Le 10 décembre dernier, selon la CGT, près de 40 % des travailleurs de l’industrie électrique et gazière étaient en grève. En cause : le projet Hercule de « réorganisation » mis sur la table par la direction d’EDF et l’Etat français.

L’entreprise EDF subit depuis près de 30 ans les assauts liés à la mise en concurrence. EDF était à l’origine un monopole d’État qui contrôlait la chaîne de production et de distribution de l’énergie électrique de bout en bout. Mais la bourgeoisie, au travers de la Commission Européenne et du gouvernement français, s’est employée, à partir des années 90, à diviser cette entreprise en plusieurs secteurs d’activités pour instaurer une « libre concurrence » sur le marché de l’énergie. L’argument de la baisse des prix avancé par les défenseurs de la concurrence ne trompe plus personne : le but était en fait de maximiser les profits au détriment des salariés et des usagers.

Les nouveaux fournisseurs privés ne possédaient pas les moyens de production nécessaires à la création d’électricité. Dans ces conditions, difficile de concurrencer EDF et ses infrastructures… Les « stratèges » de l’Etat ont trouvé la « solution » : forcer EDF à vendre une partie (25 %) de l’électricité – qu’elle a elle-même produit – aux fournisseurs privés. Le tout à prix coûtant, au nom de la « concurrence libre et non faussée ». Cette situation est d’une absurdité sans nom. Dans un autre contexte, si un pizzaïolo était forcé de préparer gratuitement des pizzas pour d’autres pizzerias, cela ferait sourire. Mais c’est bien d’un tel braquage dont il s’agit dans le cas d’EDF. Ainsi des entreprises privées comme GreenYellow (du groupe Casino), Energem, Proxella, Cdiscount énergie et bien d’autres encore, vendent l’électricité produite par EDF et font leur profit dessus.

Si cette situation est déjà révoltante, le plan Hercule s’inscrit parfaitement dans la continuité de ce projet et va même franchir un pas de plus vers le démantèlement d’EDF.

Ce plan de réorganisation prévoit de diviser EDF en 2 parties principales : « EDF bleu » qui serait détenue à 100 % par l’État et qui gérerait les infrastructures de production d’électricité les plus importantes (notamment les centrales nucléaires) ; et « EDF vert » qui serait ouverte aux capitaux privés à hauteur de 35 % et qui gérerait le réseau de distribution, la direction du commerce, les énergies renouvelables, etc. Une 3e partie : EDF Azur, qui gérerait les barrages, est aussi envisagée.

Il faut bien comprendre la combine qui est ici à l’œuvre : d’un côté, l’Etat nationalise à 100 % tout ce qui coûte très cher à entretenir (usines, centrales) et de l’autre, privatise les secteurs lucratifs comme la distribution, la vente, etc. C’est la vieille rengaine de la bourgeoisie : « socialiser les pertes et privatiser les profits ».

En séparant des secteurs qui travaillaient jusqu’à présent ensemble (et cela est primordial dans le cas de la production d’énergie, pour pouvoir produire au meilleur moment en fonction de la demande), Hercule va faire baisser drastiquement l’optimisation de l’appareil productif électrique français. In fine, tous ces problèmes se retrouveront sur les factures d’électricité, avec des prix toujours plus élevés.

Cette réorganisation sera également une catastrophe au niveau humain, car cette déstructuration menace aussi de très nombreux emplois.

Ultime affront : le gouvernement envisage d’intégrer le projet Hercule dans la loi qui sera rédigée suite à la convention citoyenne sur le climat.

EDF est aujourd’hui la 2e compagnie au niveau mondial de production d’électricité, et la 3e mondiale en termes de chiffre d’affaires. C’est un levier de l’économie très important, un outil qui pourrait être extrêmement puissant en termes de production et d’innovation. Mais les capitalistes sont désormais une classe réactionnaire qui défend un système pourrissant et sont donc incapables de réaliser ce potentiel ; le projet Hercule en est bien la preuve.

Les salariés d’EDF ont bien compris que Hercule était un monstre destructeur et leur mobilisation doit être soutenue. La question de la propriété est cruciale dans cette affaire comme dans toutes les autres. Face à la privatisation, réclamons la nationalisation des grands leviers de l’économie sous le contrôle des salariés !