Une mobilisation historique et internationale des chauffeurs de taxi vient de se dérouler en France, mais aussi en Italie (Milan). Une intersyndicale regroupant 7 syndicats de chauffeurs (dont la CGT et FO) avait en effet appelé à une journée de grève ce lundi 10 février. Cet appel était la suite d’un premier mouvement, le 13 janvier 2014, auquel le gouvernement n’avait répondu qu’avec mépris, en refusant de prendre en compte les revendications des chauffeurs.

Le gouvernement préférait en effet « dialoguer » avec un des syndicats patronaux du taxi, affiliés au MEDEF, sans tenir compte des préoccupations des travailleurs du taxi. Ce mépris est devenu insupportable pour les chauffeurs de taxi, excédés par des conditions de travail qui se dégradent d’année en année. Ils ont compris que seule une mobilisation exceptionnelle pourrait contraindre le gouvernement à sortir de sa collaboration patronale pour entendre les travailleurs du taxi. Cette mobilisation du 10 février avait donc comme premier objectif de faire passer les revendications des chauffeurs avant celles de grands groupes financiers (centraux radios et loueurs).

La mobilisation avait comme revendication essentielle la défense des 60 000 emplois du taxi en France. Le taxi est en effet menacé par une dérégulation sauvage orchestrée et commandée par le sinistre Sarkozy. Dans une loi de 2009, il a en effet créé un clone du taxi, les voitures de tourisme avec chauffeurs (les VTC), censées venir améliorer l’offre de transport. Ces VTC, grâce aux nouvelles technologies (applications Smartphone) contournent leur ersatz de réglementation et font en réalité du taxi (prise de clientèle sur la voie publique « en direct »). Or ces VTC n’ont aucune des contraintes imposées aux chauffeurs de taxi : examens, location (à des tarifs exorbitants) ou achat d’une licence sur 10 ans, sanctions disciplinaires très lourdes, etc. Les chauffeurs de taxi de nombreux pays (France, Italie, États-Unis, etc.) sont confrontés à ces acteurs opportunistes et ont légitimement exigé de leurs gouvernements respectifs la fin de cette concurrence sauvage et déloyale.

La loi de 2009 ne sert évidemment que les intérêts des capitalistes qui, tout en détruisant les emplois du taxi, ne créent que de l’emploi précaire (si l’on peut qualifier le statut d’autoentrepreneur d’emploi). En effet, les véritables bénéficiaires de ce système sont les éditeurs d’applications qui permettent de mettre en relation un chauffeur VTC esclave et les consommateurs via leur téléphone ou leur ordinateur. Ces sociétés reversent un faible pourcentage aux chauffeurs qui doivent faire des journées de 15 heures pour survivre, tout en enfreignant leur réglementation (racolage). Quant à la plus célèbre de ces sociétés, qui nous vient de Californie et qui a comme actionnaire Goldman Sachs et Google, elle est aussi réputée pour être une championne de « l’optimisation fiscale » !

A l’opposé de ces fers de lance du capitalisme, les chauffeurs de taxi, en défendant leurs emplois, défendent également la qualité de service au public, car le taxi fonctionne avec un tarif public fixé par le ministère des Finances. Ce tarif d’État est une garantie pour les usagers et, bien sûr, une anomalie pour ces sociétés éditrices d’application VTC, motivées uniquement par le profit ! Or, les usagers sont déjà victimes des pratiques tarifaires « libres » de la part des VTC, où les prix varient du simple au quintuple selon leur loi sacrée de l’offre et de la demande !

Quoi qu’il en soit, la formidable mobilisation des chauffeurs (elle s’est prolongée jusqu’au jeudi 13 février, car le gouvernement restait campé sur ses positions) a permis à l’intersyndicale de se faire entendre et un député, M. Thévenoud, est en charge d’auditionner les acteurs de la profession pour tenter de trouver une issue législative à cette situation insensée. Il en va de l’intérêt des usagers, bien sûr, mais aussi des conditions de travail des chauffeurs de taxi et des chauffeurs de VTC, lesquels sont honteusement exploités. L’intersyndicale a d’ailleurs profité de la mission confiée au député Thévenoud pour dénoncer la situation catastrophique des taxis locataires, qui sont privés de tous les droits élémentaires des travailleurs. Dans l’attente de l’issue de cette mission (15 avril), les chauffeurs restent bien sûr vigilants, conscients que seule l’union des travailleurs permettra de changer ce système profondément injuste.