En 2014, le ministre de l’Economie (un certain Macron) autorisait la prise de contrôle par General Electric (GE) de la branche énergie d’Alstom. A l’époque, les syndicats redoutaient des suppressions de postes ; le gouvernement démentait. Mais le 4 juillet dernier, la direction de GE annonçait la suppression de 345 postes sur le site d’Hydro Grenoble, qui emploie 800 salariés.

Les salariés du site ont décidé de ne pas se laisser faire. Pourtant, il ne s’agit pas de dockers massivement syndiqués à la CGT. Ce sont des cadres (500), des techniciens (250) et une minorité d’ouvriers (50). La lutte entamée dès juillet, et qui s’est durcie début octobre avec un blocage de l’usine, répond à l’ignominie du plan de suppression de postes. En effet, il s’agit d’une usine centenaire, dont le carnet de commandes est plein et qui est à la pointe d’une technologie d’avenir (turbine hydraulique), étant donnée la nécessaire transition énergétique. Ces salariés, rarement syndiqués et peu habitués aux luttes, sont dégoûtés d’être sacrifiés sans autre raison apparente que la course aux profits. La conscience des salariés évolue très rapidement lorsque le grand Capital s’en prend directement à eux.

En face, la direction de GE se montre particulièrement obtuse. Selon elle, rien n’est négociable : ni les délais, ni le nombre de postes supprimés, ni les conditions de départ (décrites comme « insultantes » par l’intersyndicale), ni quoi que ce soit d’autre. En réalité, les salariés grenoblois subissent un vaste plan de licenciements à l’échelle internationale décidé par GE : 6500 postes supprimés sur les 35 000 de la branche énergie d’Alstom en Europe, dont 765 en France. Ce qui se cache derrière ce plan, c’est la concurrence capitaliste, qui pousse au monopole. Racheter un concurrent permet non seulement de l’éliminer et de gagner des parts de marché, mais aussi de « rationaliser » encore plus la production et donc de faire des « rendements d’échelle ».

La lutte des salariés d’Hydro Grenoble est le symbole d’un système en crise où même les couches supérieures du salariat sont touchées par les plans de licenciements. En conséquence, cela provoque une poussée de la combativité dans les couches du salariat les plus éloignées du syndicalisme et des méthodes d’action traditionnelles du mouvement ouvrier. Les cadres vont de plus en plus être jetés dans la lutte par le régime macroniste. Or c’est sa base sociale. Macron est donc en train de scier la branche sur laquelle il est assis – doucement, mais sûrement.