité des services publics et d’offrir aux agents un environnement de travail modernisé, tous les moyens sont bons pour réduire la dépense publique : transferts entre les différents niveaux de collectivités, transferts au secteur privé, abandons de missions, etc. Ainsi, abandonner des missions, sous prétexte qu’elles ne seraient pas « essentielles », pourrait conduire, par exemple, à confier au secteur privé la gestion des activités culturelles comme les musées ou les bibliothèques, quitte à ce que leur accès ne soit plus gratuit, ou que leurs tarifs augmentent, ou encore que toutes les catégories de public n’y aient pas accès

Précarisation

Dans sa logique de réforme ultralibérale, le gouvernement a besoin de se débarrasser du statut général des fonctionnaires, afin d’avoir des personnels plus malléables. Ainsi, un « Comité d’experts », mis en place en octobre dernier, propose de généraliser le recours aux contractuels, en prenant pour exemple le ministère de la Défense, où certains militaires sont parfois embauchés pour des périodes de 5 à 15 ans, avant d’aller dans le privé (ou inversement). Dès lors, pourquoi pas des profs avec un CDD de 5 ans, des policiers embauchés pour seulement 10 ans, des agents territoriaux en contrats de 2 ou 3 ans renouvelables – et ainsi de suite ? Généraliser le recours aux contractuels, c’est précariser l’ensemble des personnels, comme cela s’est fait par le passé à France Telecom et La Poste, et comme cela pourrait se faire à la SNCF. Recruter les cadres de la FP en contrat de droit privé revient à importer le « spoil system » américain, principe selon lequel un nouveau gouvernement – qui doit pouvoir compter sur la loyauté partisane des fonctionnaires – remplace ceux qui sont en place par des fidèles.

Dérives prévisibles

La rémunération au mérite consacre la mise en concurrence des personnels et l’accentuation de dérives clientélistes. C’est l’arbitraire le plus total, alors que la part variable de la rémunération est le premier facteur d’inégalité entre les femmes et les hommes ! Rémunérer des agents publics d’un hôpital au mérite, en fonction des résultats, pourrait les conduire à opter pour la prise en charge des pathologies les plus banales, pour lesquelles les résultats sont faciles à obtenir, et à délaisser les pathologies les plus lourdes, aux résultats plus incertains et moins immédiats.

Supprimer les Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et réduire les champs de compétences des commissions paritaires, c’est abandonner tout contrôle des représentants élus et laisser les personnels face à l’arbitraire de l’administration.

Mettre en place des « plans collectifs de départs volontaires », c’est profiter de l’usure des personnels face à la dégradation des conditions de travail et au gel des salaires, pour « dégraisser » les services publics et détériorer les conditions de travail de celles et ceux qui restent !

La cohérence des attaques contre les conventions collectives du privé et les remises en cause des statuts des personnels du public exigent d’autres réponses qu’une seule journée de grève – ou même quelques-unes – : il faut passer à la vitesse supérieure et préparer une grève reconductible dans toutes les branches d’activité !