Au mois de janvier dernier, lors de l’Assemblée Générale du MEDEF, Laurence Parisot, devenue, depuis, la nouvelle présidente de l’organisation patronale, affirmait que « la liberté de penser commence là où s’arrête le Code du travail ».

Elue début juillet, elle prône une réforme en profondeur du Code du travail, « réforme » que le nouveau gouvernement de Dominique de Villepin a immédiatement mise en chantier.

Au beau milieu des congés d’été, le gouvernement a pris par ordonnance plusieurs dispositions particulièrement défavorables aux salariés.

Parmi toutes ces mesures, on notera le prolongement de 2 à 4 ans de l’ensemble des mandats des représentants du personnel pour toutes les entreprises, et la possibilité de supprimer des instances représentatives des salariés au niveau national.

Une autre ordonnance vraiment vicieuse exclue les salariés de moins de 26 ans du calcul des effectifs des entreprises, ce qui repousse le déclanchement des obligations sociales et fiscales liées à un seuil d’effectif. Par exemple, en dessous de 50 salariés, un comité d’entreprise n’est pas obligatoire. En dessous de ce seuil, il est également plus difficile d’avoir une représentation syndicale, car les organisations syndicales ne peuvent pas désigner de délégué syndical. Au nom de la « lutte contre le chômage », le gouvernement s’attaque en réalité au mouvement syndical, première ligne de défense des salariés.

A signaler aussi l’extension du « forfait jour » aux salariés n’ayant pas le statut de cadre, ce qui supprime la référence horaire pour une journée de travail, et étend automatiquement la durée du temps de travail, du fait des pressions que subissent les salariés.

Un contrat arbitraire

La mesure phare des ordonnances du « plan d’urgence pour l’emploi » est le Contrat nouvelle embauche (CNE). Il s’applique à toutes les entreprises de moins de 20 salariés, soit 96% des entreprises et environ un tiers du salariat.

Sous prétexte de lutte contre le chômage, la volonté à peine cachée du gouvernement et du patronat est de fournir aux employeurs un contrat de travail beaucoup plus flexible que les contrats à durée indéterminée (CDI) et les contrats à durée déterminée (CDD).

Premièrement, la période d’essai est inexistante, alors qu’elle est comprise entre quelques jours et 3 mois renouvelables pour un CDI, et entre 15 jours et un mois pour un CDD.

Deuxièmement, pendant 2 ans, l’employeur pourra licencier le salarié sans aucune justification, alors que, pour un CDI, la rupture de contrat du fait de l’employeur doit être justifiée par un motif personnel (inaptitude, faute, etc.) ou pour des raisons économiques, dans le cadre d’une procédure déterminée. Dans le cas du CDD, l’employeur peut difficilement rompre le contrat, sauf en cas de faute grave ou d’accord entre le salarié et l’employeur.

Ainsi, avec le CNE, un patron pourra licencier impunément pour des motifs jusque là irrecevables, comme la maladie, la participation à une grève, le fait de se syndiquer ou les opinions politiques. C’est le sacre de l’arbitraire !

Troisièmement, le préavis de licenciement est extrêmement court : 2 semaines suffisent pour une ancienneté inférieure à 6 mois, et seulement un mois pour une ancienneté de 6 mois à 2 ans.

Enfin, lorsqu’il quitte l’entreprise, le salarié en CNE ne recevra que 8% de sa rémunération brute totale, contre 10% pour les salariés en CDD. Ainsi, la précarité s’accroît, mais la « prime de précarité » diminue !

Une précarité sans limite

Les dispositions du CNE sont scandaleuses, mais en réalité il s’agit d’une continuation et d’une officialisation de pratiques déjà très courantes.

Légalement, un CDD ne doit pas dépasser une durée de 18 mois, et n’est prévu que pour une activité extraordinaire ou temporaire, ou encore pour un remplacement. Il en est de même pour l’intérim. Mais dans la réalité, ce sont les CDD et l’intérim qui constituent la période d’essai d’un salarié. Or, pour le patronat, elle n’est pas suffisante, car elle est limitée à 18 mois dans le cadre d’un CDD. Le CNE vient d’étendre cette durée à deux ans.

Le gouvernement prétend exclure une extension des CNE à toutes les entreprises. Mais en fait, ces contrats vont être utiles aux grandes entreprises, via le système de la sous-traitance, qui est ainsi encouragée. Par exemple, une petite société de sous-traitance va embaucher un salarié en CNE le temps d’une « mission » dépendant du bon vouloir de la grosse société, dite « donneur d’ordre ». Lorsque le donneur d’ordre n’aura plus besoin du salarié, le sous-traitant pourra rompre rapidement le contrat, avec un préavis de 15 ou 30 jours et une misérable indemnité.

En plus de l’intérim et des CDD, ce type de contrat place de plus en plus de salariés dans une situation de précarité insupportable dans leur vie quotidienne. Il leur est de plus en plus difficile d’accéder à un logement ou de bénéficier d’un prêt bancaire, par exemple. Aujourd’hui, dans le secteur privé, l’intérim, la sous-traitance et les contrats à durée déterminée et à temps partiel constituent 80% des embauches.

Pour faire face aux incessantes attaques de la droite, nous devons maintenant nous battre, salariés, syndicalistes et étudiants, contre les ordonnances rétrogrades que viennent de faire passer ces ardents défenseurs des intérêts capitalistes.

Mais nous ne pouvons pas nous contenter de protester contre ces ordonnances et contre le CNE. En plus de nous mobiliser contre tous les contrats précaires, qui mettent les salariés dans une situation de chômage larvé, il faut exiger l’interdiction des CDD (sauf cas exceptionnels, devant être validés par les instances syndicales) et la nationalisation des agences d’intérim, qui doivent être intégrées dans les structures de l’ANPE, afin de renforcer le dispositif public d’aide et d’accompagnement des chômeurs.

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