51e congrès CGT

La loi Travail présentée par la ministre El Khomri est une attaque sans précédent contre les salariés, comme nous le détaillons dans l’article ci-contre. A la veille du 51e Congrès de la CGT, du 18 au 22 avril, cette attaque est une véritable provocation de la part du gouvernement. Beaucoup se demandent pourquoi le gouvernement prend de tels risques – et pourquoi maintenant.

Tout d’abord, cette remise en cause profonde du Code du travail répond à une nécessité du point de vue des intérêts de la classe dirigeante. Dans le contexte d’une crise économique globale, la compétition devient de plus en plus rude pour gagner des parts de marché. Les capitalistes cherchent à accroître la compétitivité de leurs marchandises en réduisant la part de richesses qui revient aux salariés, dans la production. De plus, étant donnée la profondeur de cette crise, ils veulent pouvoir se débarrasser des salariés à moindres frais, le moment venu.

Mais il faut aussi replacer cette offensive dans le contexte de l’état d’urgence, qui a créé un climat dont le gouvernement pensait profiter pour intimider les salariés, en particulier après la lutte des travailleurs d’Air France, en octobre dernier. Etant donnée la relative passivité des directions syndicales au niveau national, le gouvernement s’est dit que le moment était bien choisi pour frapper. La faiblesse invite à l’agression.

Nouvelle direction, même stratégie

Depuis que Martinez a remplacé Lepaon à la tête de la CGT, le discours est devenu plus radical, reflétant une radicalisation à la base. Martinez a fait un tour de France pour rentrer en contact avec des centaines de bases syndicales. Il a avancé la revendication de la semaine de 32 heures. Mais au-delà du ton plus radical dans les discours, il faut reconnaître que la stratégie n’a pas vraiment changé. La direction confédérale reste trop conciliante avec le gouvernement.

En témoigne la timide réaction face à l’état d’urgence. Il aura fallu la réaction des bases syndicales – et notamment de structures départementales, comme l’UD 75 – pour que la direction modifie sa position et s’oppose à l’état d’urgence.

En témoigne aussi la relative passivité face aux attaques contre les salariés d’Air France et de Goodyear. La direction de la CGT aurait dû lancer une vaste campagne contre la criminalisation de l’activité syndicale, à l’échelle nationale, qui aurait sans doute mobilisé de nombreux secteurs.

La CGT justifie souvent cette passivité par la recherche de l’unité syndicale. Cela revient à chercher le plus petit dénominateur commun avec la CFDT, dont la direction est de plus en plus intégrée à l’appareil d’Etat. Cette stratégie du « syndicalisme rassemblé » est toujours promue, hélas.

Ces dernières années, la plupart des journées d’action ont été un échec complet – non seulement en termes d’impact sur la politique gouvernementale, mais aussi en termes de participation, car les travailleurs savent qu’elles ne mènent à rien. Par crainte de perdre leur statut de « partenaire social », mais aussi le contrôle d’une mobilisation, les dirigeants confédéraux ne veulent pas sérieusement préparer un mouvement de grève reconductible. Pourtant, beaucoup ont compris que les journées d’actions ne suffisent plus et qu’il faut des méthodes d’action plus radicales pour faire plier le gouvernement. Les conditions sont aujourd’hui favorables à ce type d’action.

Quel projet politique ?

En fait, même une grève générale reconductible ne sera pas suffisante pour régler les problèmes des travailleurs. La grève générale est une action défensive. Or il faut aussi passer à l’offensive. Le mouvement syndical doit avoir un projet, une perspective politique. Il y a un besoin vital de « repolitiser » la CGT. Il faut préparer les travailleurs à une transformation fondamentale de la société. Car contrairement à ce qu’on entend souvent, la direction de la CGT a bien un programme politique, même si elle ne le définit pas comme tel. Et le problème, c’est que ce programme se limite à des réformes dans le cadre du capitalisme, en attendant qu’une nouvelle et illusoire période de « 30 glorieuses » permette d’arracher des concessions au patronat. C’est pourtant sur cette question centrale que tout se joue. De ce côté, rien n’est prévu dans les documents du Congrès. La direction ne semble pas prête à aborder cette question.

Mais la question se posera, dans tous les cas, car la crise du capitalisme va s’aggraver, malheureusement, et poussera de plus plus de travailleurs à se mobiliser plus fortement. C’est une nécessité !